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Tribune Rixes entre bandes rivales : "Face aux faits de violences entre jeunes, privilégions l’action sociale, l’éducation et la médiation !"

Professionnels de l’éducation et du social, acteurs de la justice des mineurs, représentants du monde associatif... Plus de 110 signataires publient une tribune mercredi sur franceinfo.fr dans laquelle ils apportent leur analyse et proposent des actions afin de tenter d'éviter de nouveaux "drames terribles".

Article rédigé par franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 16min
Les rixes entre bandes rivales se sont multipliées depuis le début d'année, notamment en Ile-de-France. Image d'illustration. (STEPHANIE BERLU / RADIO FRANCE)

Lundi 22 février, une jeune fille de 14 ans est morte poignardée à Saint-Chéron, en Essonne. Le lendemain, un adolescent de 13 ans a été mortellement touché au cou à Boussy-Saint-Antoine, dans le même département. Dimanche 28 février, trois jeunes ont été blessés, dont deux par arme blanche, dans la cité Charles Schmidt de Saint-Ouen, en Seine-Saint-Denis. Lundi 8 mars, deux adolescents de 14 et 16 ans ont été blessés aussi à l'arme blanche à Champigny-sur-Marne, dans le Val-de-Marne, et transportés en urgence absolue à l'hôpital...

Les rixes entre bandes rivales se sont multipliées depuis le début d'année. Face à ces phénomènes de violence entre jeunes, 115 signataires, citoyens, parents, professionnels de l’éducation et du social, acteurs de la justice des mineurs, enseignants, animateurs sociaux, médiateurs, représentants du monde associatif, publient mercredi 10 mars une tribune sur le site de franceinfo, appelant "à réfléchir ensemble aux solutions pour prévenir leurs renouvellements et tenter d’éviter des drames terribles".

Dans ce texte, ils pointent notamment "l’absence de dialogue avec la jeunesse et une prévention spécialisée absente ou en recul dans beaucoup de territoires de notre pays". Ils dénoncent un manque de moyens et des "politiques sécuritaires renforçant les mesures pénales et leur mise en œuvre, au détriment d’un travail de fond, en amont".

"Nous ne pouvons pas rester sans réagir et nous pouvons apporter nos analyses et propositions de solutions", expliquent les signataires, qui ont aussi lancé une pétition sur le site change.org, alors que le Premier ministre Jean Castex doit présider une réunion interministérielle vendredi sur le phénomène des affrontements entre bandes.



Face aux faits de violences entre jeunes, privilégions l’action sociale, l’éducation et la médiation !

Les rixes qui ont eu lieu ces dernières semaines nous choquent, nous attristent, car elles provoquent la mort d'adolescent.e.s, créent des situations de douleurs et de souffrances chez les jeunes, au sein de leurs familles, et dans leurs entourages. Passé le temps de la sidération, de l’incompréhension et de la colère, il nous faut réfléchir ensemble aux solutions pour prévenir leurs renouvellements et tenter d’éviter des drames terribles.

Car en tant que citoyens, parents, professionnels de l’éducation et du social, acteurs de la justice des mineurs, enseignants, animateurs sociaux, médiateurs, représentants du monde associatif, nous tenons à rappeler que l’on parle d’enfants et jeunes adultes pour qui notre société à un devoir d’éducation et de protection. 

"Nous ne pouvons pas rester sans réagir et nous pouvons apporter nos analyses et propositions de solutions."

Les signataires

Premier constat, le phénomène des bandes existe depuis toujours ; même s’il ne constitue pas le quotidien de la justice des mineur.e.s et que des désaccords font jour entre ministère de la Justice et ministère de l’Intérieur sur son importance et notamment sur son augmentation. Depuis quelques années, il prend une forme nouvelle par le canal des réseaux sociaux et une importance plus grande du fait de sa médiatisation.

"Des jeunes en souffrance"

Les regroupements violents des adolescent.e.s et jeunes majeur.e.s viennent signifier aux adultes et aux institutions leurs difficultés à vivre dans certains de nos quartiers et de nos villes. Loin des propos hâtifs, sécuritaires et des "brèves de comptoir", échangés largement par des chroniqueurs et des politiques dans certains médias, nous disons que la plupart de ces jeunes, parfois en situation de délinquance, parfois violents, sont avant tout des jeunes en souffrance, en difficultés sociales, scolaires, personnelles.

