Un titre souverain, c'est quoi ?
Indicateurs de la confiance des marchés dans la dette d'un Etat, les titres souverains sont au cœur de la crise de la zone euro.
En pleine crise de la dette, les titres souverains sont l'objet de l'attention de tous les acteurs de la zone euro. Ce sont eux qui témoignent de la confiance des investisseurs dans la capacité d'un Etat à rembourser sa dette. A l'heure où même l'Allemagne connaît des difficultés à vendre ses titres, comme le relate Le Figaro, FTVi vous explique le mécanisme de ces produits financiers qui permettent à un Etat d'emprunter sur les marchés.
• Des titres à rendement prédéfini
En matière de produits financiers, il existe deux grandes catégories, les actions et les obligations. Les titres souverains appartiennent à la deuxième catégorie. Contrairement aux actions, dont la valeur fluctue avec les résultats de l'entreprise, leur rendement est prédéfini et leur durée de vie limitée.
Chaque Etat a les siens. En France, l'Agence France Trésor (AFT), organisme chargé de gérer la dette publique et la trésorerie de l'Etat, émet trois types de titres souverains. Leur durée de vie diffère : moins d'un an pour les titres à court terme, entre deux et cinq ans pour les titres à moyen terme et de sept à cinquante ans pour le long terme.
• Un rendement annuel
Pour emprunter de l'argent, l'Etat met en vente ses titres souverains sur le marché. Les titres à court terme seront remboursés à la fin de leur durée de vie. Le mécanisme est différent pour les titres à moyen et long terme. En échange, l'Etat devra verser chaque année une somme à l'acheteur (le coupon) et le rembourser à l'échéance du titre.
Par exemple, pour un titre d'une valeur de 100 euros, d'un coupon de 5 euros et d'une durée de vie de dix ans, l'Etat va devoir verser au propriétaire du titre 5 euros chaque année et 100 euros au bout de dix ans.
• L'émission, le moment où l'Etat vend sa dette
Le marché primaire est le marché sur lequel l'Etat émet ses titres souverains. En France, l'AFT fait appel aux "spécialistes en valeurs du Trésor", vingt banques chargées de faire l'intermédiaire avec les investisseurs. "Les banques sont les grossistes de la dette, explique Tân Le Quang, de l'AFT. Elles récoltent les demandes de leurs clients et nous soumettent l’offre et les prix qu'ils proposent."
En fonction de ces données, l'AFT détermine les prix et les taux de coupon pour les différents produits. Plus le taux de coupon est important, plus emprunter coûte cher à l'Etat. "Si les épargnants pensent que les risques sont élevés, l'émetteur doit émettre une dette avec un taux élevé pour rémunérer le risque", explique Patrick Terroir, directeur général délégué de Caisse des dépôts Propriété Intellectuelle.
Si les taux proposés ne satisfont pas les investisseurs, une partie des titres émis ne trouve pas preneur. C'est ce qui s'est passé mercredi 23 novembre en Allemagne. Les investisseurs n'ont acheté que 3,64 milliards d'euros de titres à 10 ans sur les 6 milliards émis. La banque centrale allemande a du racheter le reste, preuve que la première économie de la zone euro n'échappe pas à la défiance des marchés à l'égard des titres souverains européens.
• Le marché secondaire, le lieu où les taux s'envolent
Une fois les titres émis, ces banques vont les revendre à leurs clients, professionnels comme particuliers, qui pourront à leur tour les vendre à d'autres investisseurs. C'est le marché secondaire. Sur ce marché, le prix est déterminé par la loi de l'offre et de la demande. "Pour les dettes risquées, on va ajouter une prime de risque, qui va tenir compte du risque de non-remboursement, explique François Longin, professeur de finance à l'Essec. Si l'Etat français, jugé sans risque, emprunte à 3 %, le taux pour un pays à risque va par exemple être de 5 % : 3 % de taux sans risque et 2 % de prime de risque."
Cette prime explique les différences de taux entre les pays sur le marché secondaire. Par exemple, les investisseurs jugent qu'il est plus risqué d'acheter des titres français que des titres allemands. Quant aux pays bénéficiant du plan de sauvetage européen, comme l'Irlande, la Grèce et le Portugal, ils n'émettent même plus de titres, car ils sont incapables de supporter les taux demandés par les investisseurs.
Ce taux du marché va ensuite peser sur le taux d'émission. Ainsi, après une semaine où ses taux sur le marché secondaire ont tutoyé les 7 % début novembre, l'Italie a dû émettre des titres à 6,087 % jeudi 10 novembre, contre 3,57 % un mois plus tôt.
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