"On ne désarmera pas" : contre le "choc des savoirs" à l'école, l'intersyndicale espère une forte mobilisation samedi

Des syndicats enseignants, des organisations de jeunesse et la fédération de parents d'élèves FCPE exigent toujours l'abandon des mesures annoncées par Gabriel Attal en décembre, notamment les groupes de niveau au collège.
Article rédigé par Lucie Beaugé
France Télévisions
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Une manifestation de professeurs contre le "choc des savoirs", le 19 mars 2024 à Paris. (VALERIE DUBOIS / HANS LUCAS / AFP)

Des grèves, des opérations "collège mort" et maintenant un appel à manifester à Paris et dans toute la France, samedi 25 mai. Depuis six mois, des syndicats enseignants, des organisations de jeunesse et la fédération de parents d'élèves FCPE livrent bataille contre la réforme lancée en décembre 2023 par Gabriel Attal, lorsqu'il était ministre de l'Education nationale. Un "choc des savoirs" auquel le désormais Premier ministre n'entend pas renoncer, mais que ces organisations espèrent bien ne pas voir survenir à la rentrée prochaine. A commencer par sa mesure la plus emblématique : la création de groupes de niveau au collège.

"On a l'ambition de réaliser une grande mobilisation. L'arc rassemblé est vraiment large. Profs, parents, lycéens...", souligne Benoit Teste, secrétaire général de la FSU, qui s'est exprimé lors d'une conférence de presse de l'intersyndicale, mercredi 22 mai. "Cet événement est inédit" car quasi unanime, relève Elisabeth Allain-Moreno, secrétaire générale du SE-Unsa. Le Snes-FSU, premier syndicat du secondaire, SUD Education, la CGT éduc'action, la Fnec-FP FO, le Sgen-CFDT, Unsa-éducation... Parmi les organisations syndicales de l'enseignement, seul le Snalc n'a pas pris part à l'appel à manifester.

En choisissant un samedi, l'intersyndicale espère des rassemblements massifs. Contrairement à un jour de semaine, "cela permet aux parents de participer activement", fait valoir Abdelkrim Mesbahi, vice-président de la FCPE. Toutefois, "il ne s'agit pas d'une journée noire, mais de porter un projet positif pour l'école", veut croire Elisabeth Allain-Moreno. Sur les visuels de l'intersyndicale, le mot d'ordre est d'ailleurs double : "Non au choc des savoirs" et "Pour l'école publique".

Grèves et recours en justice

Depuis le 5 décembre, date à laquelle Gabriel Attal a annoncé un arsenal de mesures pour rehausser le niveau des élèves, plusieurs actions ont déjà été menées. A l'échelle locale, des parents d'élèves décident épisodiquement de ne pas envoyer leurs enfants à l'école le temps d'une journée. A l'échelle nationale, plusieurs appels à la grève ont été lancés. Mais le succès n'a pas été fulgurant, et a baissé en intensité au fil des mois : le 2 avril, le ministère de l'Education nationale faisait état de 15% de grévistes dans les collèges, 5% dans les écoles et seulement 2% dans les lycées généraux et technologiques. Ils étaient 20% dans le premier comme le second degré le 6 février.

Pour Maud Valegeas, co-secrétaire fédérale de SUD Education, les mobilisations précédentes ont quand même permis deux choses : "gagner l'opinion publique" et "faire évoluer le texte" sur les groupes de niveau. Dans un arrêté publié au Journal officiel mi-mars, la formulation a en effet été abandonnée au profit de groupes "constitués en fonction des besoins des élèves". Mais en dépit de cette évolution sémantique, l'intersyndicale pointe toujours un risque de "tri" des élèves, qui ne les fera pas progresser. "Il y a bien d'autres solutions pour notre collège, comme la mixité sociale", lance Caroline Brisedoux, secrétaire nationale de la Fédération Sgen-CFDT. 

Pour tenter de faire reculer le gouvernement sur les groupes de niveau, le levier juridique a également été utilisé par certains syndicats. L'Unsa et la CFDT ont notamment déposé des recours auprès du Conseil d'Etat pour demander la suspension de cette mesure. Mais, dans une décision publiée le 30 avril, la plus haute juridiction administrative a d'ores et déjà rejeté celui de l'Unsa, estimant qu'il n'y avait pas "d'urgence" à statuer.

"Il n'y a aucun vrai projet depuis 2017"

Au-delà des groupes de niveau, l'intersyndicale proteste contre d'autres mesures du "choc des savoirs" : les classes de "prépa-seconde", l'obligation d'obtenir le brevet pour poursuivre sa scolarité, ou encore la labellisation des manuels du premier degré. Celle-ci "vise à imposer des méthodes pédagogiques qui ne font pas consensus au détriment de la liberté pédagogique des enseignants", alertent les organisations, qui s'inquiètent aussi du discours sur l'autorité à l'école porté par Gabriel Attal.

Plus globalement, c'est toute la politique éducative portée par cinq ministres différents sous la présidence d'Emmanuel Macron qui est dénoncée. "Les enjeux de l'école sont de taille et il n'y a aucun vrai projet depuis 2017, hormis des termes pompeux", déplore Elisabeth Allain-Moreno. Pour Michaël Marcilloux, de la CGT Education, les personnels subissent aussi "une perte de sens du métier". Entre manque de moyens et crise d'attractivité, "nous sommes en train de nous diriger vers ce que subissent les salariés de l'hôpital", juge ce représentant syndical.

Qu'importe l'importance de la mobilisation samedi, l'intersyndicale promet de ne pas baisser les bras. Et ouvre déjà la voie à d'autres actions d'ici à la fin de l'année scolaire. "On ne désarmera pas et les choix se feront en intersyndicale", confie à franceinfo Jérôme Fournier, secrétaire national du SE-Unsa.

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