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Avant d'être ordonnés prêtres, des jeunes séminaristes de Lyon se confient sur leur vocation : "D'un point de vue extérieur, on peut se dire que c'est fou"

À la fin du mois de juin 2021, 130 nouveaux prêtres seront ordonnés en France, dont trois dans le diocèse de Lyon. franceinfo a pu rencontrer ces hommes qui s'apprêtent à embrasser l'habit, au séminaire de la capitale rhodanienne.

Article rédigé par Mathilde Imberty, franceinfo
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Amaury Martini, 33 ans, ne se voyait pas embrasser une vie tranquille et a choisi le séminaire, sans se soucier du regard des autres. (DIOCESE DE LYON)

Adrien Dagois s'excuse presque de montrer une chambre en bazar. Mais elles sont "correctes, ce ne sont pas des cellules monastiques !" Le futur prêtre fait la visite du séminaire, un grand édifice juste en face de la basilique de Fourvière, à Lyon. "C'est comme dans une petite coloc", résume-t-il. "Chacun a sa chambre individuelle et on a un lieu de vie commun que l'on partage." Ils vivent à 30 dans cette colocation, durant les sept ans de formation au séminaire, indemnisée 300 euros par mois, via les dons des fidèles.

"Donner ma vie pour quelque chose de grand"

Adrien, 37 ans, vient d'une famille athée. Un papa anticlérical. Une expérience d'ingénieur aéronautique. Il trouve tardivement la vocation en Inde, auprès d'enfants handicapés. "La foi, pour moi, c'est venu quand j'ai vu des gens qui donnaient leur vie pour les autres, raconte-t-il. Je me suis senti aussi appelé à donner ma vie pour quelque chose de grand, quelque chose qui fasse du bien aux autres, aux plus fragiles, aux plus faibles."

Les séminaristes ont souvent étudié, voire commencé à travailler avant de changer de trajectoire. C'est le cas aussi d'Amaury Martini, 33 ans, qui nous interpelle : "Vous me voyez faire ma petite vie tranquille, être marié, avoir un travail. C'est vrai que d'un point de vue extérieur, on peut se dire que c'est complètement fou de renoncer à fonder une famille. Mais je vois que c'est comme tomber amoureux. On est saisi et donc on a envie d'aller dans cette voie."

"Le regard des autres, on s'en fout un petit peu, excusez-moi !"

Amaury Martini, séminariste à Lyon

à franceinfo

Adrien et Amaury entreront en 2021 au service d'une Église bousculée, notamment par les affaires d'abus sexuels, d'où cette formation humaine que les séminaristes reçoivent, en plus des enseignements en théologie et philosophie. "En psychologie, en connaissance de soi, sur la sexualité", énumère Adrien. "On pose aussi les questions qu'on a sur le cœur, qui nous taraudent. On voit un prêtre qui commet des actes atroces, et on se dit tout d'un coup qu'on est peut-être tous des pédophiles sans le savoir... On dépose nos peurs, on en discute avec des spécialistes." C'est aussi l'occasion de voir "la juste distance qu'il faut avoir avec les fidèles". "Ne pas se positionner en super-héros qui va sauver tout le monde et du coup avec une possibilité d'emprise sur les gens", indique-t-il.

"On peut parler des questions du célibat, de sa sexualité"

La question de l'emprise et des abus n'est plus survolée, mais fait l'objet de formations dont se charge en partie l'évêque Emmanuel Gobilliard. "On a invité des commissaires de police, des magistrats, des victimes, pour que tout le monde soit sensibilisé", détaille-t-il. "La nouvelle formation qui a été demandée par le Pape intègre ces questions. Cela rentre vraiment dans les modules de formation ! On peut parler des questions du célibat, de sa sexualité, de ce que vit l'Eglise actuellement, non seulement dans l'institution, mais aussi à l'extérieur."

En 2021, trois prêtres sortent formés du séminaire de Lyon. "Toujours un miracle" pour l'archevêque de Lyon, Mgr Olivier de Germay. "Qu'un jeune, à 25-30 ans, dise 'Moi, je donne ma vie pour me mettre au service des autres', c'est extraordinaire !" En France, 130 prêtres seront ordonnés cette même année. Des chiffres stables depuis une dizaine d'années, alors que la pratique catholique, elle, est en recul.

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