: Vrai ou faux Dissolution de l'Assemblée : les dates des élections législatives respectent-elles les délais imposés par la loi ?
"Je dissous donc ce soir l'Assemblée nationale", a annoncé Emmanuel Macron dimanche 9 juin, moins d'une heure après la révélation des résultats des élections européennes. "J'ai décidé de vous redonner le choix de notre avenir parlementaire par le vote", a poursuivi le chef de l'Etat après la large victoire du Rassemblement national, arrivé en tête avec 31,37% des suffrages exprimés contre 14,6% pour la majorité présidentielle. "Je ne saurai donc, à l'issue de cette journée, faire comme si de rien n'était", a justifié le président lors de son allocution.
Emmanuel Macron a ensuite annoncé la tenue d'élections législatives anticipées les dimanches 30 juin et 7 juillet. Un délai serré, qui a interpellé de nombreux utilisateurs des réseaux sociaux. Jean-Jacques Urvoas, ancien ministre de la Justice, s'est ainsi posé la question, sur le réseau social X, du respect du Code électoral. Selon l'ex-élu socialiste, le premier tour devrait se tenir "le 7 juillet". Alors, le calendrier annoncé par Emmanuel Macron respecte-t-il la loi ?
La tenue des élections législatives est encadrée par le Code électoral. D'après l'article L157, "les déclarations de candidatures doivent être déposées" à la préfecture "au plus tard à 18 heures le quatrième vendredi précédant le jour du scrutin". Pour que le premier tour se tienne le 30 juin, les candidatures auraient dû théoriquement être déposées le 7 juin, alors que la dissolution a été annoncée le 9. Le décret présidentiel paru le 10 juin au Journal officiel fixe finalement la date limite des dépôts de candidatures au 16 juin, soit seulement deux semaines avant le scrutin.
Entre 20 et 40 jours de délai
Mais les législatives à venir ne sont pas des législatives comme les autres, prévues de longue date, à l'issue d'un mandat de cinq ans des députés. La situation particulière de la dissolution change donc la donne. "Dans le cadre d'élections législatives anticipées, l'article 12 de la Constitution prévaut", assure Julien Jeanneney, professeur de droit public à l'université de Strasbourg. Selon lui, l'article 157 du Code électoral ne s'applique "qu'aux élections législatives classiques".
Si le calendrier paraît court, il respecte les clauses imposées par l'article 12 de la Constitution. En cas de dissolution de l'Assemblée nationale, le texte prévoit que les élections législatives anticipées aient lieu "vingt jours au moins et quarante jours au plus après la dissolution". Le premier tour ayant lieu le 30 juin, soit vingt-un jours après l'annonce d'Emmanuel Macron, ce délai est respecté.
"A partir du moment où on respecte le délai de 20 jours, la Constitution écrase la loi."
Jean-Philippe Derosier, constitutionnalisteà franceinfo
Il reste toutefois possible que des électeurs ou des formations politiques saisissent le Conseil constitutionnel afin de décaler les élections. Mais les recours n'ont que très peu de chances d'aboutir, selon les spécialistes interrogés par franceinfo. Lors des dissolutions de 1981 et 1988, le Conseil constitutionnel les avait tous rejetés.
Un scrutin par nature organisé dans l'urgence
La dernière dissolution de l'Assemblée nationale remonte à 1997 lorsque Jacques Chirac était au pouvoir. Le président de la République avait annoncé sa décision le 21 avril 1997 et le premier tour s'était tenu le 25 mai, soit 34 jours après. "Le délai choisi par Emmanuel Macron est plus court, mais il reste conforme à la Constitution", estime Julien Jeanneney. Selon lui, le temps entre l'annonce de la dissolution et la tenue des élections est forcément restreint.
"Déjà en 1981, le délai avait été très court. La dissolution avait eu lieu le 22 mai et les élections les 14 juin et 21 juin. En 1968, la dissolution avait eu lieu le 30 mai et les élections avaient eu lieu le 23 juin, donc trois semaines après", a souligné la constitutionnaliste Marie-Anne Cohendet sur franceinfo. Et Emmanuel Macron va être confronté à un calendrier "très contraint", poursuit la professeure de droit constitutionnel, notamment en raison des Jeux olympiques. "L'Assemblée nationale doit se réunir de plein droit le deuxième jeudi qui suit son élection. Ça nous amènerait au 18 juillet."
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