Le grand ras-le-bol des défenseurs du mariage des homos
Le débat a fait émerger la parole, notamment celle des opposants au projet. De nombreux homosexuels se sentent victimes d'homophobie et s'insurgent sur le web.
La mobilisation des pro et des anti mariage des homosexuels ne se fait pas seulement dans la rue. Sur internet, le débat se crispe sévèrement depuis quelques semaines. La Manif pour tous du 13 janvier, qui a réuni des centaines de milliers d'opposants à l'ouverture du mariage aux couples de même sexe, a accentué le fossé entre les deux camps. La parole des "anti" se libérant, certains homosexuels se sentent victimes de propos homophobes et font part de leur ras-le-bol sur internet. Tribunes, posts de blogs, tweets... francetv info a fait un petit tour du web.
"J'ai vu des bourreaux le 13 janvier"
"Oui, je suis descendue dans l'arène. Happée, j’ai foulé la piste, j’ai senti le souffle et la rage des fauves. J'ai vu des gens qui manifestent pour dire non à l'homosexualité sous couvert d'un refus à la filiation." Partisane du projet de loi, cette femme homosexuelle de 30 ans qui témoigne a choisi de s'immiscer dans le cortège du dimanche 13 janvier. Elle a ensuite publié une tribune virulente sur cette expérience sur le site Le Plus. "J’ai vu des bourreaux, ceux qui exécutent sans connaître le procès, ceux qui, par pauvreté d’âme, ou par ralliement à la voix du plus fort, assassinent impunément."
A son image, le ras-le-bol des partisans du mariage pour tous, homosexuels ou pas, se fait sentir. A l'aide d'anaphores, par exemple. "J'ai honte", répète cette internaute sur Facebook, dans une tribune très partagée - et commentée. "J’ai honte. Honte qu’il nous reste si peu d’esprit, si peu de sensibilité, si peu de fraternité. Honte comme un certain 21 avril. Honte. Car rien ne vous donne le droit d’interdire quoi que ce soit qui ne vous nuise pas."
William Réjault, blogueur et scénariste, "né homosexuel", "a envie de fuir" la France, tant le débat le dégoûte. Dans un post de blog, il écrit : "Ma propre insécurité sur laquelle je travaillais tous les jours retrouve le chemin de ma bouche et de mes mots, ma tolérance s’amenuise et j’ai envie de vous cracher dessus, de vous ostraciser, de vous montrer du doigt en me moquant, s'insurge-t-il. Cette loi va passer. Mollement. Mais elle passera. Les traces qu’elle laissera dans ma perception de la France, par contre, ne disparaîtront pas."
"Cela doit cesser"
L'indignation, la colère, mais aussi l'agacement et la lassitude. Plusieurs personnalités publiques ont réagi au débat, faisant parfois part de leur expérience personnelle. La journaliste Marie Labory, qui présente le journal d'Arte de 19h45, se sent obligée de rappeler, dans une tribune publiée dimanche sur le site internet de la chaîne, que "l'homosexualité n'est pas un délit, ni une maladie".
Un jour plus tard, le 14 janvier, l'ancien ministre de la Culture Jean-Jacques Aillagon racontait dans Le Nouvel Obs comment il avait été, dans les années 70, "traité médicalement. J’ai suivi des traitements hormonaux, même des cures de sommeil, écrit-il. Les médecins pensaient que l’homosexualité était une forme de dépression nerveuse. Et puis j’ai réalisé que je n’avais pas de problème de santé, j’étais homosexuel, voilà tout."
Principale figure médiatique des opposants au mariage des homosexuels, la chroniqueuse mondaine Frigide Barjot a provoqué l'ire du patron du Banana Café, bar gay parisien pro-mariage, dont elle dit pourtant être proche. "Elle use et abuse d’un blouson du Banana Café qu’elle a obtenu il y a une quinzaine d’années, mais cela fait maintenant trois ans qu’elle n’a plus mis les pieds dans notre bar. Et elle n’y est plus la bienvenue. Cela doit cesser", dit-il sur Le Plus.
Sites et court métrage de soutien
Et les esprits s'échauffent. Les opposants au mariage pour tous ont beau assurer qu'ils ne sont pas homophobes, une partie de la communauté gay se sent de plus en plus attaquée, stigmatisée, meurtrie. Des militants ont créé le site Courageontaime, comme un grand cri d'amour destiné à rassurer les homosexuels sur leur place dans la société. Sous une forme différente, ce court métrage de soutien, intitulé Je sais (Tu as raison), affiche la même ambition.
A droite, Roselyne Bachelot n'est plus la seule figure publique à défendre le projet, ou à ne pas s'y opposer. La jeune militante UMP Aurore Bergé a expliqué, dans une tribune publiée elle aussi sur Le Plus, pourquoi elle ira manifester pour le projet de loi le 27 janvier, et ce en dépit des prises de position de son parti : "Je ne vois pas en quoi l’homosexualité empêcherait d’être un bon parent, l’hétérosexualité n’ayant par ailleurs jamais empêché d’en faire de mauvais."
Le 13 janvier, au moins 300 000 personnes sont descendues dans les rues contre le mariage des homosexuels et l'homoparentalité. La Manifestation pour l'égalité du 27 janvier saura-t-elle rassembler autant de monde ? Ce jour-là, les manifestants ne défileront pas seulement pour défendre un projet de loi. Ils adresseront aussi un message de soutien global à toutes les personnes potentiellement concernées par le texte.
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