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Que risque-t-on à récupérer de la nourriture dans les poubelles ?

Trois jeunes ont été convoqués mardi devant le tribunal de grande instance de Montpellier pour avoir récupéré de la nourriture périmée dans les poubelles d'un supermarché. 

Article rédigé par Jéromine Santo-Gammaire
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Des freegans, militants anti-gaspillage, récupèrent de la nourriture jetée mais encore consommable dans les poubelles des supermarchés et de certains traiteurs, le 12 février 2008. (THIERRY LOPEZ / MAXPPP)

Jugés pour avoir fouillé dans les poubelles. Ce mardi 3 février, trois jeunes ont comparu devant le Tribunal de grande instance de Montpellier. Ils ont été pris sur le fait, le 27 mai dernier, alors qu'ils transvasaient une importante quantité de nourriture des bennes de l'Intermarché de Frontignan (Hérault) vers leur camionnette. Les juges les ont déclaré coupables mais leur ont accordé une dispense de peine.

En France, chaque habitant jette à la poubelle 20 kilos de nourriture par an, selon l'Ademe, dont 7 kilos d'aliments encore sous emballage. De leur côté, les enseignes alimentaires jettent d'énormes quantités de produits, respectant scrupuleusement la date limite de consommation déterminée par le fabricant.

Dans la benne, les aliments trouvent de plus en plus de mains pour les récupérer : des associations et des citoyens choqués par le gâchis ou qui n'ont pas suffisamment de moyens pour faire autrement. Mais y a-t-il des risques à consommer ainsi ? 

Des risques d'intoxication alimentaire

Dans la poubelle, il faut distinguer deux types de produits : les produits périssables (viande, poisson, produits laitiers, oeufs) et les autres (surgelés, produits secs, conserves...). Les inscriptions "à consommer jusqu'au" et "à consommer de préférence avant le" ne signifient pas la même chose, comme le détaille la DGCCRF. Pour l'association les Gars'pilleurs, qui distribue gratuitement des aliments jetés, ces dates, uniquement déterminées par les fabricants, ne se justifient pas toujours. "Lorsque l'on distribue les produits périmés, on appelle les gens à faire preuve de bon sens, lance Louison, membre de l'association. Si l'opercule du yaourt est bombé, c'est qu'il a fermenté et qu'il ne faut pas le manger."

Cependant, toutes les associations anti-gâchis n'approuvent pas le glanage. "Tout aliment est soumis à des règles de température de conservation", explique Joël Duc, responsable hygiène et sécurité alimentaire auprès des Banques alimentaires. "Si le produit a séjourné dans une poubelle hors froid, la prolifération microbienne peut être extrêmement dangereuse." Il met en garde contre de possibles diarrhées, vomissements ou tout autre signe d'une intoxication alimentaire. Louison, elle - comme les autres membres de l'association -, affirme n'avoir jamais été malade bien qu'elle se nourrisse uniquement ainsi depuis plusieurs années.

Pourtant, impossible de ne pas s'interroger sur le risque d'ingestion de javel, dont certains industriels aspergent la nourriture pour qu'elle ne soit pas consommée. "En fait, c'est assez rare, affirme Louison. Les industriels essaient d'être plus discrets. Ils verrouillent les poubelles ou bien les placent dans un local très sécurisé avec des barbelés, parfois même des chiens et un vigile. Parfois ils pressent la nourriture périmée pour en faire un gros tas dégueu."

Des poursuites pour vol

Le procès de ce mardi en témoigne, les glaneurs peuvent aussi être inquiétés juridiquement. "Évidemment, si la justice ne dit rien, le risque est que d'autres personnes se mettent à faire des tournées presque industrielles des poubelles des supermarchés et revendent les produits à des prix très bas", estime Jean-Jacques Gandini, avocat des trois jeunes qui ont comparu à Montpellier.

Rien à craindre avec les fins de marchés ou les poubelles publiques. En revanche, "s'emparer frauduleusement de denrées alimentaires dans une poubelle située à l'intérieur d'une enceinte privée est passible de poursuites", précise l'avocat. L'acte est alors considéré comme du vol et les suspects risquent jusqu'à 5 ans de prison.

Évidemment, chaque condamnation reste à l'appréciation des juges. "Dans le cas de mes clients, il y a eu des éléments aggravants puisqu'ils l'ont fait de nuit, en réunion et qu'ils ont escaladé un muret". La peine encourue allait jusqu'à sept ans de prison et 100 000 euros d'amende. 

Mais les condamnations restent rares, souvent des petites amendes, ou des rappels à la loi. "La pire condamnation est une courte peine de prison avec sursis, déclare Jean-Jacques Gandini. Ce sont des peines de principe qui dépendent évidemment des circonstances, de la personnalité des individus et de leurs antécédents."

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