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Six sujets sur lesquels Copé et Fillon n'ont pas dit la vérité

Les deux candidats à la présidence de l'UMP étaient les invités de l'émission "Des paroles et des actes" jeudi soir.

Article rédigé par Bastien Hugues
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
François Fillon et Jean-François Copé sur le plateau de France 2, le 25 octobre 2012. (MIGUEL MEDINA / AFP)

SUCCESSION A L'UMP – C'était un événement politique très attendu. Avant le vote des militants UMP qui les départagera le 18 novembre pour la présidence de l'UMP, François Fillon et Jean-François Copé étaient les invités, jeudi 25 octobre, de l'émission "Des paroles et des actes", sur France 2. Une émission au cours de laquelle l'un et l'autre se sont arrangés à plusieurs reprises avec la vérité. Explications.

Fillon embellit le bilan économique de Nicolas Sarkozy...

"Depuis le début de la crise, on a essayé d'empêcher l'économie française d'entrer en récession. Et on a plutôt réussi, parce que (...) l'économie française est celle qui a connu le moins de récession de toutes les grandes économies européennes." 

POURQUOI C'EST FAUX. En termes économiques, la récession définit deux trimestres consécutifs de croissance négative du produit intérieur brut (PIB). Selon les chiffres de l'OCDE, la France a connu une telle situation entre le deuxième trimestre 2008 et le premier trimestre 2009, soit quatre trimestres consécutifs. A l'époque, certains pays n'ont pas connu de récession (la Pologne et la Slovaquie par exemple), et d'autres ont connu une récession moins longue (comme la Belgique ou les Pays-Bas).

Et depuis, la France a effectivement échappé à une nouvelle récession, mais c'est aussi le cas d'une dizaine d'autres pays de l'OCDE, parmi lesquels l'Allemagne, le Royaume-Uni, la Belgique, l'Autriche, la Finlande ou le Danemark...

...et son action sur la réduction des dépenses publiques

"Les dépenses publiques ont augmenté en France depuis 1945 sans interruption jusqu'en 2011, où elles ont baissé pour la première fois. En volume, les dépenses ont baissé en 2011." 

POURQUOI C'EST FAUX. François Fillon enjolive également son bilan en matière de réduction des dépenses publiques. D'abord parce que globalement, même si la part des dépenses publiques dans le PIB est passée d'environ 30% au sortir de la seconde guerre mondiale à 56,3% en 2012, ce taux s'est entre temps replié à de nombreuses reprises, comme le montre ce graphique de l'Insee :

 

L'évolution de la dépense publique dans le PIB de 1960 à 2010. (PLF 2012 / INSEE)

Alors que François Lenglet lui fait remarquer que son affirmation est erronée, François Fillon maintient que les dépenses publiques ont bel et bien baissé en 2011, précisant cette fois qu'il évoque une évolution "en volume" (c'est-à-dire après élimination de l'influence de la hausse des prix). Problème : outre la subtilité et la technicité du détail, cette affirmation n'est, elle non plus, pas exacte.

Si l'on en croit un rapport de la commission des Finances du Sénat (PDF) de juillet 2012, les dépenses publiques en volume ont en effet été stabilisées (évolution de 0%), mais n'ont pas diminué comme l'affirme François Fillon. Une performance déjà "historiquement remarquable", selon le rapport parlementaire, et qui n'avait donc pas besoin d'être exagérée.

Copé et le fantasme des 500 000 emplois non-pourvus

"On ne peut pas dire qu'on n'a pas d'emplois, alors qu'on a entre 350 000 et 500 000 offres d'emploi non satisfaites." 

POURQUOI C'EST FAUX. 500 000 emplois non-pourvus malgré un nombre de demandeurs d'emploi qui dépasse les 3 millions ? Jean-François Copé ressort un vieux fantasme, longtemps évoqué par Nicolas Sarkozy. D'où sort ce chiffre ? "De nulle part", décryptait pourtant sur son blog un journaliste du service économie du Figaro dès février 2011, assurant qu'il s'agissait d'une estimation tout à fait "pifométrique".

Elle ne serait en fait qu'une extrapolation d'une étude de l'Association nationale des directeurs des ressources humaines (ANDRH) parue fin 2007, qui estimait à 300 000 le nombre d'offres d'emploi ne trouvant pas preneurs. Sauf que cette évaluation n'est confirmée par aucun chiffre officiel, et que depuis, ce chiffre a très certainement été revu fortement à la baisse en raison de la crise. 

Fillon oublie son appel à voter PS en cas de duel PS-FN

"Jamais je n'appelerai à voter pour ce parti. [Mais] jamais je n'ai appelé à voter pour le PS. Jamais." 

POURQUOI C'EST FAUX. Alors qu'il semble rejoindre Jean-François Copé sur la ligne du "ni PS - ni FN" en cas de duel électoral entre un candidat socialiste et un candidat frontiste, François Fillon oublie tout de même que le 21 mars 2009, il avait bel et bien appelé à "voter contre le FN" dans une telle situation, et donc à voter pour le PS. 

"Nous devons appeler nos électeurs à faire le choix de la responsabilité dans la gestion des affaires locales. Et tout ceci conduit à voter contre le Front national", avait-il précisément expliqué, devant le bureau politique de l'UMP.

Jean-François Copé et François Fillon, avant le début de leur débat le 25 octobre 2012 sur France 2. (WITT / SIPA)

Copé invente une alliance entre le PS et Mélenchon...

"Le PS est allié avec l'extrême-gauche de Jean-Luc Mélenchon, qui n'a rien à envier à l'extrême-droite de Marine Le Pen." 

POURQUOI C'EST FAUX. Ce n'est pas la première fois que Jean-François Copé s'en prend à "l'alliance" qui existerait selon lui entre le Parti socialiste et le Front de gauche. Il n'en est pourtant rien. Si Jean-Luc Mélenchon a effectivement appelé à voter pour François Hollande au second tour, c'était avant tout "pour chasser Sarkozy".

Et une fois l'élection de François Hollande passée, les communistes ont refusé de participer au gouvernement et de faire partie de la majorité, uniquement composée de socialistes, d'écologistes et de radicaux de gauche. Ces dernières semaines, les députés du Front de gauche ont d'ailleurs voté contre le traité budgétaire européen et ont refusé de voter le budget 2013, deux textes emblématiques soutenus par le gouvernement. 

...et un appel de Le Pen à faire battre Sarkozy

"Le Front national travaille tous les jours à notre destruction. Je rappelle qu'entre les deux tours de l'élection présidentielle, Marine Le Pen a appelé à faire battre Nicolas Sarkozy." 

POURQUOI C'EST FAUX. Non, Marine Le Pen n'a pas appelé à faire battre Nicolas Sarozy au second tour de l'élection présidentielle. Entre François Hollande, qui incarnait à ses yeux "un faux espoir", et Nicolas Sarkozy, "une nouvelle déception", la présidente du Front national avait expliqué le 1er mai qu'elle voterait blanc lors du second tour, et avait refusé de donner une consigne de vote à ses électeurs : "Vous êtes des citoyens libres et vous voterez selon votre conscience, librement."

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