Onze ans et douze CDD plus tard, l'Inserm refuse de l'embaucher
Cette ingénieure de 32 ans, mariée et mère de deux enfants, a
été patiente jusqu'au bout. Pendant onze ans, elle a accepté douze fois que son
CDD soit renouvelé. Elle a même signé sans broncher les six avenants qui, à
chaque fois, le prolongeaient. Dans l'espoir qu'un jour, enfin, on lui
offrirait le CDI tant convoité. Las : le 23 septembre, son dernier contrat
se termine. Cette fois, pas d'avenant : on lui notifie son congé
définitif. Motif invoqué : trop d'ancienneté pour pouvoir signer un
nouveau CDD, pas les budgets pour créer un poste.
Recherches arrêtées, équipe orpheline
Dans son équipe, tempête : l'ingénieure doit abandonner
d'importants travaux commandés par le CHU de Nantes, et personne ne peut, en
l'état, la remplacer. "Ces dernières années, nous avons lancé une
étude prometteuse avec le service de réanimation de l'hôpital de Nantes. Cette
étude clinique devait être lancée à grande ampleur au mois d'octobre sur 100 à
200 patients : en mon absence, elle ne pourra être réalisée." , explique-t-elle.
"C'est
une précarité qui a été institutionnalisée, apparue avec la
diminution
d'ouverture de postes au concours. Mon cas n'est pas isolé."
C'est dire si son équipe et les médecins de l'hôpital
attendent son retour avec impatience. Pourtant, son retour ne pourra advenir
que dans le cadre exclusif du contrat à durée indéterminée, ce que lui refuse l'Inserm
au motif que, durant toutes ces années, elle a été rémunérée par des organismes
différents. La situation est courante dans le milieu de la recherche : "C'est
une précarité qui a été institutionnalisée, qui est apparue avec la diminution
d'ouverture de postes au concours. Mon cas n'est pas isolé : dans les
laboratoires de l'Inserm, 40% des agents sont des contractuels. Ils n'en
assurent pas moins de la recherche au quotidien..." , déplore l'ingénieure.
L'interprétation de la loi Sauvadet en question
Après 11 ans de bons et loyaux services dans la même unité,
la jeune femme entend bien se prévaloir de la loi Sauvadet, qui prévoit de
faire passer en CDI les contractuels de la recherche sur des critères d'ancienneté.
Elle saisit le tribunal administratif en octobre, qui lui donne raison.
Celui-ci est formel et la jurisprudence constante : la loi Sauvadet
stipule que la continuité des différents contrats effectués même pour des
établissements différents doit être pris en compte.
L'Inserm, pour l'instant, n'a pas donné suite. Si la justice
donne raison à la plaignante nantaise le 22 janvier, date à laquelle se
prononcera à nouveau le tribunal administratif, plusieurs chercheurs pourraient
bien lui emboîter le pas.
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