Jugé responsable de l'intoxication d'un agriculteur, Monsanto fait appel
Un représentant du géant américain des pesticides l'a affirmé mardi, confirmant ce que le groupe laissait présager aussitôt après l'annonce de la décision du tribunal de grande instance de Lyon.
La bataille juridique n'est pas finie entre Monsanto et Paul François, un céréalier de Bernac (Charente). Jugé responsable, lundi 13 février, de l'intoxication de l'agriculteur exposé à son désherbant, le Lasso, le leader mondial de l'agrochimie annonce mardi qu'il va faire appel de la décision de justice. "Nous sommes déçus par la décision du tribunal", a dit sur France info Yann Fichet, directeur des relations institutionnelles de Monsanto France. Il estime que les produits pesticides ne sont pas "anodins" mais souligne que les utilisateurs en sont informés par l'étiquetage et juge que la preuve n'a pas été apportée de la culpabilité du Lasso. Le procès en appel se déroulera dans un délai de plusieurs mois à un an.
La décision du tribunal de grande instance de Lyon est une première en France et elle pourrait faire du bruit. Elle ouvre la voie à des dommages-intérêts dont le montant sera fixé à la suite d'une expertise ordonnée par le tribunal sur les préjudices subis par la victime.
Paul François été exposé en 2004 au Lasso, un puissant désherbant produit par Monsanto et interdit en France depuis cinq ans. Le céréalier avait assigné le groupe en justice après la reconnaissance de ses problèmes de santé comme maladie professionnelle.
Invalide à 50%
Il y a huit ans, l'agriculteur, aujourd'hui âgé de 47 ans, inhale des vapeurs du désherbant en ouvrant la cuve d'un pulvérisateur. Il est rapidement pris de nausées et d'évanouissements, puis d'une multitude de troubles l'obligeant à interrompre son activité pendant près d'un an : bégaiements, vertiges, maux de tête, troubles musculaires. Paul François est désormais invalide à 50%.
En mai 2005, un an après qu'il a respiré les vapeurs, des analyses ont relevé dans son organisme des traces de monochlorobenzène. Ce solvant est présent dans le Lasso, au côté du principe actif, l'anachlore. En février 2007, l'agriculteur enclenche une procédure à l'encontre du géant de l'agrochimie.
Une audience en décembre
Une audience s'est tenue le 12 décembre 2011 à Lyon, près du siège du groupe américain en France, au bout de plusieurs années d'échanges d'arguments entre les deux parties.
L'avocat de Paul François, Me François Lafforgue, avait alors reproché à Monsanto d'avoir "tout fait pour laisser le Lasso sur le marché" alors que sa dangerosité avait été établie dès les années 1980. Selon lui, Monsanto aurait aussi manqué à son "obligation d'information" en ne détaillant pas la composition du produit sur l'étiquette, et en n'avertissant pas des risques liés à l'inhalation, ni de l'obligation de porter un masque.
Rappelant qu'il n'y avait eu "aucun témoin" de l'accident, la défense de Monsanto, Me Jean-Philippe Delsart, avait, lui, mis en doute la réalité de l'intoxication. Et souligné que les problèmes de santé n'étaient apparus que plusieurs mois après, alors que, selon lui, le monochlorobenzène est très vite évacué par l'organisme.
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