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"J'ai peur" : Adleen, victime de violences conjugales, témoigne à la veille de la sortie de prison de son ex-conjoint

Selon le collectif "Féminicides par compagnon ou ex", 77 femmes sont mortes sous les coups de leur conjoint depuis le 1er janvier. Adleen, victime de violences conjugales, raconte cet enfer, alors que son ex-conjoint doit sortir de prison dimanche.

Article rédigé par franceinfo - Farida Nouar
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le collectif "Féminicides par compagnon ou ex" a recensé 77 féminicides depuis le 1er janvier 2019 (photo d'illustration). (SAMI BELLOUMI / MAXPPP)

Quand elle décroche son téléphone, Adleen s'ecroule. Son ex-compagnon, violent, devait sortir de prison en septembre. On lui annonce qu'il sera libre dimanche 21 juillet grâce à des remises de peine. "Depuis lundi je ne dors plus, j'ai perdu quatre kilos, je ne mange rien, je ne fais que courir", confie-t-elle. Les souvenirs des violences quotidiennes ressurgissent : la mâchoire fracassée, les gifles...

Adleen pardonne pendant des années, mais en décembre 2017, c'est la fois de trop. Pour une histoire d'argent, son ex compagnon entre dans une fureur terrible. "Il m'a réclamé de l'argent, je lui ai dit non. Il m'a bien massacrée ce jour-là", raconte-t-elle, avant de poursuivre, au présent. "Il me menace de représailles si jamais il finit en prison, il me prend en photo, me dit qu'il va envoyer ça à ses amis, qu'ils ont notre adresse. Il me dit : 'Fais attention quand tu amènes tes gosses à l'école, retourne-toi bien'. Il casse tout à la maison, y a du verre partout..."témoigne Adleen, qui peine à contenir ses larmes. "A ce moment là, je ne me rends pas compte que je fais une hémorragie", poursuit-elle. Son ex-compagnon, lui, "a la rage"

Il m'a étranglée à plusieurs reprises. J'étais en train de prier que Dieu me laisse vivante parce que mes enfants, ils n'ont que moi. Je me suis dit, je vais mourir.

Adleen

à franceinfo

Les médecins la sauve. Pendant son hospitalisation, le père de ses enfants continue de la harceler avec des textos : "Tu es une mauvaise épouse", "Crève, tu l'auras mérité"...  Il est condamné en comparution immédiate à deux ans de prison ferme. Depuis sa cellule, il la menace avec des courriers. Dans 24 heures, il sera libre.

"Est-ce qu'il ne va pas en être capable ? " 

Adleen s'est procuré en urgence cette semaine un téléphone grand danger pour prévenir directement les secours en cas d'agression. Mais ce n'est pas assez estime-t-elle. Elle voudrait que ce dispositif puisse être combiné avec le bracelet électronique anti-rapprochement, "parce qu'avec ce téléphone tout seul, je me sens obligée d'être aux aguets à chaque fois", explique-t-elle.

En attendant, Adleen a peur. "Il peut être quelqu'un de très réfléchi mais ça ne dure pas, d'un coup ses démons reviennent, explique-t-elle. J'ai peur qu'il ne me laisse pas tranquille, qu'il continue de me harceler, qu'il m'envoie même des gens, puisqu'il m'a déjà menacée de le faire. Est-ce qu'il ne va pas en être capable ? Il y a beaucoup de choses qui m'angoissent." Même si son ex-compagnon n'a pas le droit de l'approcher, ni elle, ni ses enfants, Adleen a décidé de déménager très prochainement pour protéger sa famille. Elle n'a pas le choix, dit-elle.

L'angoisse d'une femme victime de violences conjugales avant la sortie de prison de son ex-conjoint

Au début du mois, le gouvernement a annoncé la tenue d'un "Grenelle des violences conjugales" à la rentrée, afin de faire émerger de nouvelles mesures permettant de faire reculer ce phénomène. Dans une tribune publiée vendredi 19 juillet sur le site de franceinfo, des familles et des proches de 35 victimes réclament l’inscription du terme de "féminicide" dans le Code pénal. 

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