Présidentielle américaine 2024 : le soutien des stars du sport américain, enjeu crucial pour Kamala Harris et Donald Trump
Dans cette élection américaine 2024, chaque voix compte et certaines ont plus d'écho que d'autres. Alors que les deux candidats, Kamala Harris et Donald Trump, sont au coude-à-coude dans les sondages à moins de deux semaines de la date fatidique (5 novembre), chacun tente de rallier les derniers soutiens possibles.
Durant les longs mois de campagne, plusieurs stars du sport américain, souvent convoitées pour leur aura médiatique, ont rallié les rangs de l'un ou l'autre, même si l'on observe une moins grande implication qu'en 2020, selon Douglas Hartmann, professeur de sociologie à l'université du Minnesota. "Il y a beaucoup moins d’activisme sportif qu’il y a quatre ans. Cela n’est pas dû à la politique en soi, mais plutôt au contexte de 2020, avec la pandémie de Covid-19 et les soulèvements pour George Floyd", analyse-t-il.
Un soutien plus important pour Harris
Le retour à un climat de campagne plus "traditionnel", marqué néanmoins par la tentative d'assassinat envers Donald Trump le 14 juillet puis par le retrait de Joe Biden pour Kamala Harris, le 21 juillet, n'a pas empêché certains sportifs de choisir ostensiblement leur camp.
Et c'est celui de la candidate démocrate qui semble être davantage plébiscité. "Cela s’explique en partie par le fait que Harris peut s’appuyer sur les efforts d’Obama, Clinton et Biden pour présenter des stars du sport dans leurs campagnes", note David Niven, professeur de politique américaine à l'Université de Cincinnati (Ohio).
C'est une nouvelle fois la NBA qui s'engage le plus parmi les quatre grandes ligues américaines majeures que sont la NFL (football américain), la MLB (baseball) et le NHL (hockey sur glace). Toutefois, la superstar LeBron James, soutien affiché de Barack Obama puis de Joe Biden au point de créer en 2020 "More Than a Vote", une association pour inciter les Noirs américains à voter, s'est cette fois moins impliquée.
"LeBron James a montré qu'on peut être politique tout en ayant un grand succès, une énorme base de fans et être sollicité pour des publicités. Cela a permis aux athlètes suivants de trouver beaucoup plus facilement leur voix."
David Nivenprofesseur à l'Université de Cincinnati
Au rang des soutiens de poids, on compte néanmoins l'équipe nationale féminine, mais aussi Stephen Curry. Le 30 septembre dernier, le meneur qui avait donné des cauchemars aux Bleus aux JO, avait loué l'ancienne procureure de Californie. "Elle est une leader intelligente, en laquelle on peut avoir confiance pour diriger notre pays, nous apporter espoir, inspiration et unité."
Il avait été suivi par son coach aux Warriors, Steve Kerr, également à la tête de la sélection nationale, qui est même allé jusqu'à prendre la parole lors de la convention démocrate. D'anciennes gloires, comme Magic Johnson en NBA, ont également apporté leur "endorsement" (soutien officiel) à l'ancienne vice-présidente, tout comme une quinzaine d'anciennes gloires de la NFL ou la rubgywoman la plus suivie au monde, Ilona Maher.
De l'autre côté, Donald Trump a reçu peu de soutien de stars actuelles, mais peut toujours compter sur les anciennes, comme Dennis Rodman (NBA), Tiger Woods (golf) ou le catcheur Hulk Hogan. C'est aussi le cas de Dana White, le volcanique président de l'UFC, la principale ligue de MMA au monde, qui l'a même introduit lors de sa convention. "Les Républicains ont historiquement tendance à avoir plus de soutien de la part des entraîneurs et des anciens joueurs, en particulier dans des sports comme le football, la NASCAR ou le MMA", estime Douglas Hartmann.
