Suicide de Lily dans un hôtel du Puy-de-Dôme : les enfants placés "n'intéressent personne", se désespère un militant des droits de l'enfant

"Jusqu'à quand allons-nous accepter de placer des enfants, d'abandonner des enfants dans des structures qui ne sont absolument pas adaptées", interpelle Lyes Louffok, lui-même passé par l’aide sociale à l’enfance (ASE).
Article rédigé par franceinfo
Radio France
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Lyes Louffok, militant des droits de l'enfant, le 15 février 2024 sur France Inter. (FRANCE INTER / RADIO FRANCE)

"Il y a cette sensation assez révoltante de se dire qu'il y a des vies qui comptent moins que celles des autres, celles qui touchent les vies d'enfants placés", s'est indigné jeudi 15 février sur France Inter Lyes Louffok, militant des droits de l'enfant, alors qu'un rassemblement est organisé jeudi à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) après le suicide le 25 janvier d'une adolescente de 15 ans, Lily, retrouvé pendue dans un hôtel où elle était placée. Entre 100 et 150 personnes se sont par ailleurs réunies ce jeudi devant le siège du conseil départemental du Puy-de-Dôme, à Clermont-Ferrand, rapporte France Bleu Pays d'Auvergne. Les manifestants sont venus dénoncer "l'inaction des autorités" dans la prise en charge des mineurs placés. 

"On n'intéresse personne", s'est emporté cet ancien enfant placé, qui tire à boulets rouges sur un système de protection de l'enfance "à bout de souffle" qui n'est "plus en capacité de répondre à son objectif premier, qui est de protéger les enfants". Outre le suicide de Lily près de Clermont-Ferrand le 25 janvier, Lyes Louffok cite les cas d'une autre jeune fille, Nour qui était placée en hôtel à Paris et "qui s'est jetée dans la Seine", celui de Jess, "poignardé par un autre enfant placé dans un hôtel à Suresnes" ou encore "Anthony Lambert, qui a été tué dans un camping en Saône-et-Loire".

"Jusqu'à quand cela va-t-il durer ?", s'est interrogé celui est devenu le porte-voix des enfants placés. "Si nous interdisons par ce mode de placement, si nous ne créons pas de nouvelles places, si nous n'améliorons pas les conditions de travail des travailleurs sociaux, il y aura d'autres drames", a-t-il alerté.

"Jusqu'à quand allons-nous accepter de placer des enfants, d'abandonner des enfants dans des structures qui ne sont absolument pas adaptées", a-t-il martelé. Il a déploré une inertie des pouvoirs publics, en particuliers des départements qui gèrent l'aide sociale à l'enfance.

"Les élus doivent faire preuve de beaucoup plus de responsabilité sur cette question et systématiquement, avant chaque décision prise, se poser la question de savoir s'ils l'accepteraient pour leurs propres enfants", déclare le militant qui sait de quoi il parle, puisque placé à l'aide sociale à l'enfance dès sa naissance. Il a lui-même été victime de violences sexuelles et de violences quand il était en foyers. "Tout est un parcours du combattant" pour ces jeunes, a-t-il résumé.

En 2022, le Parlement a voté la loi Taquet, du nom de l'ancien secrétaire d'État, Adrien Taquet, prévoyant l'interdiction au 1er février 2024 des placements de jeunes de l'Aide sociale à l'enfance (ASE) en hôtel, sauf "à titre exceptionnel pour répondre à des situations d'urgence ou assurer la mise à l'abri des mineurs" et ne devant pas excéder deux mois. Une loi qui n’est, pour l’heure, pas en vigueur, faute de décrets d’application.

"Lily, elle cochait toutes les cases de ce qui était interdit dès 2022", a fustigé Lyes Louffok. "Lily, elle avait quinze ans, Lily, elle avait fait une tentative de suicide avant même d'avoir été placée dans cet hôtel et on l'a quand même mise dans un hôtel", a-t-il regretté. Il déplore par ailleurs un défaut d'encadrement et de suivi. "Dans cette structure où Lily était placée, il y avait l'hôtelier, le veilleur de nuit et basta, ça s'arrête là, il n'y avait personne d'autre", a-t-il pointé.


Si vous avez besoin d'aide, si vous êtes inquiet ou si vous êtes confronté au suicide d'un membre de votre entourage, il existe des services d'écoute anonymes. La ligne Suicide écoute est joignable 24h/24 et 7j/7 au 01 45 39 40 00. D'autres informations sont également disponibles sur le site du ministère des Solidarités et de la Santé. 

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