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Sidaction : "Ces dernières années, nous ne voyons pas de diminution du nombre de contaminations"

Environ 6 000 personnes découvrent leur séropositivité chaque année en France. 

Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Le 25e Sidaction s'ouvre ce vendredi soir, les médecins alertent sur la banalisation de l'épidémie.  (SEBASTIEN JARRY / MAXPPP)

"Les Français ne se protègent pas suffisamment", clame Jean-Michel Molina, le chef du service des maladies infectieuses de l’hôpital Saint-Louis et Université Paris VII, alors que débute le 25e Sidaction, vendredi 5 avril. Il est aussi le responsable des études sur la PrEP à l’Agence nationale de recherche contre le sida (ANRS). La PrEP (prophylaxie pré-exposition) est une stratégie de réduction du risque qui consiste à prendre un médicament afin d’éviter de se faire contaminer.

franceinfo : Il y a de nouveaux moyens de se protéger du VIH et pourtant beaucoup de personnes découvrent leur séropositivité en France, comment l'expliquez-vous ?

Jean-Michel Molina : Les nouvelles ne sont pas bonnes. Il est urgent de se remobiliser car chaque jour en France, 15 à 20 personnes sont contaminées par le virus du sida. On meurt toujours du sida dans les hôpitaux. Le préservatif reste un moyen majeur et extrêmement efficace de se protéger contre le VIH et les autres maladies sexuellement transmissibles. Depuis quelques années, nous avons aussi un autre outil de prévention, également très efficace contre le VIH : la PrEP, ce médicament utilisé chez les personnes séropositives dont on détourne l’utilisation pour la prévention contre le sida. On le donne à des personnes qui ont un risque de contamination par le VIH et qui sont protégées quand elles utilisent régulièrement ce moyen de prévention. Mais, le problème que nous avons actuellement en France, c’est que depuis de nombreuses années, nous ne voyons pas de diminution du nombre de contaminations car les personnes ne se protègent pas suffisamment. Il y a un manque d’utilisation de ces outils de prévention, que ce soit le préservatif ou la PrEP.

La France a autorisé la PrEP en 2016 pour la prévention. Trois ans plus tard, y a-t-il un manque d’informations envers ce public concerné par la PrEP ?

Il y a à la fois, un manque d’information et un manque de mobilisation. Il est quand même incroyable que nous soyons toujours en 2019 avec une épidémie liée au virus du sida non contrôlée (...). On a trop banalisé le sida, on a l’impression que cette maladie a disparu. Je crois qu’à l’occasion du Sidaction, il est urgent de se mobiliser, le Sidaction a d’ailleurs contribué à faire avancer la recherche, à permettre cette innovation qu’est la PrEP – c’est une recherche française, maintenant recommandée par l’OMS (Organisation mondiale de la santé). On considère aujourd’hui qu’en France environ 15 000 personnes prennent la PrEP de façon régulière. Cela reste très insuffisant, au regard du nombre de personnes qui n’utilisent pas non plus le préservatif. La PrEP peut être une façon de se protéger si on n’utilise pas le préservatif. Le problème, c’est qu’il y a trop de personnes en France qui n’utilisent ni le préservatif, ni la PrEP. 

21% des 15-24 ans pensent encore que le Sida peut s’attraper par un simple baiser. On a l’impression que plus la recherche avance, plus il y a d’ignorance, comment faites-vous face à ce paradoxe ?

Il est important d’informer le public que le fait d’être infecté par le sida est quelque chose de dramatique. Malgré les progrès réalisés pour le traitement de l’infection, vivre avec VIH reste très difficile au jour le jour, vous avez besoin d’un traitement à vie. Il n’y a pas pour l’instant de médicaments qui puissent guérir définitivement de cette infection, et il n’y a pas de vaccin contre le sida malheureusement même si les recherches progressent dans ce domaine. Il est donc vraiment essentiel de se protéger, il est essentiel aussi de se dépister, si on a eu des conduites à risques, notamment si on est un homme qui a des rapports sexuels avec des hommes, si on est originaire de pays de fortes endémies (Afrique sub-saharienne, Dom-Tom), si on a des partenaires multiples, de façon à éviter de transmettre la maladie à ses partenaires et de pouvoir bénéficier rapidement d’un traitement.

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