En annonçant une nouvelle loi immigration pour 2025, le gouvernement tente-t-il d'allumer "un contre-feu" ?

Moins d'un an après le texte précédent, censuré en partie par le Conseil Constitutionnel, le gouvernement planche donc sur une nouvelle loi immigration... et prend le risque de souffler sur des braises encore rouges.
Article rédigé par franceinfo
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Le Premier ministre Michel Barnier et le Ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, le 2 octobre 2024. (THOMAS SAMSON / AFP)

Parler immigration quand il faut faire passer un budget impopulaire ? "Pas impossible que ce soit un contre-feu", sourit un conseiller gouvernemental. Maud Bregeon, porte-parole du gouvernement, a annoncé dimanche 13 octobre une "nouvelle loi" sur l’immigration début 2025, la 33e depuis 1980. Cette annonce intervient un an après la promulgation de la précédente loi immigration en janvier 2024 qui avait enflammé le Parlement.

L’objectif de ce nouveau texte est de "faciliter la prolongation de détention des étrangers en situation irrégulière qui présentent des profils dangereux dans les centres de rétention administrative", a expliqué Maud Bregeon dimanche sur BFMTV. Bruno Retailleau souhaite ainsi passer de 90 jours maximum à 210 jours maximum.

"Tout le monde veut marquer son territoire"

En coulisses, alors qu'on pensait que l’actualité politique de la semaine était le début du débat budgétaire qui prévoit quelque 60 milliards d'euros d'économies, prévu mercredi 16 octobre en commission à l’Assemblée, le gouvernement embraye donc sur un autre sujet. Avec ce texte sur l'immigration, moins d'un an après le texte précédent, censuré en partie par le Conseil Constitutionnel, le gouvernement prend donc le risque de souffler sur des braises encore rouges, non sans arrière-pensée.

Car, à l’heure où le Rassemblement National n’exclut pas une censure, "la menace est réelle, c’est un moyen d’y échapper", assure un conseiller gouvernemental de premier plan, pour qui, avec une telle promesse de fermeté, "le RN ne pourra pas prendre le risque d'envoyer Olivier Faure ou Jérôme Guedj à Matignon".

Revers de la médaille : voir les Macronistes se cabrer. Historiquement, l'immigration est un sujet très douloureux pour l'ex-majorité présidentielle : "Les plus à cran, comme Sacha Houlié sont déjà sortis de la coalition", se rassure une petite main. "Tout le monde veut marquer son territoire", relativise un soutien du nouveau ministre de l'Intérieur, y voyant plutôt une aubaine pour un Bruno Retailleau - "fidèle à ses convictions", glisse un sénateur - en passe de s'imposer comme le leader du gouvernement.

"L'avenir de Barnier dépend des résultats en matière de sécurité et d'immigration"

Mais alors, à quoi va ressembler ce nouveau texte ? Du côté de la place Beauvau, on assure par ailleurs que les mesures écartées par le Conseil constitutionnel vont servir de "base". Il s'agit d'un cocktail de mesures, votées fin 2023, par ce qui n'était pas encore l'alliance des Macronistes et des Républicains, mais finalement censurées par les Sages. Sur la table, on retrouve notamment la création d’un délit de séjour illégal, poussée par la droite sénatoriale et son chef de file de l'époque, un certain... Bruno Retailleau.

Également à l'étude : le vieux serpent de mer de la transformation de l’aide médicale d’Etat en aide médicale d’urgence, la suppression de la circulaire Valls et ses quelque 30 000 régularisations par an sur des critères précis de travail et vie de famille, ou encore l’allongement de la détention en centre de rétention 90 jours maximum aujourd’hui - jusqu’à 210 dans l’idée du gouvernement. "Matignon est persuadé que l'avenir de Barnier dépend des résultats en matière de sécurité et d'immigration", conclut un conseiller. Il y a moins d'un an, après le vote, le RN avait revendiqué une "victoire idéologique".

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