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Drame de Melun : le tireur se raconte dans un "livre-testament"

Jeudi matin, un avocat a tiré sur le bâtonnier de Melun dans le tribunal de grande instance avant de se suicider. Dans un "livre-testament" que Joseph Scipilliti a envoyé à certains de ses clients la veille, il évoque ses difficultés financières, son rejet de certains aspects de sa profession et ses conflits avec son bâtonnier.
Article rédigé par Olivier Boy
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (Des policiers dans le tribunal de grande instance de Melun, ce 29 octobre © MaxPPP)

Un avocat a ouvert le feu ce jeudi matin dans le tribunal de grande instance de Melun (Seine-et-Marne). Joseph  Scipilliti a tiré trois fois sur le bâtonnier et s'est ensuite suicidé. Le bâtonnier de 44 ans, blessé par balle, doit être opéré dans l'après-midi et se trouverait dans un "état critique". Un geste que l'avocat explique par des raisons professionnelles dans un "livre-testament" de 240 pages, envoyé à plusieurs de ses clients mercredi, notamment dans le milieu identitaire. 

Juste avant de tirer, Joseph Scipilliti a parlé au téléphone avec Christine Tasin. La présidente de Résistance républicaine, association sulfureuse anti-islam, dont Joseph Scipilliti était l'avocat et partageait les convictions, venait de recevoir le texte et s'inquiétait de ce qui pouvait se passer.

Christine Tasin, la dernière à avoir parlé à Joseph Scipilliti : "Le temps de se poser la question de ce qu'il fallait faire, il avait déjà tiré""

L'avocat raconte ses difficultés

Dans ce journal, l'avocat évoque sa carrière et certains apspects de sa vie personnelle. Il évoque d'abord des difficultés financières très importantes. Visiblement, il était acculé. Sur des dizaines de pages, on retrouve des photocopies ou copies d'articles sur des personnes s'étant suicidées suite à des problèmes d'argent. Les histoires personnelles d'agriculteurs, de plombiers, d'anonymes qu'il ne lie pas entre elles, qu'il n'explique pas mais auquel il semblait s'identifier.

Joseph Scipilliti décrit aussi longuement ses rapports avec le barreau de Melun, rapports très difficiles depuis des années. On retrouve traces de lettres échangées avec un précédent bâtonnier, en 2002, dans lesquelles il lui reproche de n'avoir rien fait quand on lui a piqué un client. En conflit ouvert, il parle aussi de méthodes douteuses de certains de ses confrères.

Une vraie haine exprimée contre le bâtonnier

Dans son document, il nomme le bâtonnier de 44 ans su lequel il a tiré de plusieurs façons : "V.", "H.V" ou par son nom de famille. L'avocat raconte que son supérieur, en exercice en 2008/2009 et 2014/2015, "est arrivé au bâtonnat avec la ferme intention de débarrasser le barreau de ma présence. Il l’a dit et répété, et tout ce qu’il fera désormais à mon égard n’aura que ce but" Joseph Scipilliti parle des multiples "avanies" qui lui auraient fait subir.

En octobre 2014, arrive la sanction disciplinaire : "Il estima avoir réuni assez d’éléments pour engager les poursuites disciplinaires qu’il fantasmait depuis longtemps." Joseph Scipilliti explique dans la foulée :* "Ils m’ont condamné à trois ans d’interdiction professionnelle. Et surtout, pour bien marquer qu’on ne défie pas un bâtonnier, ils ont ordonné l’affichage de la décision dans les locaux de l’Ordre des Avocats de Melun. C’est inouï."  * Des passages dans lesquels on comprend qu'il se sentait persécuté et qu'il pouvait être traité comme un paranoïaque. 

Mais surtout dans les premières pages du texte, à la fin de son introduction rédigée il y a deux jours, on lit la menace des actes commis ce jeudi :** "Me voilà donc sur le point de satisfaire ceux qui pour justifier leur domination ou leur soumission m’ont fait une réputation de cosaque. Pour une fois, je vais vraiment manquer de délicatesse. Melun le 27 octobre 2015". Et de conclure à la page 113 : "Mais je n’en ferai rien. J’ai été trop discrédité, trop piétiné. Maintenant je veux en finir".

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