"Les réponses simplistes seront une fois de plus insuffisantes à régler un problème de fond et n’apporteront que quelques satisfactions médiatiques à des citoyens inquiets."

Les signataires

Les trois rixes qui ont eu lieu dans le département de l’Essonne et Seine-Saint-Denis ces derniers jours, occasionnant décès et blessures graves, questionnent plus largement sur l’existence, l’insuffisance voire l’absence de moyens pour les services publics d’éducation et de protection de l’enfance, de prévention spécialisée et de médiation.

"Des réactions violentes désastreuses"

Comme ont pu le rappeler des médiateurs intervenant dans les quartiers, pour les jeunes, se regrouper en bande "c’est une façon de se protéger", face à un monde dangereux parfois relégué, où la confrontation sociale avec les pairs peut rapidement survenir, entraînant des réactions violentes désastreuses et dramatiques, souvent regrettées quelques instants après, mais hélas trop tard…

"Pourquoi de telles situations ? Un double constat : l’absence de dialogue avec la jeunesse et une prévention spécialisée absente ou en recul dans beaucoup de territoires de notre pays."

Les signataires

Aujourd’hui, dans beaucoup de quartiers, les jeunes peuvent être livrés à eux-mêmes. La plupart des services publics sont menacés et fonctionnent avec des moyens ne leurs permettant pas d’offrir un service de qualité à la population avec des horaires adaptés pour tous les âges, notamment les jeunes. Quant à la prévention spécialisée, celle-ci fait cruellement défaut sur certains territoires, ne disposant pas des moyens suffisants pour mettre en place des actions d'envergure à la hauteur des besoins et des enjeux.

Une action associative "de plus en plus fragile"

Le monde associatif est présent, de plus en plus investi, porteur d’idées novatrices. Mais si son intervention repose sur des bonnes volontés incontestables et une énergie notable de ses membres, elle ne saurait combler le vide, trop souvent constaté, laissé par la disparition des services publics. Le manque de locaux pour l’accueil des publics jeunes et la baisse des subventions vers ces associations rendent leur action de plus en plus fragile.

Ennui, désœuvrement, frustration, phénomènes d’errance : certains jeunes se créent des espaces qu’ils et elles investissent avec parfois des conséquences sociales et judiciaires qu’ils ne mesurent pas.

Face à une telle situation, il est plus qu’urgent de rompre avec les politiques sociales, éducatives, économiques en vigueur depuis ces trente dernières années. Cela passe par un réinvestissement public des espaces, notamment dans les territoires urbains et ruraux touchés par la désertification des services publics !

Des solutions par l'éducation, la prévention, la médiation

Pour cela, nous proposons que soient mis en débat et en action les propositions suivantes :

- mise en place d’une éducation à la non-violence en direction des enfants et des adultes avec l'ensemble des acteurs de l'éducation et de la protection de l'enfance, dans laquelle l'Éducation nationale devra avoir un rôle, majeur, à jouer ;

- renforcement des services de la prévention et de la protection de l’enfance ;

- renforcement de la place et du rôle des familles, loin des paroles et mesures stigmatisantes ;

- création de postes supplémentaires de médiateurs sociaux, bien formés, disponibles sur l’espace public et à des horaires adaptés ;

- soutien des associations locales en terme de moyens au regard de leur rôle essentiel et complémentaire dans les solidarités et la prévention quotidienne;

- développement d’une politique de soins à l’adresse de certains jeunes en grande souffrance psychologique notamment par la mise en place de services de pédopsychiatrie et de CMP en nombre suffisant et accessibles, permettant de détecter les difficultés le plus tôt possible, si besoin en lien avec les écoles et les associations, pour les prévenir le plus en amont ;

- accroissement de la place des adultes auprès des jeunes en établissant une politique où chacun peut par son action participer à la co-éducation, ceci afin d’intervenir avant qu’il ne soit trop tard.

Ces mesures ou axes de réflexion ne peuvent avoir de sens que si l’on remet de manière substantielle les moyens vers l’éducation, la prévention spécialisée, la médiation et l’ensemble des services publics, notamment dans les départements les plus pauvres et sous dotés budgétairement.

"Ces jeunes ont avant tout besoin d'être écouté.e.s, valorisé.e.s, accompagné.e.s, de percevoir qu'un avenir est possible pour elles et eux dans la société, et ceci grâce à un étayage par des adultes rassurants et repérés."