En NFL, la ligue la plus suivie aux Etats-Unis, peu de joueurs ont osé s'exprimer pour un camp ou l'autre. A l'inverse, la NBA, menée par la figure de LeBron James, hésite beaucoup moins à s'engager à l'inverse de la génération de Michael Jordan. "La NBA a un syndicat de joueurs plus fort et une base de fans plus diversifiée (et ostensiblement progressiste). La NFL compte certains propriétaires qui sont d'éminents conservateurs ou des partisans publics de Trump", poursuit l'universitaire.
Les Chiefs de Kansas City au centre des convoitises
Au milieu de cette lutte à distance, une équipe a particulièrement cristallisé les tensions : les Kansas City Chiefs, double champions NFL en titre. Une des deux grandes stars, Travis Kelce, a officialisé sa relation avec Taylor Swift, la chanteuse pop à l'aura désormais colossale et qui se montre ostensiblement démocrate.
Ce qui a fait dire à Donald Trump qu'il préférait la compagne de... l'autre star de l'équipe, le quarterback Patrick Mahomes. "Brittany (Mahomes) est une grande fan de Trump. C’est une grande supportrice de MAGA [Make America Great Again], je la préfère largement à Taylor Swift", avait lancé l'ancien président par provocation, alors que Brittany Mahomes avait déjà "liké" des posts de Trump, avant de se raviser, mais sans jamais lui apporter un soutien public.
Un autre joueur de l'équipe, le kicker Harrison Butker, avait fait scandale en mai dernier avec des propos conservateurs et misogynes, alors qu'il s'adressait aux étudiants d'une université catholique du Kansas. "Certaines d’entre vous mèneront peut-être de grandes carrières. Mais je me risquerai à dire que la majorité d’entre vous se réjouiront surtout de leur futur mariage et des enfants qu’elles mettront au monde", avait-il lâché, estimant par ailleurs que le mois des fiertés était dédié aux "péchés mortels".
S'il n'a jamais indiqué officiellement son camp, il avait reproché au président Joe Biden de défendre, malgré sa foi catholique, le droit à l’avortement, qui correspond selon lui au "meurtre de bébés innocents". Des propos dont se sont désolidarisés la NFL et son club, alors que Travis Kelce avait simplement esquivé le sujet. "Je ne peux pas dire que je suis d'accord avec l'une ou l'autre de ses croyances, autre qu'il aime sa famille et ses enfants. Je ne crois pas que je devrais le juger sur ses opinions, surtout celles qui sont religieuses, ou bien sur sa vision de la vie", avait évacué le tight-end.
Mahomes et Brady, deux superstars difficiles à conquérir
Au sein de la surpuissante NFL, c'est pourtant bien le choix de leur coéquipier, le "golden-boy" Patrick Mahomes, qui attire les convoitises. Mais ni lui, ni la légende néoretraitée Tom Brady n'ont souhaité donner des consignes de vote. "Je ne veux pas que mon influence soit utilisée pour soutenir un candidat ou faire quoi que ce soit", avait-il défendu.
Ces positions, qu'elles soient affirmées ou au contraire prudentes, peuvent-elles, à l'image des Etats pivots, faire chavirer l'élection ? "L’influence des personnalités sportives consiste moins à changer les mentalités qu’à renforcer les attitudes et les croyances existantes. Peut-être en les intensifiant ou en les renforçant, avec la possibilité de voter davantage que ce ne serait le cas autrement", estime le professeur David Hartmann.
Comprendre : le soutien des sportifs américains accentue le vote déjà établi bien plus qu'il ne le fait basculer. Et son impact se mesure surtout quant à l'incitation au vote, notamment chez les jeunes générations, comme l'a souhaité Caitlin Clark, la nouvelle star de la WNBA, en "likant" la publication de Taylor Swift en soutien à Kamala Harris. "Je serais surpris qu'il y ait beaucoup de nouveaux soutiens importants. Et je suppose que la plupart des athlètes se concentreront sur l’inscription des électeurs et la participation électorale", conclut David Hartmann.
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