Le "chirurgien de l'horreur" : des victimes présumées de plus en plus nombreuses
En 2007, Christophe est confiant lorsqu’il part se faire opérer du dos. Lui et sa femme Cathy sont loin d’imaginer que cette intervention aura de lourdes conséquences sur ses jambes. "Ca fait mal au cœur, c’est beaucoup de souffrances physiques. Les photos parlent d’elles même. Ça nous ramène 12 ans en arrière. C’est difficile. Je suis émue, je suis désolée", témoigne Cathy en regardant des clichés pris au cours de ces douze dernières années.
Une intervention tourne mal et se termine par une amputation
Après une complication chirurgicale, Christophe serait resté plus de 10 heures au bloc opératoire. Ses mollets comprimés sur la table d’opération se sont peu à peu asphyxiés. C’est ce qu’on appelle le syndrome des loges. Pour tenter de sauver ses muscles, pendant 9 ans, Christophe fait de nombreux allers retours à l’hôpital. Mais à cause d’infections à répétition, sa jambe gauche doit finalement être amputée. Aujourd’hui, pour supporter la douleur, Christophe ne peut plus vivre sans morphine et de nombreux médicaments.
"Ce sont des douleurs qui me rappellent que je n'ai plus ma jambe et que j’ai mal au dos", explique Christophe. Son épouse souligne qu'on ne peut pas imaginer la douleur de son mari. "Mais, dit-elle, en étant au quotidien avec lui j’en ai quand même une idée". Le couple a du revoir ses priorités. L'aménagement de la maison a été adapté et le couple a du tirer un trait sur leur vie personnelle et renoncer à avoir des enfants. Ils ont "renoncé à vivre normalement comme tout le monde", s'attriste Cathy.
Des dizaines de patients réclament une procédure
Il y a 10 ans, le couple a décidé d’attaquer l’hôpital. La procédure est toujours en cours. Depuis la médiatisation de l’affaire, leur avocat, maître Bourgin, a été contacté par des dizaines d’anciens patients de ce chirurgien. Comme Christophe, Eric aussi a souffert d’une complication après avoir été opéré par ce médecin. "Moi, il m’a opéré et il a laissé une compresse dans mon cou. Il a oublié de compter et n’a pas fait le travail correctement. Il a mis ma vie en danger comme celle d’autres patients", s'insurge Eric.
Pour répondre aux nombreuses questions des victimes présumées, Maître Bourgin a tenu à réunir les victimes de ce chirurgien. « Je vais rechercher la responsabilité en rapprochant des éléments médicaux et des éléments de droit. Au terme de ce processus je vous dirai si oui ou non on peut engager une procédure ». Une enquête de l’Assurance maladie a d'ores et déjà relevé des irrégularités dans 54 dossiers. Et le chirurgien a récemment été suspendu pour 18 mois par l’ordre des médecins.
Il opère sans examen complémentaire
Même si Maître Bourgin n’a pas encore examiné dans le détail tous les nouveaux témoignages de patients… Selon lui, les mêmes éléments reviennent trop souvent. « Ce chirurgien opère trop ! Il opère sans une imagerie complète. Il ne diligente aucun examen complémentaire préalable. Quelque soit l’état de votre dossier médical, que vous soyez en arrêt de travail ou en arrêt de maladie depuis une semaine ou 6 ans, il vous opère du dos sans alternative thérapeutique », s’inquiète l’avocat.
« C’est donc cette indigence du nombre de rendez-vous pré opératoire, cette indigence du dossier médical qu’on lui reproche de façon systématique ». Aujourd’hui, Maitre Bourgin a recueilli les griefs de 65 personnes. Il ignore toujours s’ils sont fondés mais il remarque qu’ils sont en tous points identiques à ceux recensés et retranscrits dans les décisions qui ont suspendu ce chirurgien.
Bientôt une enquête pénale
Pour l’avocat du praticien accusé, tout repose sur l’expertise judiciaire et médicale du cas des plaignants…« Il va falloir qu’ils démontrent les liens entre leurs syndromes leurs infirmités et l’acte chirurgical. Sur les 5 personnes qui se plaignent depuis le 10 avril il y a eu des expertises. Toutes ces expertises ont évacué la responsabilité du chirurgien. Donc pour le coup je suis confiant ». répond maître Bernard Boulloud, avocat à Grenoble.
Jusqu’à présent les procédures judiciaires se sont déroulées devant les tribunaux administratifs. Mais les victimes présumées du chirurgien veulent aujourd’hui aller plus loin et demandent à la justice d’ouvrir une enquête pénale.
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