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Police: la géolocalisation bientôt autorisée, 15 jours seulement

Le 22 octobre dernier, la Cour de cassation avait affirmé que la géolocalisation dans le cadre d'enquêtes policières constituait une trop grande ingérence dans la vie privée. Après quelques semaines de flou juridique et l'indignation des syndicats de police à l'égard du ministère de la Justice, un projet de loi devrait prochainement passer en urgence devant le Conseil des ministres. Il prévoit le retour de la géolocalisation, mais seulement pendant 15 jours.
Article rédigé par Lucas Roxo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
  (Maxppp)

Tout commence le 22 octobre. Auparavant, lorsque des policiers voulaient surveiller des suspects dans le cadre d'une enquête, ils pouvaient le suivre à distance et en temps réel grâce à son téléphone portable. Mais le 22 octobre dernier, la chambre criminelle de la Cour de cassation prend deux arrêts qui obligent les enquêteurs à demander l'aval d'un juge avant d'avoir recours à cette méthode.

La raison est simple : cette pratique allait à l'encontre de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, en ce sens qu'elle constituait une "ingérence à la vie privée dont la gravité nécessite qu'elle soit exécutée sous le contrôle d'un juge ".

C'est quasiment tout le système d'enquête à la française qui est remis en cause, puisqu'en France, 90% des enquêtes sont menés par les procureurs, et non par des juges d'instruction, qui n'interviennent que lors d'affaires très complexes. 

Indignation des syndicats de police

Du côté de la police, on s'indigne d'une telle décision. Cinq syndicats de policiers et de magistrats se plaignent d'une "situation intenable " pour les enquêteurs de terrain, qui se disent en quasi chômage technique. Ils saisissent le président de la commission des Lois, Jean-Jacques Urvoas, expliquant "l'urgence de mettre en oeuvre une disposition législative ".

"Cette situation est intenable, y compris dans le court terme, pour la réussite des investigations contre le crime organisé et la lutte contre les atteintes aux intérêts fondamentaux de l'Etat ", écrivent-ils dans un communiqué.

Une "urgence" entendue aujourd'hui

Les syndicats de police ont donc été entendus, puisqu'un projet de loi encadrant l'utilisation de la géolocalisation a été présenté au Conseil d'Etat, et devrait passer en urgence devant le conseil des ministres, le 23 décembre.  

France Bleu 107.1 a pu mettre la main sur ce projet de loi en exclusivité. Deux points, en particulier, attirent l'attention : 

Le procureur pourra autoriser la pose d'une balise ou la géolocalisation d'un téléphone mais seulement pendant 15 jours; passé ce délai, le procureur devra demander l'autorisation à un juge des libertés et de la détention, qui devra renouveler cette autorisation tous les moisLa géolocalisation pourra seulement être utilisée pour des crimes ou délits passibles d'au moins trois ans de prison Mais on y lit également qu'en "cas d'urgence résultant d'un risque imminent de dépérissement des preuves ou d'un risque imminent d'atteinte grave aux personnes ou aux biens, les opérations prévues peuvent être mises en place par un officier de police judiciaire après accord préalable donné par tout moyen du procureur de la République ". 

L'objectif du texte est clair : encadrer ces pratiques grâce au contrôle d'un juge. La loi devrait être votée prochainement - en raison des municipales, la session parlementaire devrait s'interrompre fin février -, et la Cour européenne devrait rendre son avis par la suite.    

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