Dérives sectaires : les saisines de la Miviludes atteignent un nouveau record
Dérives thérapeutiques amplifiées par le Covid, emprise mentale... Les gourous et autres charlatans prolifèrent, comme en attestent les derniers chiffres communiqués par la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires.
Les saisines de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) ont atteint un nouveau record en 2021, en atteignant le nombre de 4 020, soit une augmentation de 33,6% par rapport à 2020, indique la Miviludes dans son nouveau rapport. Un "regain d'activité" lié notamment à la crise sanitaire.
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Une grande partie des saisines concernent des formes de médecines alternatives ou des promesses de bien-être et de spiritualité, qui attirent des personnes se méfiant de la médecine conventionnelle. La Miviludes estime qu'il est "indéniable" que le Covid-19 a "déstabilisé de nombreuses personnes en perte de repères" et que les signalements qu'elle a reçues sont le "reflet d'une véritable crise sociale teintée d'isolement, de questionnements, de colères et de craintes".
Dérives thérapeuthiques liées au Covid
Le Covid-19 a entraîné un "regain d'activité" du pôle santé de la Miviludes. 1 011 saisines lui ont été confiées. Elles visent des dérives thérapeutiques, des pratiques de soins non conventionnelles, comme la naturopathie, la nouvelle médecine germanique, la ventousothérapie, la méditation en pleine conscience dont l'efficacité n'a jamais été prouvée ou encore le jeûne et le crudivorisme.
Ainsi, Thierry Casasnovas, YouTubeur crudivore et complotiste aux plus de 80 millions de vues, a fait l'objet de 54 saisines à lui seul. Comme l'antivax Jean-Jacques Crèvecoeur, il est soupçonné d'avoir une emprise mentale sur ses fidèles, d'embrigader leurs enfants, de les pousser à rompre avec leur environnement et d'avoir des exigences financières "exorbitantes". À leur image, la Miviludes note que les pseudo-guérisseurs sont de plus en plus nombreux.
L'emprise mentale de A à Z
Parmi les 1 515 dossiers confiés au pôle Sécurité et les 670 autres confiés au pôle économique et financier, nombreux sont ceux qui s'intéressent aussi à la santé et au bien-être. La Miviludes alerte sur les dérives du néo-chamanisme, de la méditation de pleine conscience mais aussi sur la marchandisation du bien-être et du culte de soi via le coaching et du développement personnel. "Les groupes sectaires ont su alimenter les peurs et exploiter les promesses d'un monde meilleur, d'une vie éternelle, ou à tout le moins heureuse, et d'une transformation de soi", souligne le rapport à propos du développement personnel qui promet d'atteindre la "meilleure version de soi-même". Toutes les étapes de l'emprise mentale sont là : la phase de séduction, la déconstruction par un processus initiatique, la reconstruction et la consolidation.
La Miviludes prévient aussi contre les dérives du "féminin sacré", "présenté comme un mouvement féministe" mais qui en réalité "essentialise les femmes en les réduisant à des organes génitaux ou des facultés reproductives". Sous couvert d'"empowerment", le "féminin sacré" explique par exemple que, si une femme a des règles douloureuses, c'est qu'elle n'est pas "en accord avec sa nature profonde de femme". Dans le détail, 744 saisines concernent la santé en général, 148 le complotisme et les antivax, 173 le développement personnel, dont le coaching, 159 les spiritualités, le chamanisme et les psycho-spiritualités, 116 la méditation et le yoga et 35 les pseudos-sciences.
Une com via les réseaux sociaux
Mais la Mission interministérielle estime que le "contexte de perte de repères sociaux engendré par la crise sanitaire" a aussi eu des conséquences dans l'intensification du prosélytisme religieux ou spirituel, qui a remplacé le porte-à-porte par une communication efficace sur les réseaux sociaux. Ainsi 293 saisines concernent des mouvances chrétiennes, 99 les Témoins de Jéhovah, 33 l'Église de scientologie, 31 l'anthroposophie, 27 de l'écologie et des éco-villages, 26 des mouvances bouddhistes, et quelques dizaines des mouvances hindouistes, musulmanes et juives.
Elle a également reçu 86 saisines dénonçant des réseaux de ventes multi-niveaux, qui ciblent en majorité les jeunes hommes de 16 à 25 ans en leur promettant de devenir "trader" et de se faire de l'argent facile, 87 visent des formations professionnelles. Plusieurs signalements concernent aussi le masculinisme, le virilisme et les mouvements anti-féministes qui organisent notamment des "stages de masculinité" avec un "corpus idéologique particulièrement fort et violent", propice à installer une emprise mentale sur les participants.
Sur les 4 020 saisines reçues par la Miviludes en 2021, 20 ont donné lieu à des signalements à la justice, au titre de l'article 40 du Code de procédure pénale qui veut que toute autorité constituée est tenue de prévenir le procureur de la République s'il a connaissance d'une infraction. 391 dossiers ont été transmis aux services compétences, comme les Agences régionales de santé ou la Direction générale de la concurrence. Sur les 396 situations concernant des mineurs, cinq ont été transmises à des conseils départementaux.
Contre les dérives sectaires, un seul mot d'ordre : sensibiliser, signaler et protéger. Ce combat est tout autant le mien que le vôtre. Avec nous, il y a la @Miviludes : https://t.co/EZgdBxrkb6.@franceinfo ⬇️ pic.twitter.com/hVLN624jg9
— Sonia Backes (@SoniaBackes) October 1, 2022
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