IVG dans la Constitution : où en est-on ailleurs dans le monde ?

En réunissant le Congrès pour un vote historique lundi 4 mars, la France devient le premier pays du monde à intégrer le droit l'avortement dans sa Constitution. À l'inverse, plusieurs pays ont reculé sur la question ces dernières années, quand une vingtaine d'autres ne l'autorisent tout simplement pas.
Article rédigé par Valentin Houinato
Radio France
Publié
Temps de lecture : 3 min
Jill Biden, la femme du président des États-Unis, en meeting en janvier 2024 pour défendre le retour l'arrêt Roe vs. Wade (renversé en 2022) qui garantissait la protection du droit des femmes à avorter. (SAUL LOEB / AFP)

La liberté d'avorter "reste en danger" : devant le Congrès, le Premier ministre Gabriel Attal avait mis en garde, avant un vote historique. Les 925 parlementaires réunis à Versailles lundi 4 mars ont fait entrer l'IVG dans la Constitution française, en adoptant le texte validé par l'Assemblée et le Sénat. La France devient le premier pays dans le monde à protéger ce droit en l'inscrivant dans son texte fondateur, au contraire de plusieurs pays qui ont réduit voire interdit son accès ces dernières années.

Un droit à géométrie variable

Selon le Center for Reproductive Rights, une association américaine de défense de l'avortement, 88% des femmes vivent dans un pays qui autorise l'avortement. Les critères d'accès varient : une majorité de pays - comme la France - optent pour un délai légal durant lequel la femme peut avorter (12 semaines dans la plupart des cas, quatorze en France). Certains établissent des critères économiques et sociaux plus ou moins larges pour autoriser les femmes à y recourir (Grande-Bretagne, Inde). Une grande partie des pays d'Afrique et d'Amérique du Sud ont, eux, des critères plus stricts : 47 pays l'autorisent uniquement pour des raisons de santé (Algérie, Pérou, Pakistan, Pologne…) ; 44 quand la vie de la femme enceinte est en danger (condition la plus restrictive).

Une pratique parfois compliquée

Même si les critères semblent permissifs, l'accès à l'IVG peut rester compliqué en pratique dans certains pays. En Italie, l’IVG est en théorie autorisée jusqu’à 12 semaines de grossesse, mais reste peu accessible à cause de l’objection de conscience qui permet aux médecins de refuser de réaliser un acte.

Selon les derniers chiffres du ministère de la Santé, sept gynécologues italiens sur dix refusaient, en 2019, de pratiquer un avortement et seulement 59,6% des hôpitaux du pays le proposaient. Résultat : le nombre d'avortements a chuté en quarante ans passant de 230 000 en 1983 (année record) à 64 000 en 2021. Le pays traverse pourtant un hiver démographique, il n’y a donc pas un désir d’enfant beaucoup plus fort aujourd’hui qu'il y a quarante ans.

Le recul de plusieurs pays sur l'avortement

Le 24 juin 2022, la Cour suprême américaine est revenue sur la jurisprudence "Roe vs Wade" : un arrêt qui, depuis près d'un demi-siècle, garantissait le droit des Américaines à avorter. Une volte-face historique qui a permis à plusieurs États (Texas, Alabama, Wisconsin) d'interdire à nouveau l'avortement.

En Pologne, le tribunal constitutionnel a également changé sa juridiction en 2020 et rendu l’IVG quasi illégale, même en cas de malformation du fœtus. Ce critère concernait pourtant la quasi-totalité des 1 000 avortements légaux pratiqués chaque année dans le pays. La Hongrie, à l'initiative du gouvernement Orban a, elle, adopté un décret en 2022, obligeant les femmes enceintes à écouter le rythme cardiaque du fœtus, avant d'avorter.

Un droit encore interdit dans plusieurs pays

Une vingtaine de pays dans le monde n'autorisent pas l'avortement. Ce sont majoritairement des pays d'Afrique (Égypte, Sénégal, Togo, Madagascar, Mauritanie) et d'Amérique du Sud (Suriname, Nicaragua, Salvador). Les poursuites y sont généralement engagées pour "homicides aggravés", passibles d’une peine pouvant aller jusqu’à 50 ans de prison. En Europe, à Malte, les femmes qui avortent risquent une peine allant de 18 mois à 3 ans de prison. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), entre 39 000 et 47 000 femmes décèdent chaque année des suites d’une IVG non médicalisée.

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