Dérives sectaires : le nombre de signalements en "hausse de 86 % en cinq ans", selon le président de la mission interministérielle sur le sujet
Le nombre de signalements reçus par la Miviludes est en "hausse de 86 % en cinq ans", indique sur franceinfo, ce jeudi 9 mars, Christian Gravel, président de cette mission interministérielle qui surveille et lutte contre les dérives sectaires. "Des centaines de milliers de nos concitoyens sont concernés directement ou indirectement par ces problématiques-là", ajoute-t-il, alors que s'ouvrent les premières assises nationales contre les dérives sectaires, à Paris.
franceinfo : A-t-on une idée du nombre de personnes qui vivent aujourd'hui sous emprise ?
Christian Gravel : Des centaines de milliers de nos concitoyens sont concernés directement ou indirectement par ces problématiques-là. Un rapport parlementaire, il y a quelques années, avait évoqué un demi-million. S'agissant du nombre de signalements reçus par la Miviludes, il est en hausse de 86% en cinq ans. Ce processus est pernicieux, pervers, parce qu'il s'inscrit dans de la manipulation mentale. Évidemment, il est dangereux puisqu'il se traduit par des problématiques psychologiques, financières, physiques. Parfois, il aboutit à des drames, comme des viols ou des morts.
>> VIDEO. Réseaux sociaux : enquête sur les nouvelles dérives sectaires en ligne
Cette estimation n'est-elle pas la partie émergée du phénomène ?
Bien évidemment. La plupart des victimes n'ont pas conscience, par définition, qu'elles sont victimes d'emprise mentale par des entrepreneurs sectaires, par des délinquants ou des criminels sectaires. Bien souvent, ce sont les proches qui nous alertent. Cela permet ensuite d'engager un certain nombre de processus de coordination, d'actions de répression sur les individus ou les structures concernés.
On connaît les sectes que sont la Scientologie ou bien les Témoins de Jéhovah, moins les "nouveaux gourous". Qui sont-ils ?
L'un des éléments-clés de cette évolution du phénomène sectaire, c'est d'abord l'émergence des réseaux sociaux, et donc la démultiplication de micro-influenceurs sectaires. Ils s'inscrivent toujours dans les mêmes logiques, en vous vendant du bonheur, des recettes miracles, notamment lorsque vous êtes confronté à la maladie. Ils exploitent toutes les failles, toutes les vulnérabilités, toutes les fragilités qui peuvent concerner chacun d'entre nous.
À quoi remarque-t-on qu'un de ses proches est sous l'emprise d'une secte ?
Ce qui doit nous alerter, c'est le changement de comportement, le changement de discours. Lorsque vous avez une rupture progressive avec l'entourage, la société, les institutions. L'une des caractéristiques aussi liées à l'émergence du web, c'est la croissance exponentielle des théories complotistes et leur hybridation avec les phénomènes sectaires. Ces théories permettent d'alimenter des discours visant à rompre, justement, avec le reste de la société.
Des victimes des sectes vont participer à ces premières assises nationales contre les dérives sectaires. Ont-elles des points communs ?
Leur point commun, c'est d'avoir été manipulé par des individus, par des groupes. Ça n'a rien à voir avec une question de naïveté. Il ne faut pas sous-estimer l'intelligence de ceux que nous avons en face. Ils s'adaptent aux évolutions de la société, aux besoins, aux attentes de nos concitoyens en quête de sens et qui reçoivent une vision du monde, des recettes, des guides de vie leur permettant d'être dans un processus soi-disant d'avancée, de développement, alors qu'ils sont au cœur de manipulations avec des préjudices qui peuvent être très lourds.
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