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Féminicide en Gironde : "Il y a un manque de moyens matériels et humains", dénonce une avocate

"On aurait dû mettre en place des mesures de protection", avec notamment "un bracelet anti-rapprochement" a regretté sur franceinfo samedi Khadija Azougach, secrétaire générale de l'association Lawyers for Women. Une femme a été tuée la veille à son domicile par son ex-conjoint, contre qui elle avait porté plainte.
Article rédigé par franceinfo
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"On aurait dû mettre en place des mesures de protection", avec notamment "un bracelet anti-rapprochement" a regretté sur franceinfo Khadija Azougach (image d'illustration). (VANESSA MEYER / L'ALSACE)

"Il y a un manque de moyens matériels et humains", a dénoncé samedi 4 mars sur franceinfo Khadija Azougach, secrétaire générale de l'association Lawyers for Women alors qu'une femme a été tuée par son ex-conjoint vendredi en Gironde. Selon les informations de franceinfo, la victime avait porté plainte à deux reprises en février. 

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L’homme, qui depuis s’est donné la mort, avait été condamné par le passé à 20 ans de réclusion pour tentative d’assassinat sur une autre femme. Il est sorti de prison avec 8 ans d'avance : "On aurait dû mettre en place des mesures de protection", notamment "un bracelet anti-rapprochement, a expliqué Khadija Azougach sur franceinfo. On a aujourd'hui simplement 2 000 téléphones "grave danger" alors qu'il y a plus de 200 000 victimes chaque année", a-t-elle regretté.

franceinfo : Comment peut-on expliquer ce drame ?

Khadija Azougach : Cette jeune femme avait déposé plainte. On a donc deux plaintes. Lorsqu'on dépose plainte, le parquet doit être immédiatement avisé. Une plainte doit être remontée au procureur de permanence, qui doit prendre des mesures en fonction de l'urgence. Il y a une grille d'évaluation des dangers qui est mise en place depuis 2019. Dès qu'on parle de violences, on doit systématiquement mettre en œuvre tout un dispositif et malheureusement, il semblerait que ce ne soit pas le cas.

C'est un manque de moyens qui ralentit les procédures ?

Il y a un manque de moyens matériels et humains. On ne met pas assez en œuvre les téléphones "grave danger" et les bracelets anti-rapprochement. On a aujourd'hui simplement 2 000 téléphones "grave danger" alors qu'il y a plus de 200 000 victimes de violences faites aux femmes chaque année. On est très loin du compte. On est très loin des mesures annoncées. Il y a très peu de policiers formés, il y a un turnover, et très peu de procureurs spécialisés. Ils sont encombrés. Ils gèrent les différentes urgences et les violences sont bien souvent au second plan par rapport à de grosses affaires de stupéfiants par exemple.

L'homme est sorti de prison sans suivi particulier. Comment l'expliquez-vous ?

En 2017, il y avait moins cette sensibilisation sur les violences faites aux femmes. Mais en principe dès que la victime a déposé plainte, dès lors qu'il avait ce passif, ces antécédents, on aurait dû mettre en place des mesures de protection, un bracelet anti-rapprochement, c'est-à-dire que l'on puisse le géolocaliser et éviter ainsi ce drame. On aurait pu également mettre en place un suivi psychologique. Il fait défaut dans ce type de dossier. Un suivi psychologique est essentiel. Il permet de travailler sur les causes de ces violences.

La prison n'est pas la seule réponse pour lutter contre les violences faites aux femmes ?

Ça pose la question de l'accompagnement des auteurs de violences faites aux femmes. Ce n'est pas simplement de la prison. C'est aussi tout un travail sur les causes de ces violences. Elles sont essentiellement liées au sexisme. Et dès le plus jeune âge, on doit travailler sur le sexisme, notamment avec la mise en place effective de cette loi de 2001 par des cours d'éducation à la sexualité et sur le sexisme dans  les établissements scolaires. Aujourd'hui, ça fait encore défaut. Le Haut Conseil à l'égalité a relevé que notre société était malheureusement aujourd'hui de plus en plus sexiste. Ça touche de jeunes gens et c'est pour cela qu'on assiste à des violences entre de jeunes couples. Ce n'est pas l'avenir qu'on souhaite pour notre société.

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