Les signataires

Depuis trop longtemps, les politiques libérales ont déconstruit l’état social au profit de politiques sécuritaires renforçant les mesures pénales et leur mise en œuvre, au détriment d’un travail de fond, en amont. Aujourd’hui, il faut faire le choix de la prévention et de l’éducation.

La liste des signataires :

Françoise Dumont, présidente d'honneur de la Ligue des Droits de l'Homme
Katia Dubreuil, présidente du Syndicat de la magistrature
Estellia Araez, présidente du Syndicat des avocats de France (SAF)
Sonia Ollivier, co-secretaire nationale du Syndicat national des personnels de l’education et du social à la protection judiciaire de la jeunesse (SNPES-PJJ-FSU)
Benoît Teste, secrétaire général de la FSU
Malik Salemkour, président de la Ligue des Droits de l'Homme
Marwan Mohammed, sociologue
Laurence De Cock, historienne, membre de la LDH
Rodrigo Arenas, co-président de la FCPE
Brice Castel, co-secrétaire général SNUASFP FSU
Carlos Lopez, éducateur à la PJJ, ancien co-secrétaire national du SNPES-PJJ-FSU
Yazid Kherfi, association Médiation nomade.
Carole Sulli, avocate, commission mineurs du SAF
Lakdar Kherfi, militant associatif
Laurence Roques, présidente de la Commission Libertés et Droits de l'Homme du CNB
Nathalie Andrieux Hennequin, co-secretaire générale SNUASFP FSU
Sophie Legrand, secrétaire générale du Syndicat de la magistrature, juge des enfants
Meriem Ghenim, avocate au barreau de la Seine-Saint-Denis
Hélène Puertolas, co-Secrétaire générale SNUTER-FSU
Pascal Filleul, secrétaire départemental Inter 87-FSU
Nadir Kahia, président de Banlieue +
Belabbas Mehdy, militant associatif, éducateur PJJ
Nathalie James, co-secrétaire nationale SNPES-PJJ/FSU
Carla Dugault, co-présidente de la FCPE
Simon Duteil, co-délégué général Union syndicale Solidaires
Murielle Guilbert, co-déléguée générale Union syndicale Solidaires
Herve Hamon, magistrat honoraire, ancien président du tribunal pour enfants de Paris, membre de l'AFMJF
Anne Leclerc, éducatrice retraitée,
ancienne secrétaire générale du SNPES-PJJ/FSU
Christophe Caron, éducateur PJJ, co-secrétaire national SNPES-PJJ/FSU.
Élisabeth Audouard, avocat
Claire Grover, présidente et bénévole de l'Association Bagagérue
Benoît Hubert, secrétaire général du SNEP-FSU
Pierre Lecorcher, secrétaire général adjoint CGT PJJ
Aurélie Trouvé, porte-parole d'ATTAC
Raphael Pradeau, porte-parole d'ATTAC
Alexandra Meynard, dirigeante confédérale en charge du service public
Yannick Apy, chargé de mission formation professionnelle
Philippe Piau, comédien, metteur en scène, membre du réseau des Dialogues en humanité
Fanny Salane, enseignante-chercheuse en sciences de l'éducation, Université Paris Nanterre
Christian Delorme, prêtre du diocèse de Lyon, ancien membre du Haut Conseil à l'Intégration, co-initiateur de la Marche pour l'égalité et contre le racisme de 1983
Malek Boukerchi, anthropologue du lien social, philoconteur, ultramarathonien de l'extrême
Pierre Ravinet, responsable associatif
Jean-Jacques Yvorel, éducateur, historien, chercheur associé au CESDIP.
Esther Tonna, membre de la CE de l'UFAS CGT
Sophie Herlin, membre de la CE de la Fédération des Services Publics CGT
Céline Verzeletti, responsable confédérale CGT
Christophe Daadouch, formateur
Christine Cayre
Marc Brzegowy, directeur honoraire Protection Judiciaire de la Jeunesse
Nicolas Beriot, citoyen
Jeanne Demoulin, maîtresse de conférences en sciences de l'éducation, université Paris Nanterre
Éric Roulot, maire (PCF) de Limay.
Xavier Beaudoin, formateur spécialiste en pédagogies créatives, praticien-chercheur en économie circulaire, optimisation et mutualisation des usages.
