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Marche contre l'antisémitisme : "On n'est pas dans des batailles politiques", explique une référente racisme et antisémitisme

"L'initiative est excellente", c'est un "sursaut républicain nécessaire", estime Céline Masson, directrice du Réseau de Recherche sur le Racisme et l'Antisémitisme (RRA).
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Un appel à marcher contre l'antisémitisme a été lancé pour dimanche 12 novembre 2023 à Paris (photo d'archive, 2004). (JOEL ROBINE / AFP)

"On n'est pas dans des batailles politiques", affirme mercredi 8 novembre sur franceinfo Céline Masson, référente racisme et antisémitisme, directrice du Réseau de Recherche sur le Racisme et l'Antisémitisme (RRA) et professeure à l'Université de Picardie Jules-Verne. La présence de Marine Le Pen et d'Éric Zemmour à la marche citoyenne contre l'antisémitisme organisée dimanche à l'appel de Gérard Larcher et Yaël Braun-Pivet crispe la classe politique. La France insoumise a décidé de ne pas y participer. "S'ils viennent au nom du RN ou de leur parti, c'est un gros problème", admet Céline Masson. Chaque citoyen, quelles que soient ses couleurs politiques, doit être présent. C'est une marche citoyenne et un sursaut républicain", dit-elle. Les actes antisémites ont explosé en France depuis le début du conflit entre le Hamas et Israël : "C'est très inquiétant. Nous ne devons pas banaliser. Des juifs, aujourd'hui, ont peur en France", explique-t-elle. Elle appelle les Français à participer à cette marche : "Les Juifs se sentiront certainement moins seuls. C'est un message formidable de solidarité", affirme-t-elle.

franceinfo : Comment jugez-vous l'initiative des présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat ?

Céline Masson : L'initiative est excellente. C'est un véritable sursaut républicain qu'il faut actuellement. Nous devons tous être présents.

"Le plus important, c'est de ne pas défiler avec les étendards politiques."

Céline Masson, référente racisme et antisémitisme

à franceinfo

Mais chaque citoyen doit être présent et représenté effectivement que lui-même. Il est important de dire non à l'antisémitisme et d'être présent. On n'est pas dans des batailles politiques.

La présence de Marine Le Pen, Jordan Bardella et Éric Zemmour ne vous pose pas de problème ?

S'ils viennent au nom du RN ou au nom de leur parti, c'est un gros problème. Maintenant, qu'ils viennent en leur nom parce qu'ils veulent lutter contre l'antisémitisme, on ne peut pas empêcher des personnes d'être là. Chaque citoyen, quelles que soient ses couleurs politiques, s'il ne vient pas avec ses couleurs politiques, doit être présent. C'est une marche citoyenne et un sursaut républicain.

Êtes-vous surprise par les réactions politiques que suscite leur présence ?

Ça ne me surprend pas du tout et je trouve très dommage de détourner [cette marche], alors que nous sommes dans un moment grave en France avec des actes antisémites, des tags antisémites, avec des propos antisémites. Nous devons encore une fois être rassemblés et unis contre l'antisémitisme. C'est le mot d'ordre aujourd'hui. Donc s'il y a une récupération politique d'un côté comme de l'autre, ce sera très dommage.

Plus de 1 000 actes antisémites en un mois contre 400 sur toute l'année dernière. Cela vous inquiète ?

C'est très inquiétant. Nous ne devons pas banaliser. Des Juifs, aujourd'hui, ont peur en France. J'en ai le témoignage. Ces personnes, parfois des enfants cachés de la Shoah, des familles juives des deuxièmes et troisièmes générations, se demandent s'ils doivent rester en France aujourd'hui. Ils ont peur. Ils ont besoin que des non-Juifs se mobilisent pour la République, pour la France. C'est une formidable initiative. Je serai présente. Les Juifs se sentiront certainement moins seuls. C'est un message formidable de solidarité avec les Juifs. Ça ne concerne pas que les Juifs, ça concerne chaque Français, chaque citoyen. C'est la démocratie qui est en danger.

L'imam de Drancy, président de la Conférence des imams de France, a déclaré mercredi matin sur franceinfo : "Nous serons tous juifs" dimanche lors de la marche. Vous saluez cette déclaration ?

Si c'est tout à fait sincère et que ce ne soit pas aussi des récupérations. Je veux bien qu'on soit tous juifs, mais il faut l'être en toute occasion dans ce cas-là. Mais il y a aussi à condamner le terrorisme. Aujourd'hui, c'est ça qui nous inquiète en France, c'est aussi l'islamisme et le terrorisme.

"C'est très bien de dire qu'on est juif, mais aussi, il faut dire que l'on combat l'islamisme et l'antisémitisme."

Céline Masson

à franceinfo

J'aimerais que cela aille ensemble.

Vous ne craignez pas que cette marche soit juste symbolique ?

C'est un moment fort. Pour ces personnes que j'entends tous les jours, qui ont peur, ce sera un signe fort. Faisons-le, au moins pour ces personnes-là. Aujourd'hui, certaines ne sortent pas de chez elles. Ce n'est pas une exagération, c'est une réalité. Ça fait très peur. Il y a un climat qui est très inquiétant. Je pense que cette marche aura réussi peut-être à envoyer un signal fort : on est tous ensemble. La République est là et elle combattra l'antisémitisme.

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