300.000 travailleurs détachés en France, au mépris des règles sociales ?
C'est une directive européenne qui est aujourd'hui largement contournée. La directive 96/71 du parlement européen "concernant le détachement de travailleurs effectué dans le cadre d'une prestation de services "- ce n'est pas l'histoire du plombier polonais, mais presque : en théorie, ce détachement de salariés répond "au besoin de travailleurs spécialisés en vue d'effectuer une tâche de nature complexe dans un autre Etat membre confronté à un manque de main d'oeuvre dans ce domaine précis".
Combien sont-ils ? Bruxelles les estimait à un million en 2009, un million et demi aujourd'hui, selon un rapport publié mardi par la commission des affaires européennes du Sénat, qui a enquêté sur une "explosion de la fraude en détachement". Depuis l'affaire du plombier polonais, on pensait que les choses étaient claires : un travailleur communautaire peut venir travailler en France, mais à un salaire français. Sauf que la fraude est plus insidieuse : les salaires sont bien français, mais les charges sociales sont acquittées dans le pays d'origine du travailleur.
Le rapport sénatorial estime à 300.000 le nombre de "salariés low-cost détachés en France au mépris du droit communautaire" . Eric Bocquet, sénateur du Nord, parle de "dumping social" : "en période de crise, ce chiffre devient un réel problème politique tant il peut générer au sein de la population le sentiment d'une captation des emplois par des salariés étrangers forcément moins coûteux" .
Des Français employés par des agences d'intérim au Luxembourg
Les sénateurs ont aussi découvert certaines pratiques, pour le moins contestables, d'agences d'intérim luxembourgeoises. Elles recrutent des Français et les affilient au régime local. Sauf que les Français ne mettent jamais les pieds au Luxembourg : ils sont employés en France, par des entreprises françaises... à des conditions imbattables évidemment. C'est toute l'histoire de Ryanair, en plein procès pour non-paiement de ses charges sociales en France.
Comme dans tout bon rapport qui se respecte, les sénateurs plaident, in fine, pour des contrôles accrus - un projet d'amélioration de la directive de 1996 a été présenté l'an dernier, un texte trop modeste et restrictif, selon Eric Bocquet. La France, la Belgique et l'Espagne aimeraient ne pas restreindre la liste des moyens de contrôle, mais les nouveaux Etats membres et la Grande-Bretagne sont contre...
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.