France Doerler
Muriel Scibilia
Bertrand Baudez, facilitateur de relations humaines - Médiateur
Myriam Correcher, enseignante, visiteuse de prison (Fresnes)
Aïcha Naceh, directrice adjointe de centre de loisirs, travailleur social.
Murielle Maffessoli, directrice pour l'association Observatoire Régional de l'Intégration et de la Ville (ORIV)
Stéphane Danancier
Pavo, dessinateur de presse.
Pascal Marcault
Anne de Béthencourt, fondatrice de Reset the World, directrice du développement de la Heart Leadership University
François Besse, ancien détenu
Olivier Brito, maître de conférences en sciences de l'éducation, Université Paris Nanterre
Lucille Rouet, secrétaire nationale du syndicat de la magistrature, juge des enfants
Kristel Lepeu, avocate
Florence Chopin, avocat
Céline Azema, vice-présidente du tribunal pour enfants de Toulouse
Anaïs Vrain, juge des enfants
Josiane Morel Faury, avocat
Michèle Zemor, professeur retraitée, ex-conseillère région Île-de-France, vice-présidente de l'association Plaine Commune, adjointe au maire de Saint-Denis
Juliette Beigelman, ancienne éducatrice PJJ, élève-avocate
Valerie Perret, avocate
Dominique Attias, avocate d'enfants, ancienne vice-bâtonnière du Barreau de Paris
Hervé Heurtebize, éducateur spécialisé, secrétaire national SNUTER-FSU
Catherine Delanoë Daoud, avocate, membre de l'Antenne des mineurs
Gaelle Chollet, assistante de service social SNUTER18-FSU
Rachida El Hajoui, adjointe au maire de la ville de Limay (jeunesse, insertion professionnelle et emploi)
Sandrine Fornara, conseillère en formation continue, GIP Formation tout au long de la Vie (Nancy) en charge de la professionnalisation des médiateurs sociaux en contrat adultes-relais du Grand-Est
Sébastien Carpentier, juge des enfants au tribunal judiciaire de Nanterre
Julie Maire,
Isabelle Roth, avocat au Barreau de PARIS
Johanne Sfaoui, avocate au Barreau de PARIS
Thierry Brigodiot, chef d'une petite entreprise
Dominique Gregori Gilbert,
Delphine Colin, secrétaire nationale UFSE CGT
Marie Buisson, secrétaire générale FERC CGT
Sophie Leonard, psychologue/musicothérapeute
Jacques Lecomte, docteur en psychologie, président d'honneur de l'Association française de psychologie positive, membre du mouvement convivialiste et du comité scientifique de la Fondation Nicolas Hulot.
Odile Barral, juge des enfants
Éric Roulot, maire de Limay
Samia Chiki, journaliste et militante associative
Nawel Oumer, avocate et médiatrice, antenne des mineurs du barreau de Paris
Judith Zaoui, avocat
Nancy Bragard, facilitatrice
Annie Lahmer, conseillère Régionale Ile de France
Samir Allel, sociologue
Béchir Saket Bouderbala, consultant en affaires publiques, porte-parole de L630
Pierre Serne, conseiller régional écologiste d'Ile-de-France, conseiller municipal de Montreuil (93)
Nour Durand-Raucher, 
conseiller de Paris délégué à la prévention, médiation, sûreté dans le 11e.
Jérome Casteran, co-secrétaire national du SNPES PJJ FSU
Jean-François Monino, président d’Aubermédiation, maire adjoint honoraire d’Aubervilliers
Khaled Benmohamed, 
adjoint au Maire de Vitry-sur-Seine
Jean Marc Soubeste, 
conseiller municipal et communautaire. La Rochelle
Vanina Padovani, 
avocate
Gérard Gilbert,
retraité
Paul Devin,
président de l'Institut de recherches de la FSU, secrétaire général du SNPI-FSU
Clémentine Autain, députée (La France insoumise) de Seine-Saint-Denis
Elsa Faucillon, députée (PCF) des Hauts-de-Seine
Rabah Bouchaib,
Éliane Assassi, sénatrice (PCF) de la Seine-Saint-Denis
Vito Fortunato, Co-secrétaire national du SNPES-PJJ/FSI
Nabila Keramane, cadre EELV, ex-consillère régionale 78

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