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"Les mots tuent", un Tumblr dénonce les clichés sur les violences faites aux femmes

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brut : sophie gourion
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Article rédigé par Brut.
France Télévisions

"Ivre, il frappe sa compagne pour des grumeaux dans la pâte à crêpe", "Morte d’avoir été trop belle"… Ce type de titre, pour Sophie Gourion, véhicule des stéréotypes sur les violences faites aux femmes qui ont tendance à déresponsabiliser l’agresseur et inverser la charge de la faute. 

"Le crime passionnel n’a aucune existence juridique. C’est vraiment un artifice journalistique pour créer de l’empathie envers le meurtrier qui ne serait plus tout à fait lui-même." Sur son compte Tumblr, intitulé "Les mots tuent", Sophie Gourion dénonce les clichés sur les violences faites aux femmes véhiculés dans la presse. 

Sur un titre comme "Ivre, il frappe sa compagne pour des grumeaux dans la pâte à crêpe", l’ancienne journaliste explique que si a priori ce titre est "drôle", c’est surtout un titre qui "se veut attrape-clic et qui se rit des violences conjugales en inversant la faute." Ce qu’elle a remarqué sur beaucoup de titres concernant les violences faites aux femmes c’est que "tous les motifs, même les plus futiles, sont là pour déresponsabiliser l’agresseur." Et de fait, 'il n’y aurait que des meurtriers malgré eux et les femmes seraient un peu l’élément déclencheur."

Affaire Alexia Daval : "On a dit qu’elle oppressait son mari, qu’elle était violente et, petit à petit, on se rend compte que la culpabilité s’inverse."

Ces stéréotypes véhiculés par la presse, elle les a retrouvés dans l’affaire Alexia Daval. D’abord "quand on a parlé d’une agression d’une joggeuse, il y a plein d’articles qui ont essaimé partout expliquant aux femmes qu’il fallait faire attention dans l’espace public. Or, c’est vraiment une idée reçue, véhiculée par ce genre d’article, sachant que 80% des viols se font par un proche de la victime." Puis, quand il a été découvert qu’il s’agissait d’une affaire de meurtre conjugal, "le regard de la défense, et indirectement de la presse sur elle, a changé", fait-elle remarquer. "On a dit qu’elle oppressait son mari, qu’elle avait des sautes d’humeur suite à un traitement médical, qu’elle était violente et, petit à petit, on se rend compte que la culpabilité s’inverse." a-t-elle observé. Même l’avocat, selon elle, en mettant sur le même plan le meurtrier et la victime a véhiculé l’idée "qu’il y avait deux victimes."

Sur cette affaire, l’une des expressions qui l’a interpellée pour qualifier le mari d’Alexia Daval, c’est celle de "gendre idéal". Pour Sophie Gourion, cette idée "sous-entend qu’un meurtrier a un profil particulier qui serait facilement identifiable. Or, il faut vraiment démontrer ces idées reçues : la violence conjugale et les homicides conjugaux touchent toutes les catégories de personne, dans la France entière."

"Les mots tuent"

"Donc oui, les mots tuent. Le mauvais traitement journalistique des violences faites aux femmes revient à les tuer une deuxième fois." conclue la jeune femme. Elle précise toutefois que ce ne sont pas ses propres morts, mais ceux d’une proche d’une victime qui lui avait écrit après avoir lu un article qui l’avait extrêmement choquée : "Morte d’avoir été trop belle". 

Enfin, Sophie Gourion tient à insister sur le fait qu’une femme "n’est jamais responsable des violences qu’elle subit. Rien ne justifie des violences à l’égard d’une femme, ni un steak haché trop cuit, ni une saute d’humeur, ni un mot de trop."

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