Les enseignants déçus par l'abandon de l'ABCD de l'égalité
Le gouvernement n'a pas encore annoncé officiellememnt l'abandon du programme ABCD de l'égalité, mais les enseignants qui ont pu expérimenter ce dispositif test sont déjà consternés. Depuis la Toussaint, ce programme est mis en oeuvre dans 600 classes, allant de la grande section de maternelle au CM2. Le but était de "faire prendre conscience aux enfants des limites qu'ils se fixent eux-mêmes, des phénomènes d'autocensure trop courants, leur apprendre à grandir dans le respect des autres ". Et il devait être généralisé à la rentrée 2014.
"Tout ce qui a été dit sur les ABCD est proprement hallucinant, les critiques sont délirantes ", dénonce Emmanuel, un des premiers professeurs à avoir enseigné l'ABCD. Ce programme a fait l'objet d'attaques et de polémiques du mouvement Journées de retrait de l'école, emmené par Farida Belghoul, ancienne militante du mouvement de la marche des Beurs de 1984, passée à l'extrème-droite. Le mouvement a été rejoint par les opposants au mariage gay qui dénoncent un "cheval de Troie aux théories LGBT (lesbiennes, gay, bi et trans)". De nombreuses rumeurs ont circulé sur les réseaux sociaux, faisant état de cours de masturbation ou de garçons portant des robes.
"Renoncer à cause d'une frange ultraminoritaire de gens d'extrême droite serait une faute politique grave ", prévient Muriel Salle, maîtresse de Conférences à Lyon 1 et formatrice pour les ABCD. "Un enterrement de première classe ", "dramatique pour les filles et les garçons ". Les professeurs qui ont exécuté le programme décrivent des lectures sur les modèles des princesses et des chevaliers, des ateliers pour réfléchir aux métiers ou au couleurs et à leurs attributions selon les sexes : "Ce sont des activités à hauteur d'enfants, nous partons de situations concrètes observées dans les cours d'école ", raconte Emmanuel.
Bernard Bagaggia, directeur d'école dans un quartier populaire de Vénissieux, dans le Rhône estime que l'ABCD a rempli sa fonction : "le bilan est très satisfaisant car cela nous a permis d'aborder des sujets sur lesquels nous nous censurons habituellement ". Et face aux "grosses interrogations " de certains parents, "nous avons dû argumenter ", "mais nous avons su montrer qu'il s'agissait d'un travail d'enseignant, pas de militant ".
Les ministres concernés, Benoît Hamon à l'Education nationale et Najat Vallaud-Belkacem aux droits des femmes doivent faire des annonces ce lundi pour préciser l'avenir du dispositif. Mais le ministère fait savoir que si la forme pourrait être revue, le fond, à savoir la lutte pour l'égalité des sexes, ne sera pas abandonné. Un nouveau programme sur la question devrait voir le jour, sans qu'il soit possible d'en estimer la date.
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