La crise financière de 2008 a augmenté la mortalité par cancer
Un malheur ne vient jamais seul. Suite à la crise financière de 2008, qui a provoqué une augmentation massive du chômage, le nombre de morts par cancer a lui aussi fait un bon. Une étude parue dans The Lancet, le 25 mai, s’est penchée sur l'évolution de cette mortalité par cancers entre 1990 et 2009. Elle évoque une augmentation de 260.000 morts par cancer dans les pays de l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) entre 2008 et 2010, dont 160.000 au sein de l'Union européenne. "A l'échelle planétaire, ce sont bien plus de 500.000 morts supplémentaires par cancer pendant cette période", a indiqué à l'AFP le docteur Mahiben Maruthappu de l'Imperial College à Londres, qui a dirigé les recherches.
Les auteurs soulignent que leurs travaux établissent plus une association qu'un lien de cause à effet entre les événements économiques et de santé. Néanmoins, il y a d’après eux une "corrélation chronologique" puisque les évolutions du chômage et celles de la mortalité se suivent, ce qui soutient l'hypothèse d'un lien de cause à effet.
Les coupes budgétaires délétères, la couverture sociale protectrice
L’étude s’est intéressée au lien entre situation économique, décisions de politiques publiques et mortalité par cancer dans plus de 70 pays, représentant plus de deux milliards de personnes.
Si plus de personnes sont mortes d’un cancer entre 2008 et 2010, ce n’est pas parce qu’elles sont plus nombreuses à avoir déclaré la maladie durant cette période. Les raisons sont à chercher du côté de la façon dont la crise a affecté les personnes et les soins. Les chercheurs pointent du doigt les coupes dans les budgets alloués à la santé, dues aux difficultés financières des états. Ces réductions budgétaires auraient eu un effet sur le nombre de professionnels de santé disponibles et, par effet ricochet, sur la qualité des soins offerts.
De leur côté, les malades ont pu être fragilisés par leur situation socio-économique, la précarité étant un frein à l’accès aux soins. Les études ont aussi démontré une corrélation entre chômage, altération de la santé mentale, et émergence de problèmes comportementaux délétères, peu favorables aux soins anti-cancéreux.
Ces raisons se potentialisent et aboutissent à une réduction de l’accès aux soins, qui peut se manifester par un diagnostic tardif ou par des traitements retardés ou moins efficaces.
Dans les pays où il existe une couverture sociale, celle-ci a pu jouer un rôle "tampon". "Nous avons découvert que la hausse du chômage était associée à une augmentation de la mortalité par cancer mais que la couverture de santé générale protégeait la population contre ces effets", a aussi expliqué à l'AFP le docteur Mahiben Maruthappu.
Aux Etats-Unis, 18.000 décès supplémentaires ont été comptabilisés et 1.500 en France. En revanche, les chercheurs n'ont constaté aucune surmortalité sur la période 2008-2010 au Royaume-Uni ou en Espagne.
La mortalité des cancers "curables" en première ligne
Les cancers ont été classifiés par les scientifiques selon deux catégories : "ceux que l'on peut traiter", dont le taux de survie est supérieur à plus de 50% et les "incurables" dont la survie est inférieure à 10%. Le lien entre chômage et surmortalité a été le plus marqué pour les cancers que l'on peut traiter, relèvent les chercheurs, "ce qui montre l'importance d'un accès aux soins".
C'est donc le nombre de morts liés aux cancers aux meilleurs pronostics, comme les cancers de la prostate, du sein, du poumon chez les hommes et les cancers colorectaux qui ont le plus progressé pendant cette période noire.
Le cancer est la cause principale des décès dans le monde et touche tous les continents. En 2012, il a provoqué 8,2 millions de morts.
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