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Le tireur était le "troisième homme" de l'affaire Rey-Maupin

PORTRAIT | L'homme arrêté ce mercredi soir à Bois-Colombes et suspecté d'être le tireur de BFMTV, Libération et la Société Générale, a pour nom Abdelhakim Dekhar. Il s'agit d'un homme connu des services de police car condamné à quatre ans de prison, à la fin des années 90, dans la retentissante affaire Rey-Maupin. Cette épopée sanglante avait fait cinq morts, dont trois policiers. 
Article rédigé par Lucas Roxo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
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Qui est Abdelhakim Dekhar ? Retrouvé dans un état comateux dans un parking souterrain de Bois-Colombes, ce mercredi soir, vers 19h, il est soupçonné d'être l'homme ayant ouvert le feu à BFMTV, Libération et la Société Générale en début de semaine.

Il ne s'agit pas d'un inconnu des services de police, puisqu'il avait été condamné dans les années 90 lors de la médiatique affaire dite "Rey-Maupin". 

L'affaire Rey-Maupin

Ce fait divers avait fait grand bruit, à l'époque. Il avait eu lieu en région parisienne, le 4 octobre 1994. Ce jour-là, en à peine quinze minutes, un jeune couple issu de l'ultra-gauche - Florence Rey et Audry Maupin - attaque les policiers de garde à la pré-fourrière de Pantin pour dérober leurs armes. Ils projettent de commettre un braquage.

C'est le début d'une équipée sauvage qui verra trois policiers et un chauffeur de taxi trouver la mort, ainsi qu'Audry Maupin. Une course-poursuite dans Paris à laquelle Abdelhakim Dekhar, surnommé "Toumi", ne participe pas. 

Le "troisième homme"

Que vient-il donc faire dans cette affaire ? Condamné en 1998, il avait été reconnu coupable "d'association de malfaiteurs ". A l'époque, il est ainsi accusé d'avoir acheté dans un grand magasin parisien le fusil à pompes utilisé par Florence Rey et Audrey Maupin.  

Par contre, il n'avait pas été reconnu coupable de "complicité de vol à main armée ". Certains estimaient pourtant, à l'époque, qu'il était le guetteur supposé de la pré-fourrière de Pantin. Condamné à quatre ans de prison, il avait été libéré après sa peine, soit juste à l'issue du procès.  

C'est Florence Rey, condamnée à 20 ans de prison, qui l'avait à l'époque désigné comme le "troisième homme ", selon un article de Libération de 1998. Un "vantard " capable de "parler de tout ", avait-elle affirmé, qui avait, selon elle, subjugué Audry Maupin et monté avec lui le hold-up de Pantin. 

Il se disait agent algérien infiltré dans la gauche radicale française

A l'époque, toute la défense d'Abdelhakim Dekhar avait été organisée autour d'une affirmation : celle qu'il n'avait "jamais approché Florence Rey et Audry Maupin ", et qu'il était victime d'un complot. Il se déclarait alors officier de la sécurité militaire algérienne, affirmant infiltrer des squats fréquentés par la gauche radicale, pour y débusquer d'éventuels intégristes. 

"On se demandait si il n'était pas mythomane" (journaliste de Libération)

Mais pour Patricia Tourancheau, journaliste à Libération, qui a suivi l'affaire à l'époque, "on se demandait si il n'était pas mythomane " : "il nous expliquait qu'il était à la fois agent dépêché par
le consulat d'Algérie en France, après il a évoqué travailler pour la DGSE, puis pour les RG, mais
 moi je n'y croyais pas, toutes les vérifications faites
ne collaient absolument pas
", explique-t-elle sur France Info.

Mais "e n y réfléchissant ce n'est pas étonnant qu'il ait pu
commmettre ce genre d'actes, parce qu'à l'époque il apparaissait déjà absolument étrange, très perturbé, très dissimulateur, tout le monde avait du
mal à le cerner
".

"Pour moi, il a été un mystère, il l'est encore, et encore plus aujourd'hui"" (son ancienne avocate)

Une version corroborée par ses anciens avocats. "Il disait qu'il était agent des services français ou algériens, il était très secret, ne se révélait pas ", explique Emmanuelle Hauser-Phélizon, son avocate dans les années 90. "Il a une grande part d'ombre, en quatre ans je n'ai jamais réussi à le cerner, jamais. Pour moi ça a été un mystère, ça l'est encore, encore plus aujourd'hui ", poursuit-elle.

Mais "c * tait quelqu'un de réfléchi, de calme, il ne m'était pas apparu comme mythomane, il n'était pas dans des délires* ", considère-t-elle pour sa part sur France Info, ajoutant ne plus avoir de nouvelles depuis 1998, date de sa sortie de prison, il était alors âgé de 33 ans. 

Selon la police, il n'a en effet "pas donné signe de vie " depuis. Son ADN "n'avait pas été prélevé " à la fin des années 90 car "il n'y avait pas de fichier des empreintes génétiques à cette époque ". Parti un moment à l'étranger -certains disent en Algérie, d'autres en Grande-Bretagne- il ne faisait semble-t-il pas l'objet d'une surveillance particulière. 

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