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Sarkozy ou Hollande, qui a vraiment fait libérer Florence Cassez ?

Les partisans de l'ancien président et de son successeur soulignent le rôle joué par les deux hommes dans la libération de la Française. Mais c'est surtout son comité de soutien qui a habilement mobilisé.

Article rédigé par Christophe Rauzy
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5 min
Nicolas Sarkozy et François Hollande sur le perron de l'Elysée lors de la passation de pouvoir, le 15 mai 2012. (PHILIPPE WOJAZER / AFP)

"Il m'a sauvé la vie." C'est ce qu'a déclaré Florence Cassez, à peine descendue de l'avion qui la ramenait du Mexique jeudi 24 janvier, évoquant l'activisme de Nicolas Sarkozy dans son dossier, tout en remerciant François Hollande : "Leur soutien a été vital, je leur dois beaucoup." Mais les partisans de l'ancien chef de l'Etat et ceux de son successeur s'opposent sur le rôle des deux hommes dans la libération de la Française. Francetv info détaille comment chacun a œuvré pour obtenir ce dénouement heureux, rendu surtout possible par la mobilisation des proches de la jeune femme.

Nicolas Sarkozy : médiatisation et fermeté

Parmi les fidèles de l'ancien président, ils étaient nombreux à souligner, jeudi 24 janvier, le rôle joué par Nicolas Sarkozy dans la libération de Florence Cassez.

Comme le rappelle Le Monde, dès le soir de sa victoire le 6 mai 2007, Nicolas Sarkozy promettait de s'occuper des Français otages et prisonniers dans le monde, dont Florence Cassez, alors emprisonnée depuis 18 mois au Mexique pour enlèvement et association de malfaiteurs. Un an plus tard, en avril 2008, elle est condamnée à 96 ans de prison. Ses parents obtiennent alors une première entrevue à l'Elysée, où le président s'engage à "suivre le dossier de près", raconte Le Figaro . "Il nous a rendu confiance", s'exclame même Charlotte Cassez, la mère de Florence. Diplomatiquement, cela se traduit en septembre 2008 par une demande officielle de transfert dans une prison française.

Ces demandes visant à permettre à la prisonnière d'effectuer sa peine en France sont plusieurs fois rejetées par les autorités mexicaines, comme le relate L'Express. Mais Paris continue à jouer un rôle de soutien direct à Florence Cassez, notamment par des visites de diplomates en prison. Nicolas Sarkozy reçoit plusieurs fois ses parents et effectue une visite très médiatisée à Mexico, en mars 2009, où il continue de demander son transfert en France : "Je ne suis pas venu ici contester les décisions de la justice mexicaine (…). Ma démarche ne présuppose ni de son innocence, ni de sa culpabilité. C'est une démarche que j'ai faite parce qu'elle est une citoyenne française."

Tout se dégrade en février 2011, quand la Cour de cassation mexicaine rejette le recours déposé par les avocats de Florence Cassez et entérine définitivement une peine ramenée à 60 ans d'emprisonnement. Trois jours plus tard, Nicolas Sarkozy choisit de lui dédier l'année du Mexique en France, événement culturel national auquel Mexico décide immédiatement de ne plus participer. Rien ne bouge jusqu'en 2012, où le climat s'apaise pendant les derniers mois du quinquennat de Nicolas Sarkozy. Malgré le rejet d'une demande de libération par la Cour suprême en mars, Paris mène une action plus discrète, prévoyant un changement de présidence au Mexique, synonyme d'espoir pour Florence Cassez.

Les "petits pas" de François Hollande

Comme pour Nicolas Sarkozy, les partisans de François Hollande, ministres ou parlementaires, ont salué l'action du président actuel, décisive selon eux dans la libération de Florence Cassez.

DLTFTV_MAM_2930498 (Francetv info)

Pourtant, la relation entre le chef de l'Etat et la Française n'était pas partie sur les meilleures bases. En avril 2012, le candidat Hollande envoie un émissaire, l'ex-ministre Michel Vauzelle, au Mexique. Il est accusé par la famille de Florence Cassez et par Nicolas Sarkozy de créer des interférences dans le dossier. Le camp Hollande se défend, justifiant ce déplacement comme uniquement destiné à "préparer le prochain G20" et à "réparer l'image de la France, dégradée par le quinquennat Sarkozy".

Parvenu au pouvoir, François Hollande choisit alors de rompre avec la médiatisation reprochée à son prédécesseur. "Sarkozy a roulé des mécaniques, le Mexique s’est braqué, Cassez est restée en prison et la relation bilatérale est restée au point mort", analyse une source diplomatique. Comme l'explique Le Parisien (article payant), c'est au contraire une "méthode douce", faite de "petits pas" qui est mise en place par François Hollande. Pas question donc de contrarier le président Felipe Calderón, hostile à une libération de la Française, lors du G20 organisé au Mexique en juin.

Mais en juillet, la victoire d'Enrique Peña Nieto à la présidentielle mexicaine ouvre un nouveau champ de possibilités. Reçu à Paris en octobre, il regrette que cette affaire ait trop marqué les relations entre les deux pays. François Hollande lui réaffirme alors sa "confiance dans l'indépendance de la justice mexicaine". Cette méthode discrète n'a pas permis seule la libération de Florence Cassez, mais elle n'a pas interféré dans les changements judiciaires et politiques en cours au Mexique, qui ont permis d'aboutir à une fin heureuse pour la Française.

Le comité de soutien, le vrai acteur décisif

La mobilisation politique en faveur de Florence Cassez n'aurait jamais eu une telle ampleur si le comité de soutien de la jeune femme n'avait pas été aussi actif. Omniprésent dans les médias, son président, Jean-Luc Romero, conseiller régional d'Ile-de-France, a maintenu une constance dans la défense de la Française comme en témoigne son blog très fourni. L'avocat de Florence Cassez, Frank Berton, s'est lui aussi emparé des médias grâce à son opiniâtreté juridique et son sens de la communication, observe Libération. Chaque interview de ces deux fers de lance de la cause Cassez a souligné la "corruption de la justice mexicaine" et "l'innocence criante" de la Nordiste, alors que la réalité n'est peut-être pas si évidente, nuance Arrêt sur images (article payant).

Mais ce sont surtout les parents de Florence Cassez, Bernard et Charlotte, qui ont su  habilement éviter que le sort de leur fille ne soit jeté aux oubliettes. L'exposition itinérante de toiles peintes par Florence leur a par exemple permis de glaner de nombreux soutiens, de la salle des fêtes de Vernaison (Rhône), avec Alain Delon en invité d'honneur, en passant par la mairie du 12e arrondissement de Paris, en présence de Valérie Trierweiler.

C'est d'ailleurs au côté de la compagne de François Hollande que Charlotte Cassez a appris la libération de sa fille, mercredi 23 janvier. Une concession médiatique et politique porteuse pour Valérie Trierweiler, note Metro. Mais c'est surtout pour Florence Cassez que la mobilisation de personnalités a été profitable. Car l'importance médiatique accordée à sa cause a forcé Nicolas Sarkozy comme François Hollande à tenter d'accélerer sa libération, attendue depuis sept ans.

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