Affaire Naomi Musenga : des agents du Samu, menacés, portent plainte
Le 11 mai dernier, une employée du Samu du Bas-Rhin "n'a pas pu rentrer chez elle par crainte de représailles d'individus présents sur le lieu de son domicile", a annoncé le délégué CGT Sylvain Poirel au micro de France Bleu Alsace. Elle n’est pas la seule dans son cas : en tout, six plaintes auraient été déposées par des agents du Samu, d’après le journal Les Dernières Nouvelles d'Alsace (DNA). La direction des Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS), qui a confirmé les plaintes, n’en a pas donné le nombre exact.
Des menaces de mort sur les réseaux sociaux
Toujours selon les DNA, trois agents du Samu 67 ont reçu "des appels téléphoniques menaçants sur leurs téléphones privés", et trois auxiliaires de régulation médicale "sont la cible de dénonciations calomnieuses et de menaces de mort sur les réseaux sociaux". Leurs noms et photos auraient été diffusés de manière anonyme. A Bayonne également, un homme "fortement alcoolisé" a été interpellé le 10 mai pour 19 appels menaçants au Samu local.
Patrick Pelloux, président de l’Association des médecins urgentiste de France, réagit à la révélation des enregistrements. Entretien diffusé le 9 mai.
Naomi Musenga est décédée le 29 décembre. Ce jour-là, victime de graves maux de ventre et constatant des saignements, elle appelle le 15. Au standard, elle explique qu’elle "va mourir". Mais l’opératrice des pompiers ne la prend pas au sérieux, et lui conseille de contacter elle-même SOS Médecins. Naomi réussira à joindre les urgences cinq heures plus tard et mourra au CHU de Strasbourg, victime d’un infarctus et d’une "défaillance multiviscérale sur choc hémorragique".
L’enregistrement de l’appel de la jeune femme révèle une cruelle désinvolture de la part de l’opératrice, moqueuse, qui minimise la souffrance de Naomi et refuse de lui porter assistance. Depuis qu’il a été rendu public le 8 mai, la plateforme téléphonique du Samu du Bas-Rhin est saturée d’appels hostiles. Devant l’ampleur de ces réactions, la famille de la victime a appelé publiquement à la non-violence. "On ne peut pas en vouloir [aux opératrices du Samu et des pompiers]. Si elles ne l'ont pas aidée, c'est dû à des problèmes qui ont eu lieu dans leur structure. [...] Elles n'avaient rien contre [Naomi] personnellement", a affirmé sur BFMTV Martial Musenga, un des frères de la victime.
Une enquête préliminaire pour "non-assistance à personne en péril"
Depuis cet appel au calme, "le nombre d'appels agressifs est en régression", ont indiqué les HUS, qui maintiennent néanmoins les mesures de sécurité. Le 8 mai, la ministre de la Santé Agnès Buzyn a annoncé qu'elle avait saisi l'Inspection générale des affaires sociales. Deux jours plus tard, le parquet de Strasbourg a ouvert une enquête préliminaire du "chef de non-assistance à personne en péril". Le 11 mai, la famille Musenga a porté plainte pour "non-assistance à personne en danger" et "mise en danger de la vie d'autrui" contre les HUS et contre X. Les HUS ont eux-mêmes ouvert une enquête administrative.
Les parents de Naomi Musenga demandent notamment que les enquêteurs essayent de découvrir les causes du décès de leur fille. Une marche blanche est prévue mercredi 16 mai à Strasbourg à 17h30. Un rassemblement à Paris, place de l'Opéra, aura lieu à la même heure. Les organisations professionnelles et syndicales de médecins urgentistes vont pour leur part rencontrer la ministre de la Santé Agnès Buzyn lundi 14 mai. Il sera notamment question d’"évoquer les conditions inacceptables" du décès de la jeune femme et "les améliorations nécessaires à apporter au fonctionnement du SAMU", d’après un communiqué du ministère.
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