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Radicalisation : "Les municipalités un peu démunies" (maire de Sarcelles)

Il y aurait une "centaine de quartiers en France" qui présentent "des similitudes potentielles avec Molenbeek" a dit ce week-end le ministre de la Ville, Patrick Kanner. Le député maire PS de Sarcelles, dans le Val-d'Oise, refuse cette appellation. Mais il reconnaît qu'il se sent démuni face au problème de la radicalisation.
Article rédigé par Edouard Marguier
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
  (La mosquée suspectée de radicalisation était installée dans un local commercial vide dans le quartier de Chantepie à Sarcelles. Elle est fermée depuis le 16 janvier © Radio France / Edouard Marguier)
Les municipalités démunie pour lutter contre la radicalisation. Le reportage à Sarcelles, en région parisienne, d'Edouard Marguier, en compagnie du maire de la ville, François Pupponi

Selon le maire de Sarcelles, François Pupponi, une dizaine de jeunes de sa ville est en train de basculer vers le radicalisme. Ils sont notamment embrigadés en fréquentant des lieux où des prédicateurs relaient le discours djihadiste. Edouard Marguier a  fait le tour de ces différents endroits en compagnie du maire. Direction d'abord la zone industrielle de l'Escouvrier, à l'écart du centre-ville de Sarcelles. Une zone industrielle comme il en existe des centaines en France. Des entreprises en tout genre, installées dans des bâtiments qui se ressemblent tous. A l'intérieur, deux écoles coraniques ont ouvert dans la plus grande discrétion il y a quelques semaines.

Les personnes qui fréquentent cette zone n'ont pas tardé à s'interroger. "Quand vous êtes dans un parc industriel comme celui là et que les responsables des entreprises, que les habitants qui passent  vous appellent en disant que là ils voient des femmes voilées de la tête aux pieds notamment rentrer et sortir avec des enfants, l'attention de tout le monde est alertés. Donc après , les services de renseignement se mettent en place pour voir ce qu'il se passe ", explique le maire. 

  (Deux écoles coraniques ont ouvert il y a quelques semaines dans la zone industrielle de l’Escouvrier, à l’écart du centre-ville de Sarcelles ©  Radio France / Edouard Marguier)
 Autre lieu suspect à Sarcelles, la mosquée du quartier de Chantepie, pas très loin du centre-ville. Située au cœur des immeubles d'habitation, là où il y a quelques années il y avait le primeur du quartier. "Un jour, les habitants du quartier m'ont indiqué que dans un ancien local commercial qui était fermé, les gens avaient ouvert une mosquée ", raconte François Pupponi. "Mais qui est derrière et qui va prêcher dans cette mosquée? " s'interroge alorsle maire. "Selon les informations que l'on a, ça pourrait être des personnes pas très respectables ", poursuit-il.

 

"Nous on disait que c'était pas des actes islamiques, mais lui il condamnait pas fermement" (habitant)

L'imam était effectivement dans le collimateur des services de renseignements depuis plusieurs mois. Mathieu, 17 ans, est un habitant du quartier. Déscolarisé, il est en train de chercher du travail. Musulman pratiquant, il était l'un des fidèles de cette mosquée."Etait" parce qu'il a arrêté de la fréquenter à cause justement de l'imam. "Dans quelques propos, dès fois il allait un peu loin. Quand il y a eu l'histoire des terroristes, nous on disait que c'était pas des actes islamiques, car pour nous dans la religion c'est interdit de tuer, de faire du mal aux gens. Mais lui, il condamnait pas fermement, il disait pas les choses clairement, il était un peu vague, flou sur tout", raconte le jeune homme. "Y en a qui se laissent endoctriner mais y en a d'autres qui restent les pieds sur terre ", poursuit-il. 

Pas assez de réactivité de l'Etat

Cette mosquée est maintenant fermée, depuis le 16 janvier. L'arrêté du maire est affiché sur la porte : "Les mesures de sécurité ne sont pas respectées". Voilà la seule raison que François Pupponi a trouvé pour fermer ce lieu : le code de l'urbanisme. Car le maire n'a pas de pouvoir pour lutter contre la radicalisation. "Aujourd'hui les municipalités sont un peu démunies devant des phénomènes comme ça. Ils auraient respecté complètement les règles liées au code de l'urbanisme, le maire ne pouvait pas, ni empêcher, ni fermer la mosquée. Elle serait ouverte légalement et après ce serait à l’État d'aller voir qui prêche dans cette mosquée et éventuellement, s'il constatait que pendant les prêches il y avait des propos qui n'étaient pas acceptables,  de tirer les conséquences. Mais ce sont des processus très longs ", déplore l'élu.

 

"Lorsqu'une famille nous appelle, il faut qu'on puisse agir tout de suite pour empêcher le jeune de basculer" (maire)

 Le maire de Sarcelles appelle donc l'Etat à prendre davantage en compte l'avis des municipalités dans la lutte contre la radicalisation. Et de son côté, il va mettre en place un centre de prévention pour tenter de rattraper les jeunes de Sarcelles qui seraient attirés par  le discours radical. "Lorsqu'une famille nous appelle parce qu'elle a peur pour son fils, sa fille, ou si un animateur ou l'éducation nationale remarque quelque chose, l'idée c'est qu'on puisse aller voir tout de suite, qu'on puisse empêcher qu'il bascule et sauver ce jeune ", explique François Pupponi. L'idée de ce centre de prévention est soutenue par la plus grande association musulmane de Sarcelles. L'association Foi et Unicité qui gère la mosquée du même nom. Pour Hammadi Kaddouri, l'un des responsables, tout est bon pour lutter contre la radicalisation. "Tout ce qui peut éloigner le danger, on est pour, et acteur même, si on nous invite à y participer ", assure-t-il. "Il faut que tout le monde s'y mette parce que sinon, l'un va faire une chose, l'autre va faire l’inverse et c'est ça qui est fatal pour tout le monde ", estime Hammadi Kaddouri. Le maire de Sarcelles souhaite ouvrir ce centre avant la fin de l'année. Il devrait coûter entre 400.000 et 500.000 euros. 

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