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Information judiciaire pour homicide involontaire contre une infirmière

Une information judiciaire a été ouverte pour "homicide involontaire" à l'encontre d'une infirmière de l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul, à Paris, après la mort d'un enfant de trois ans mercredi. Elle se serait trompé de perfusion. Sa garde à vue a provoqué une levée de boucliers dans le monde médical. Et les conditions de travail à l'hôpital sont à nouveau mises en cause.
Article rédigé par franceinfo
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La prolongation de la garde à vue de l'infirmière impliquée dans la mort d'Ilyès, 3 ans, ouvrait le chemin à l'ouverture d'une information judiciaire. C'est chose faite. Le motif retenu contre cette infirmière de 35 ans est l'“homicide involontaire”.

Son placement en garde à vue dès mercredi soir constituait une “ procédure normale en ces circonstances”, selon la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot. Pour elle, cette professionnelle reconnue au sein de son établissement, a “reconnu sa faute”. Elle s'en est d'ailleurs ouverte à son chef de service dès la découverte de cette funeste erreur. Elle aurait administré à l'enfant du chlorure de magnésium au lieu d'un sérum glucosé.

La jeune femme a été conduite au pôle santé publique du TGI de Paris en vue de son éventuelle mise en examen. Le parquet a également requis son placement sous contrôle judiciaire, donc pas de détention, ainsi que l'interdiction pour elle de se rendre à l'hôpital Saint-Vincent-de-Paul, où elle exerce, et d'entrer en contact avec ses collègues.

Personnel en panique

Hier soir, le père du garçonnet de trois ans, admis pour une angine, s'est exprimé dans plusieurs médias, mettant en accusation le personnel de l'hôpital : “il n'y avait personne. (...) J'ai fait le tour, il n'y avait pas un seul infirmier. Et quand les infirmiers sont venus, ils ont dit: 'Arrêtez de vous affoler, monsieur, votre fils, il n'a rien'”. Il affirme aussi avoir pratiqué lui-même des massages cardiaques, tandis que le personnel était pris de panique.

Mais les syndicats estiment que la procédure est “disproportionnée”, car “ l'erreur n'est pas intentionnelle ”, plaide le médecin urgentiste Christophe Prudhomme, de la CGT-Santé et de l'Amuf (Association des médecins urgentistes de France).

“Quand il y a une erreur, il faut la reconnaître, même si elle est dramatique”, admet Christophe Prudhomme. Mais il dénonce une procédure qui se concentre sur les “lampistes”. Pour lui, ce sont les conditions de travail à l'hôpital, et donc la politique de santé publique qu'il faut revoir : “du fait de la tension qui existe dans les hôpitaux, liée notamment au manque d'effectifs et à la dégradation des conditions de travail, on peut prévoir que ce type d'accident, qui devrait rester exceptionnel, risque de se multiplier ”, prévient-il.

Côté politiques, c'est l'unanimité. Du PCF à l'UMP, tout l'échiquier politique s'étonne de la mise en garde à vue d'une infirmière.

Mise en cause des seuls “lampistes”

Le syndicat Sud, second syndicat des hôpitaux de Paris dénonce aussi le sous-effectif et les rythmes de travail, générateurs d'erreurs. La mise en garde vue de l'infirmière risque, estime la centrale, “d'aboutir au quotidien
à faire taire les erreurs, de peur d'être mis en cause ”.“ S'il doit y avoir des mises en examen, ce serait plutôt du côté de ceux qui nous demandent de toujours faire plus avec moins ”, ajoute Sud dans un communiqué.

Et c'est l'urgentiste Patrick Pelloux, président de l'Amuf, qui précise, en demandant la démission de la ministre Roselyne Bachelot. Son syndicat avait justement lancé une grève début décembre pour dénoncer le manque de moyen qui risquait de “mettre en danger la sécurité des patients”. Entre l'affaire de Grenoble (le directeur d'un hôpital psychiatrique a été limogé après qu'un de ses patients se soit échappé et ait poignardé un jeune homme), celle de Valence (un médecin avait été accusé d'avoir tué une vieille dame) et la mort du petit garçon de Saint-Vincent-de-Paul, “ c'est les lampistes à chaque fois qu'on met en avant (...) Je crois que Roselyne Bachelot doit démissionner”, tranche-t-il.

Le Parquet de Paris précise toutefois que l'enquête judiciaire n'en est qu'à ses débuts, et que d'autres personnes seront sans doute entendues.

Grégoire Lecalot, avec agences

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