"Non, nous ne construisons pas une maison de retraite pour homos !"
Le maire d'une petite ville de l'Aude dit avoir signé un permis de construire pour un lotissement pour personnes âgées, réservé aux homosexuels. Nous avons interrogé le promoteur.
"Le village". Derrière ce sobre nom se cache ce qui a été présenté, mercredi 31 juillet, comme le premier village pour retraités homosexuels de France. Le maire de Sallèles-d'Aude (Aude) dit avoir accordé un permis de construire "sans savoir" que ce lieu était destiné aux homosexuels. Lorsqu'il sortira de terre, le complexe sera constitué de 107 maisons individuelles écologiques, construites dans un "style villageois traditionnel" et coupées du monde extérieur par une enceinte.
Aux Etats-Unis, des maisons de retraite réservées aux homosexuels émergent depuis plus d'une dizaine d'années, notamment en Californie et en Floride. En France, une telle annonce en a supris plus d'un. Nous avons interrogé Danny Silver, le promoteur immobilier britannique en charge de ce projet chez The Villages Group. Il nous en explique la genèse.
Francetv info : Pourquoi avez-vous décidé d'importer en France ce "village" réservé aux retraités homosexuels ?
Danny Silver : Au départ, ce n'était pas du tout prévu. Le projet que nous avons présenté, et pour lequel nous avons obtenu le permis de construire auprès de la mairie de Sallèles-d'Aude il y a quelques mois, portait sur un "village" ouvert à tous. Ces structures que nous développons existent dans d'autres pays, comme aux Etats-Unis ou en Australie. Mais nous n'avons pas réussi à attirer suffisamment de clients. Le marché immobilier se porte très mal en France, et les gens intéressés sont timides.
J'ai donc décidé de changer de stratégie, pour tenter d'attirer des investisseurs plus riches, et j'ai eu l'idée de me tourner vers la communauté homosexuelle. En Californie, par exemple, il existe des complexes assez huppés dédiés aux gays et aux lesbiennes, et je me suis dit qu'en France, ça pourrait marcher aussi. Lundi, nous avons publié différents communiqués pour annoncer le projet. En une journée, j'ai eu plus de demandes de renseignements qu'en trois mois.
A quoi ressemblent ces lotissements ?
Il s'agit d'habitations réservées aux personnes âgées de plus de 50 ans, qui veulent prendre leur retraite et garder une vie saine, active, tout en vivant en groupe. L'ensemble est fermé et géré par les habitants eux-mêmes : les activités proposées, comme la musique ou le sport, sont prises en charge par les résidents.
Proposez-vous des services spécifiques pour les personnes âgées ?
Soyons clairs : ce n'est pas une maison de retraite ! C'est un endroit où couler des jours heureux tranquillement, lorsqu'on est en bonne santé. Ces "villages" ne proposent pas de services pour les personnes handicapées ou malades. Si vous avez besoin d'aller voir un médecin, il faut aller en ville.
Si un jour, vous sentez que vous commencez à fatiguer, ou que vous tombez malade et que vous avez besoin d'aide, alors ce lieu ne vous conviendra plus. Vous devrez intégrer une vraie maison de retraite, avec tous les services médicalisés et les commodités que cela suppose.
Aurez-vous le droit de proposer une offre commerciale uniquement aux homosexuels ?
Désormais, nous ciblons en priorité cette communauté pour le projet de Sallèles-d'Aude, mais évidemment, nous n'interdisons pas aux hétérosexuels d'acheter une de ces maisons. De toute façon, la loi nous l'interdit, puisque cela serait assimilé à une forme de discrimination. Nous devrons en revanche rester vigilant sur la parité hommes-femmes. A l'étranger, certains de ces complexes sont devenus, par la force des choses, des endroits pour homosexuels réservés aux hommes ou aux femmes. Et la justice s'est saisie de ces affaires.
Il est encore trop tôt pour savoir comment les choses vont évoluer en France. Ce que je sais, c'est que je ne m'attendais pas à un tel succès. J'espère qu'une fois les travaux finis, les résidents pourront retrouver le calme dans ce "village". Qu'ils soient homosexuels ou hétérosexuels, c'est ce à quoi ils aspirent.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.