Leonarda : de l'arrestation à la polémique nationale
Acte 1. Les professeurs du collège lancent l'alerte
Il faut remonter au vendredi 11 octobre pour trouver la
première mention de l'expulsion de la jeune collégienne. L'Est républicain et
le site pleinair.net évoquent "une enfant expulsée sous les yeux de ses
camarades " à Pontarlier. Les deux articles citent "un
communiqué" des enseignants du collège André Malraux où est scolarisée
Leonarda :
"Nous, professeurs, sommes profondément choqués par les
méthodes utilisées [...] et sommes choqués de voir comment les efforts
d'intégration fournis par ces enfants à l'école sont réduits à néant par des
politiques aveugles et inhumaines. Nous demandons le retour immédiat des
enfants en France pour leur sécurité."
Trois jours plus tard, lundi dernier, cette lettre ouverte
est publiée sur le blog national de RESF. Sur Twitter, l'information commence à
circuler, notamment via des associations comme la Ligue des droits de l'Homme
de Rennes. C'est à ce moment-là que les partis politiques de gauche s'emparent
de l'affaire.
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Acte 2. Valls pris à partie par le Front de gauche... et le PS
La première dépêche de l'AFP tombe mardi à 17h34 : "Le
Parti de gauche fustige 'la politique inhumaine de Valls après l'expulsion
d'une collégienne rom ". Elle reprend les éléments publiés dans un
communiqué du Parti de gauche publié un peu plus tôt. Communiqué qui évoque notamment "la lepénisation des esprits ". La dépêche
revient ensuite sur les circonstances de l'arrestation en citant RESF et des
éléments donnés par la préfecture du Doubs.
En l'espace de trois heures, l'AFP publiera trois versions
de sa dépêche en ajoutant des détails et des réactions. Dans sa dernière
mouture, à 20h49, l'agence évoque pour la première fois des propos de
responsables socialistes. Le député Pouria Amirshahi est le premier à "demander
le retour immédiat de Léonarda ainsi que sa famille en France ".
Dans un communiqué, le Mouvement des jeunes réclame "des
explications à cette affaire" au "ministre de l'Intérieur". Dans la foulée, le Parti socialiste décide également de réagir via David
Assouline, son porte-parole.
"Le PS demande des comptes après l'expulsion
controversée d'une collégienne rom " titre alors l'AFP mardi à 22h25.
Acte 3. La première réaction de Manuel Valls
Interpellé par son propre camp, il n'aura fallu que trois
petits quarts d'heure à la Place Beauvau pour réagir. Le site internet du
ministère publie d'abord "un communiqué de la préfecture du Doubs "
qui présente sa version et justifie le déroulement de l'arrestation.
Dans la foulée, Manuel Valls publie un autre communiqué :
"le ministre de l'Intérieur tient à rappeler qu'il applique avec fermeté
les décisions d'éloignement tout en veillant scrupuleusement au respect des
droits des étrangers ".
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Acte 4. La tension monte à gauche
Avec les émissions matinales, temps forts des radios et des
télévisions, les réactions politiques se multiplient mercredi matin. A droite, Jean-Louis
Borloo (UDI) estime qu'il "faut bien que la loi soit respectée ". Quant
à Jean-François (UMP), il semble donner raison à Manuel Valls sur l'expulsion
de la famille kosovare.
C'est à gauche que les propos sont les plus cassants à
l'égard du ministère de l'Intérieur. Sur iTélé, Bruno Le Roux dit qu'il faut
attendre "de savoir ce qui s'est réellement passé ". En attendant, le patron
des députés PS assure qu'il "ne faut pas aller cher les enfants à l'école.
On peut attendre, on peu différer".
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Un peu plus tard, Claude Bartolone,
président de l'Assemblée nationale, se fend d'un tweet tranchant :
Acte 5. Matignon entre en piste, Valls se défend
En milieu de matinée ce mercredi, Matignon décide
d'intervenir. Le Premier ministre "s'est entretenu dès ce matin avec le
ministre de l'Intérieur sur les conditions d'éloignement de la famille de
ressortissants kosovars ". L'entourage de Jean-Marc Ayrault annonce
l'ouverture d'une "enquête administrative " par le ministère de
l'Intérieur.
En déplacement à Lorient, Manuel Valls réagit une demi-heure
plus tard. Il affirme "comprendre toutes les émotions " tout en soulignant que "cette reconduite à la
frontière s'est déroulée dans le respect du droit, dans le respect des
personnes ". Le ministre de l'Intérieur conclut : "Que chacun garde
son sang-froid ".
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Acte 6. Tension au sein du gouvernement, Hollande appelle au
calme
L'affaire tombe le jour du Conseil des ministres. A la
sortie de l'Elysée, Vincent Peillon se dirige vers les micros : "Je
demande qu'on sanctuarise l'école" et "que cette situation ne se renouvelle
pas ", lance le ministre de l'Education.
Le Premier secrétaire du Parti
socialiste, Harlem Désir réagit également et affirme que "Leonarda doit
pouvoir revenir dans sa classe ".
Dans la foulée, le Parti de gauche continue son offensive
contre le ministre de l'Intérieur. La formation de Jean-Luc Mélenchon "exige
la démission " de Manuel Valls, "ministre indigne de la
République ". Le PCF évoque une "abomination". De son côté, le
Défenseur des droits, Dominique Baudis, lance une enquête sur les conditions de
l'expulsion.
Devant cette levée de boucliers, François Hollande décide
d'intervenir. Via la porte-parole du gouvernement, le chef de l'Etat dit qu'il
"faut y voir plus clair avant de commenter les faits ".
Acte 7. Le cas Leonarda à l'Assemblée nationale
Les appels au calme ne semblent pas fonctionner alors que
débute les questions au gouvernement à l'Assemblée nationale. Les députés EELV
condamnent "fermement les explications données par le ministère de
l'Intérieur " et réclament des responsables au sein de la préfecture du Doubs.
Des élus socialistes prennent également la parole pour évoquer "des relents
de sakozysme ". Les chevènementistes soutiennent Valls esitmant que
"le ministre de l'Intérieur n'a pas commis de faute dans cette
affaire ". De son côté, Ségolène Royal appelle également la majorité
"à se calmer".
Devant l'Assemblée nationale, Jean-Marc Ayrault prend alors
la parole pour reconnaître "qu'hier et aujourd'hui, une émotion
particulière s'est exprimée concernant une jeune fille (...) Une émotion que j'ai
entendue, je la comprends". Le Premier ministre assure que "s'il y a
eu faute, l'arrêté de conduite à la frontière sera annulé ".
Acte 8. Du cas Leonarda à la politique Leonarda ?
Pour plusieurs responsables politiques, l'arrestation et
l'expulsion de la famille kosovare est l'occasion de parler plus largement de
politique de l'immigration. Le communiste Pierre Laurent réclame à France Hollande
"un engagement solennel et immédiat de stopper toute expulsion de jeunes
étrangers scolarisés ".
De son côté, Jean-François Copé en profite pour accuser le gouvernement de "laxisme".
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