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Justice : ce qu'il faut savoir sur l'augmentation de 1 000 euros du salaire des magistrats judiciaires

Éric Dupond-Moretti a annoncé ce lundi une revalorisation "inédite et considérable" de la rémunération de certains juges. Pourquoi maintenant ? Qui sera concerné ? Comment réagissent les syndicats ? On vous détaille les contours de la mesure. 

Article rédigé par franceinfo - Margaux Stive
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (XOSE BOUZAS / HANS LUCAS)

Le moment n'a pas été choisi au hasard. Alors qu'il ouvre cycle de discussions des États généraux de la justice, Éric Dupond-Moretti a promis, lundi 12 septembre, une augmentation de salaires aux magistrats. Une hausse de 1 000 euros bruts par mois pour les juges judiciaires.

Qui va en bénéficier ?

Seuls ceux qui travaillent dans les juridictions civiles et pénales bénéficieront de cette hausse de leur rémunération. Un peu plus de 9 300 magistrats dont le salaire n'avait pas bougé depuis 25 ans, selon le ministre de la Justice. Surtout, ils étaient payés en moyenne 20% de moins que les magistrats de l'ordre administratif. Ces derniers ont le statut de fonctionnaires et travaillent dans les tribunaux administratifs ou au conseil d'État par exemple. 

"C’est de l’ordre de 1 000 euros mensuels, en moyenne, brut. C’est considérable. J’ai souhaité faire cela pour mettre à niveau l’ordre judiciaire et l’ordre administratif. Il est normal que les magistrats soient mieux payés."

Éric Dupond-Moretti, ministre de la Justice

sur RMC-BFMTV

Quelle est la rémunération actuelle des magistrats ?

Avec cette revalorisation, mise en place à partir d'octobre 2023, Éric Dupond Moretti dit vouloir aligner les salaires de ces deux types de magistrats et mettre fin à des années "d'abandon" selon lui pour les magistrats de l'ordre judiciaire. L'idée est aussi de rendre plus attractif ce métier. Le ministère ambitionne en effet de recruter 1 500 magistrats d'ici la fin du quiquennat. Or actuellement un magistrat de l'ordre judiciaire tout juste sortie de l'école, gagne un peu moins de 2 000 euros bruts par mois. 

Cette annonce doit donc permettre, selon le ministère de la Justice, d'attirer les jeunes vers la magistrature. Éric Dupond-Moretti promet aussi une revalorisation pour les greffiers : 250 euros bruts par mois d'ici fin 2023. 

Quel est l'objectif politique ?

Ce geste financier s'inscrit aussi dans un contexte de colère inédite dans le monde de la magistrature. On se souvient de cette tribune signée par plus de 3 000 magistrats, soit un tiers de la profession, dans le journal Le Monde en décembre dernier. Ils dénonçaient leur souffrance au travail, des journées à rallonge et une justice maltraitante. Quelques mois plus tard, un rapport était remis à Emmanuel Macron dans le cadre des États généraux de la justice. Là aussi, les auteurs dénonçaient une justice en état de délabrement. 

Qu'en pensent les syndicats de la magistrature ?

Les principaux syndicats de magistrats se réjouissent de cette revalorisation, avec deux bémols. Pour le syndicat de la magistrature et l'union syndicale des magistrats, être mieux payé est positif mais le problème principal reste celui des conditions de travail et du nombre de magistrats qu'ils jugent insuffisant. Samra Lambert, secrétaire nationale du Syndicat de la magistrature, rappelle lundi sur franceinfo que "ce n'est pas vraiment comprendre le cœur du problème que de parler de hausse de salaire. Il n'y a pas de problème d'attractivité mais on souhaite des garanties."

"Aucun plan ne nous a été présenté sur ces recrutements massifs annoncés. Lorsque l'on parle de perte de sens de notre métier, de travailler mieux, de pouvoir écouter les gens au-delà de cinq minutes et de les juger de manière décente, on ne parle pas d'être mieux payés."

Samra Lambert, secrétaire nationale du Syndicat de la magistrature

à franceinfo

L'autre interrogation concerne le financement de ces salaires. Le ministère de la Justice se veut rassurant et rappelle que son budget a été augmenté de 8% en 2022 et de 44% au total depuis le début de la présidence d'Emmanuel Macron. "C'est une bonne chose mais maintenant il faut voir ce que l'on met dans ces 8%, déclare Samra Lambert. Si c'est encore la construction de places de prison, ce n'est pas sans poser de questions puisque l'on a vu les limites de ce fonctionnement. Il est important pour nous de repenser drastiquement ce que l'on attend de la justice en France."

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