: Vrai ou faux Le militant multicondamné Cory Le Guen a-t-il vraiment été investi par la gauche à Saint-Barthélémy et Saint-Martin ?
"Face au péril de l'extrême droite, il m'était impossible de ne pas être sur le front et de ne pas faire face." Le militant écologiste Cory Le Guen, aussi connu pour ses escroqueries et ses multiples condamnations, a annoncé vendredi 14 juin sur le réseau social X être candidat aux élections législatives dans la circonscription de Saint-Barthélémy et Saint-Martin dans les Antilles.
"C'est avec beaucoup d'humilité que je représenterai le Nouveau Front populaire", a-t-il affirmé, précisant que cela fait "des années" qu'il "travaille avec ces deux îles où la gauche avait disparu". Cory Le Guen partage également un visuel de lui souriant sur fond rose. "On sera derrière toi", "Très heureux pour toi l'ami, tu as intérêt à la gagner cette circo", réagissent des internautes.
Très vite, l'annonce de cette candidature fait tiquer. "Vérification faite, ceci est une fausse information. Cet individu multicondamné n'est pas investi par le Front populaire. Il s'est juste auto-investi dans sa tête", révèle la journaliste de franceinfo Mathilde Lemaire, qui a suivi son parcours judiciaire, sur le réseau social X. La direction des Ecologistes-EELV, dont Cory Le Guen était adhérent, a confirmé à franceinfo que le militant n'avait pas reçu le soutien du parti : "Il n'a pas été investi par Les Ecologistes. (…) Il n'a aucun mandat particulier pour représenter le Front populaire."
La direction ignorait cette candidature
Quelques heures plus tard, Cory Le Guen fait donc marche arrière. Dans un nouveau message, il dénonce "un coup de pression" de la direction nationale du parti et assure avoir bien été investi par le bureau régional de Caraïbe Ecologie Les Verts Guadeloupe. Pour étayer ses propos, il partage une capture d'écran d'un courriel signé du secrétaire régional pour la Guadeloupe, à destination de Marine Tondelier, la patronne des Ecologistes.
Pour le militant, "tout était en ordre" dans le processus d'investiture. "La raison pour laquelle, le parti semble faire volte-face, c'est uniquement par manque de courage politique", estime Cory Le Guen sur X. "Le bloc bourgeois de la direction d'EELV a donc encore une fois gagné au détriment d'une candidature venant du bas", a-t-il également fustigé auprès de franceinfo.
"Avec ce revirement, je me vois contraint de me retirer avec beaucoup de colère et de déception."
Cory Le Guen, militant écologisteà franceinfo
Contactée par franceinfo, la direction des Ecologistes nie avoir eu connaissance de cette investiture, qui semble être passée sous les radars : "Nous n'étions pas au courant. Nous avons passé quatre jours à discuter un accord de circonscriptions et un accord programmatique [dans le cadre du Nouveau Front populaire], justifie-t-elle. Les départements et régions d'outre-mer sont hors périmètre. Nous n'avons évidemment pas pris le temps, dans l'urgence, de suivre ce qui était en dehors de cette urgence."
Le processus d'investiture n'était pas finalisé
"Le bureau national n'avait pas son mot à dire puisque, hors accord, les régions sont souveraines pour désigner leur candidat à gauche", a assuré de son côté le militant. Concrètement, Cory Le Guen pouvait être le candidat des Ecologistes à Saint-Barthélémy et Saint-Martin, mais ne pouvait pas se revendiquer du Nouveau Front populaire.
En effet, cette coalition n'est pas effective dans les territoires ultramarins. Exclure ces territoires des accords n'est pas une nouveauté : quand les partis de gauche se sont unis pour former la Nupes en vue des élections législatives de 2022, les départements et régions d'outre-mer et la Corse n'étaient pas inclus.
Joint par franceinfo, le bureau régional de Caraïbe Ecologie Les Verts Guadeloupe a confirmé qu'il était de son ressort de présenter un candidat dans la circonscription de Saint-Barthélémy et Saint-Martin, mais seulement sous bannière écologiste. Il précise que le processus d'investiture était toujours en cours au moment où Cory Le Guen s'est déclaré candidat, sans souhaiter commenter davantage.
Il est connu pour ses escroqueries
Ce n'est pas la première fois que Cory Le Guen se fait remarquer. Adhérent depuis un an à Europe Ecologie-Les Verts (renommé depuis Les Ecologistes), il s'était fait connaître en piégeant le militant d'extrême droite Damien Rieu avec une fausse vidéo de prière au tribunal judiciaire de Paris. Le fondateur de Génération Identitaire, habitué à relayer ce type de contenus, dans le but de dénoncer une montée de l'islam en France, s'était empressé de la partager sans la vérifier.
Cette rapide notoriété lui vaut l'attention de la fachosphère, qui fouille son passé. Escroquerie, usurpation, supercherie... Cory Le Guen est bien connu de la justice. Il a été condamné 19 fois et a également fait l'objet d'une notice rouge d'Interpol, une demande envoyée aux services de police du monde entier afin d'obtenir son arrestation.
En 2018, par exemple, il s'était fait passer pour le neveu de Brigitte Macron afin de bénéficier d'un accueil VIP dans un hôtel de luxe et de places pour un Grand Prix de Formule 1. A l'occasion de cette affaire, pour laquelle Cory Le Guen a écopé d'un an de prison ferme, une expertise psychologique l'avait décrit comme "menteur pathologique" ayant une "tendance compulsive à l'affabulation". Cory Le Guen a assuré au site LesJours.fr que sa vie d'escroc était derrière lui.
Dans un post publié sur X samedi 15 juin, Cory Le Guen a dit se sentir "humilié" par la direction de son parti, qu'il accusé d'avoir menti à la presse. Il a réaffirmé que "toutes les personnes et instances avaient été informé [sic]" de sa candidature, et a rappelé avoir une expérience de terrain dans la circonscription qu'il convoitait, en ayant animé notamment "une réunion publique" à Saint-Barthélémy ou encore en mettant en place des actions à Saint-Martin, dans le cadre des élections européennes. Cory Le Guen a aussi animé une table-ronde à Nanterre, vendredi 31 mai, sur "L'Ecologie en outre-mer" en tant que "référent des îles de Saint-Martin et de Saint-Barthélémy".
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