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A Florange : un mauvais remake de Gandrange ?

Quatre ans après la fermeture de l'usine de Gandrange (Moselle), à une dizaine de kilomètres de là, le groupe ArcelorMittal a annoncé la fermeture des deux hauts-fourneaux de Florange. FTVi revient sur deux dossiers jumeaux. 

Article rédigé par Marie-Adélaïde Scigacz
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4 min
Les hauts-fourneaux de Florange (Moselle), dont la fermeture a été annoncée jeudi 27 septembre 2012, photographiés depuis un cimetière.   (JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP)

ENTREPRISES - Comme un air de déjà vu en Lorraine. Il y a cinq ans, l'usine ArcelorMittal de Gandrange fermait ses portes, laissant 600 ouvriers sur le carreau. Quand Libération révèle, jeudi 27 septembre, que l'aciériste a confirmé la fermeture définitive des hauts-fourneaux de sa voisine de Florange, les salariés craignent que l'histoire ne se répète. 

Face aux salariés en colère, le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, a concédé que le bras de fer était des plus musclés contre le géant indien de la sidérurgie, bien décidé à réduire les surcapacités. Sur un total de près de 2 700 personnes à Florange, 550 salariés sont directement concernés par l’arrêt des hauts-fourneaux, indique Le Figaro.

1Pas de fermeture prévue, mais... 

Gandrange 2008 : une fermeture partielle

En janvier 2008, le groupe Mittal Steel de l'Indien Lakshmi Mittal, annonce la fermeture d’une partie de l’usine de Gandrange. Cette décision doit entraîner la suppression de 575 emplois sur les 1 100 que compte le site. 

Pour les syndicats, soutenus par deux élus socialistes locaux, Michel Liebgott et Aurélie Filippetti, "l'entreprise est viable, pour peu qu'on y réinvestisse un peu d'argent", résume Le Monde.fr.

Florange 2011 : une inactivité temporaire

Un premier haut fourneau est mis à l'arrêt en juin 2011. Le deuxième connait le même sort en octobre. "Depuis, la direction n'a eu de cesse de prolonger leur inactivité tout en assurant qu’elle n'était que temporaire", rappelle Le Figaro. De plus, les ouvriers doivent faire face depuis 2008 à des périodes de chômage technique, avait rapporté le JDD en avril 2009.

2Les politiques se saisissent du dossier

Gandrange 2008 : les promesses de Nicolas Sarkozy

"Je ne vous laisserai pas tomber." Nous sommes en février 2008 quand Nicolas Sarkozy se rend à Gandrange pour promettre le maintien de l'usine en activité, devant les salariés en grève. Pour ce faire, il prévoit deux options. "Première solution : on arrive à convaincre monsieur Mittal de laisser ouvert tout ou partie du site, dans ce cas-là on investira avec lui. Deuxième solution : qu'on essaye de trouver un repreneur, et il en existe. On investira avec lui pour maintenir le site ouvert", assure le président de la République.



Douze mois plus tard, le site ferme ses portes. 

Florange 2012 : le défilé des candidats

En cette année présidentielle, Florange s'est imposé comme lieu de pèlerinage pour les candidats à la présidence, a noté le magazine économique Challenges, sur son site internet. Alors que les deux fourneaux sont à l'arrêt, tous assurent que Florange ne connaîtra pas le même sort que sa voisine. Nicolas Sarkozy assure avoir eu les dirigeants du groupe au téléphone, Nicolas Dupont-Aignan promet des "barrières douanières", tandis que François Hollande, alors candidat socialiste, promet le dépot d'une proposition de loi, permettant à l'Etat d'empêcher la fermeture d'une usine rentable.  

3Une mobilisation continue des syndicats 

Gandrange 2008 :  En décembre, 200 sidérurgistes, en révolte contre le plan de licenciement annoncé par le groupe, manifestent devant le siège de l'entreprise, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Alors que ses bénéfices nets au troisième trimestre 2008 sont en hausse de 27%, sa légitimité à mener sa restructuration se trouve de plus en plus contestée, souligne alors Le Parisien, "au point que le secrétaire d'Etat à l'Industrie, Luc Chatel, a décidé de 'faire le point sur ses engagements' passés en matière d'emploi avec la direction du groupe". 

Florange 2012 : Usine bloquée, action devant le siège parisien d'ArcelorMittal, marche partie de Moselle jusqu'à la tour Eiffel (avec accueil froid devant le siège de campagne de Nicolas Sarkozy), les ouvriers de Florange n'ont cessé ces 14 dernières mois de protester contre la fermeture des deux hauts-fourneaux, jusqu'alors démenti par le groupe lui-même.

4La déception ou l'espoir ? 

Gandrange 2009 : "Ici reposent les promesses de N. Sarkozy faites le 4 février 2008 à Gandrange. 'Avec ou sans Mittal, l'Etat investira dans Gandrange'." La plaque commémorative, déposée par les syndicalistes de la CFDT, amers, en 2009, a été dérobée en janvier, avait rapporté L'Est républicain, mais le souvenir de cet épisode douloureux de la sidérurgie reste bien présent.

Le site emploie encore 350 personnes contre 1 100 en 2008, tandis que sa démolition est en cours. Début septembre, le toit d'un bâtiment désaffecté s'est effondré, tuant deux ouvriers de 26 et 49 ans, qui procédaient à son démantèlement.

Florange 2012 : Le jour de l'annonce de la fermeture de deux hauts-fourneaux dans la presse, le ministre du Redressement productif, en charge du dossier depuis sa nomination en mai, n'a pas de bonnes nouvelles pour les ouvriers. "Nous sommes aujourd'hui dans un bras de fer qui commence, et nous allons le mener ensemble", déclare-t-il, essuyant quelques sifflets. Sans certitude de réussite, il a promis aux salariés de contacter "tous les aciéristes du monde" pour venir au secours de Florange. Prudent, il a assuré qu'ArcelorMittal "portera seul la lourde responsabilité de l'avenir" du site. 

Montebourg arrive à ArcelorMittal à Florange ( France 2 Strasbourg)

Arnaud Montebourg a par ailleur expliqué que les négociations avec Lakshmi Mittal, qui a rencontré jeudi François Hollande pour un tête-à-tête, avaient commencé le 30 août pour s'achever ces dernières heures, et n'avaient pas permis d'infléchir la décision du sidérurgiste. Après avoir sommé le groupe d'investir 150 millions d'euros sur le site, il a  indiqué que la direction du groupe dira lundi, lors d'un comité central d'entreprise (CCE) à Saint-Denis, "ce qu'il a finalement décidé".

Afin de ne pas subir le même revers que son prédécesseur, François Hollande compte sur le levier législatif : un projet de loi doit être adopté à la fin de l'année pour obliger le sidérurgiste à accepter un repreneur. Et peut-être alors, espère le gouvernement, l'histoire ne se répétera pas. 

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