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Prothèses PIP : quatre procédures judiciaires pour un scandale

Outre le procès pour "tromperie aggravée", qui s'ouvre aujourd'hui, deux autres procédures pénales sont à l'instruction à Marseille, et une procédure civile est en cours à Toulon.

Article rédigé par Violaine Jaussent
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Philippe Courtois, avocat de 2 200 porteuses de prothèses mammaires PIP, et sa cliente Alexandra Blachère, présidente de la principale association de victimes des prothèses PIP, à Marseille (Bouches-du-Rhône), le 27 janvier 2012.  (GERARD JULIEN / AFP)

C'est le premier procès dans le scandale des prothèses mammaires PIP. Le dossier pour "tromperie aggravée" et "escroquerie" devant le tribunal correctionnel de Marseille (Bouches-du-Rhône) s'est ouvert mercredi 17 avril. En plus de ce procès, très attendu, deux autres procédures pénales sont à l'instruction dans cette affaire, une quatrième au civil. Francetv info les détaille.

1Le volet tromperie

Ce premier procès pénal a lieu à partir de mercredi, et jusqu'au 17 mai à Marseille. Cinq ex-dirigeants de Poly Implant Prothèse (PIP), la société varoise aujourd'hui liquidée, comparaîtront en correctionnelle pour "tromperie aggravée" et "escroquerie". Parmi eux, Jean-Claude Mas, le fondateur de l'entreprise de La Seyne-sur-Mer (Var) et inventeur du gel de silicone "maison" incriminé, et Claude Couty, l'ex-directeur général de PIP. Jean-Claude Mas encourt un an de prison pour "tromperie aggravée", "déjà effectué en partie" selon son avocat, et cinq ans pour "escroquerie". L'enquête des gendarmes est close depuis fin 2011.

Le parquet de Marseille a reçu 5 127 plaintes pour ce volet de l'affaire, dont 220 plaintes étrangères, notamment argentines et autrichiennes. Près de 200 avocats y participent. Hors normes, ce procès bénéficie d'une logistique d'exception. Il occupe un espace de 4 800 m2 au sein du Parc Chanot, spécialement aménagé à cette occasion. Au total, le budget s'élève à 800 000 euros pour la juridiction.

2Le volet sanitaire

Parallèlement, une information judiciaire contre X pour "blessures et homicides involontaires" a été ouverte en décembre 2011, après la mort d'une porteuse de prothèses PIP des suites d'un cancer, en 2010 dans le Gers. Dans ce volet, Jean-Claude Mas, Claude Couty, et trois cadres de la société PIP, sont mis en examen pour blessures. Ils ont le statut de témoin assisté pour homicide.

Le dossier est instruit par la juge Annaïck Le Goff. Dans le cadre de son instruction, elle a aussi entendu comme témoin un ancien cadre de Brenntag, l'un des principaux distributeurs de produits chimiques dans le monde, qui a fourni des huiles de silicone à PIP. Selon cet ex-cadre, le groupe allemand "a livré à PIP les moyens de la réalisation d'une copie du Nusil". Nusil est le gel homologué par les autorités sanitaires qui aurait dû se trouver dans les prothèses PIP.

A ce stade, 320 victimes ont été reconnues dans ce volet. Les avocats de porteuses se battent pour inclure un plus grand nombre de femmes, notamment celles dont les prothèses ont été retirées à titre préventif. Ils ont obtenu une première décision favorable jeudi 11 avril. Ce jour-là, la chambre d'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône) a infirmé des ordonnances qui rendaient irrecevables les plaintes des femmes qui n'ont pas subi de rupture de leurs prothèses PIP. Cette décision leur permet de ne pas être exclues de la procédure d'indemnisation.

3Le volet financier

Une seconde information judiciaire a été ouverte en mai 2012, pour "abus de bien sociaux, recel d'abus de biens sociaux, banqueroute et blanchiment". Elle doit permettre de retracer les flux financiers générés par la fraude présumée sur les prothèses, et de vérifier le patrimoine des dirigeants de l'usine avant et après le dépôt de bilan. Dans ce volet, Jean-Claude Mas et Claude Couty ont été mis en examen début juillet 2012, pour "abus de biens sociaux, blanchiment et blanchiment de fraude fiscale".

4Une procédure au civil

Au-delà du premier procès et des cinq ex-dirigeants de PIP mis en cause, les défenseurs des victimes cherchent d'autres responsabilités, notamment du côté de TÜV, le certificateur allemand des implants. Leader mondial du contrôle qualité, il est assigné par des distributeurs et des victimes qui réclament réparation. Cette procédure au civil est intentée devant le tribunal de commerce de Toulon. En revanche, dans le volet tromperie, TÜV, qui a porté plainte contre PIP, siégera parmi les parties civiles, car le parquet de Marseille a choisi de ne pas le poursuivre.

Six distributeurs de PIP à l'étranger - syrien, mexicain, roumain, bulgare, brésilien et italien - accusent TÜV de négligences et lui réclament 28 millions d'euros d'indemnités. Ils sont rejoints par plus de 1 600 porteuses de prothèses, principalement sud-américaines, mais aussi françaises et britanniques. Leurs avocats demandent pour chacune 16 000 euros, au titre du préjudice moral et d'anxiété induit par les implants frauduleux. Ils dénoncent l'insuffisance des contrôles du certificateur. La décision est attendue le 7 octobre. L'enjeu est l'indemnisation de dizaines de milliers de victimes en France, et dans le monde. 

A l'étranger, des procédures sont aussi en cours, notamment au Venezuela et en Allemagne. En général au civil, elles visent souvent des chirurgiens et des cliniques, ou des distributeurs de PIP, comme au Brésil.

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