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Tunisie : des associations dénoncent la violation des libertés individuelles sous couvert de ramadan

De nombreuses voix se sont élevées pour dénoncer le harcèlement des non-jeûneurs du ramadan par les forces de l’ordre, dans plusieurs villes tunisiennes. Elles rappellent que la Constitution garantit la liberté de culte et les libertés individuelles.

Article rédigé par Alain Chémali
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 2 min
Les Tunisiens font leurs courses la journée pendant le mois sacré du Ramadan à Tunis, le 6 mai 2019. (YASSINE GAIDI / ANADOLU AGENCY)

Plusieurs associations et organisations nationales ont publié le 23 mai 2019 un communiqué conjoint, pour dénoncer la violation des libertés individuelles dans le pays à la faveur du mois de ramadan, rapporte le site Tuniswebdo.

L'article 6 de la Constitution 

Dans leur déclaration, ces composantes de la société civile rappellent que "violer les droits individuels, imposer le jeûne aux citoyens et fermer les cafés et les restaurants au nom de la religion sont des pratiques qui contrastent avec les fondements et les principes de l’Etat civil que nous œuvrons à mettre en place".

Elles demandent aux autorités tunisiennes, et en particulier au ministère de l’intérieur, de "respecter les traités internationaux garantissant les libertés individuelles (pensée, croyance et conscience) et les principes de la Constitution de 2014 qui garantit, dans son article 6, la liberté de croyance, de conscience et de l’exercice des cultes".

Signé entre autres par le Syndicat national des journalistes tunisiens, l’Association tunisienne des femmes démocrates, l’Union générale des étudiants de Tunisie ou la Ligue tunisienne pour les droits de l’Homme (LTDH), le texte apporte un soutien indéfectible aux victimes d’abus en la matière.

Dès le 21 mai, la LTDH avait publié un communiqué condamnant les graves violations des droits de l’homme par les forces de l’ordre dans plusieurs villes du pays : descentes dans des cafés ouverts la journée, suivies de l’arrestation des propriétaires des lieux, ainsi que de quelques clients.

Dans un café à Sfax

Mais c’est surtout l’épisode de l’intervention d’un policier dans un café à Sfax, raconté par un consommateur sur sa page Facebook, qui a frappé les esprits.

Alors que Abdelmajid Djemel, directeur du département histoire à la faculté des Lettres et des sciences sociales de la ville, se trouvait dans l’établissement avec des collègues, un policier en civil fait irruption demandant leurs pièces d’identité aux clients.

"Je lui ai demandé sa carte professionnelle, ce que la loi m’autorise à faire. Il a réagi en me montrant son pistolet personnel en disant devant tout le monde: ‘La voilà mon identité’", raconte l’universitaire. 

Emmenés au poste de police, Abdelmajid Djemel affirme qu’ils ont été bien reçus par le commissaire qui, après avoir vérifié leurs identités, les a raccompagnés au lieu où ils avaient été arrêtés.

Le ministère de l'Intérieur dément l'existence d'une campagne contre les non-jeûneurs

La LTDH rapporte que des descentes similaires ont eu lieu dans les gouvernorats de Nabeul, Ben Arous, Sousse et Kairouan.

"Les forces de l’ordre ont terrorisé les personnes fréquentant ces lieux pour des raisons sans fondement", estime la Ligue qui voit dans ces pratiques une violation flagrante de la liberté de culte et de croyance garantie par la loi.

La LTHD invite les victimes à poursuivre les auteurs de ces violations et demande au ministère de l’Intérieur de mettre fin à ce genre d’agissements.

De son côté, le ministère a réagi le 23 mai en démentant l’existence d’une campagne visant les cafés et restaurants ouverts la journée au public durant le ramadan. Dans son communiqué, le ministère précise "bien mener sa mission, dans le respect de la loi et des droits humains sans toucher aux libertés individuelles garanties par la Constitution, dont la liberté de croyance et de conscience".

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