Devenir députée, l'autre objectif de Marine Le Pen
Dimanche soir, la candidate du FN guettera particulièrement le score qu'elle aura réalisé dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais, où elle sera candidate aux législatives en juin.
Elle est aujourd'hui engagée dans la dernière ligne droite de l'élection présidentielle mais son regard se tourne en réalité vers un horizon un peu plus lointain. Car dimanche 22 avril, à 20 heures, si elle n'est pas qualifiée pour le second tour, Marine Le Pen démarrera à la minute une nouvelle campagne : celle des législatives, dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais.
Une circonscription de 14 communes où, depuis le début des années 2000, le Front national ne cesse de gagner des voix scrutin après scrutin. Comme le montre notre graphique, il a ainsi progressé de 25 points entre les législatives de 1997 et celles de 2007, passant au second tour de 15,96% à 41,65% !
A Hénin-Beaumont, commune la plus peuplée de la circonscription, le conseiller municipal Steeve Briois est même arrivé en tête au second tour des cantonales de mars 2011, avec 102 voix d'avance sur le candidat socialiste. Ce qui laisse à penser qu'aux prochaines élections municipales, prévues en 2014, la ville tombera dans l'escarcelle du FN.
Voilà déjà plusieurs mois que Marine Le Pen a confié que si elle était candidate aux législatives en juin, elle le serait "évidemment" dans cette circonscription, où elle a posé ses bagages en 2007. Mais depuis qu'elle y a abandonné son mandat de conseillère municipale, en février 2011, ses apparitions se comptent sur les doigts de la main. Alors, à une semaine du premier tour, Marine Le Pen a voulu donner un signe aux habitants de la région, le 15 avril, en passant son dernier dimanche de campagne à Hénin-Beaumont, entourée de 1 500 partisans. Quitte à fâcher quelques-uns de ses proches, un cadre du FN voyant même dans cette réunion publique "une immense connerie" alors que François Hollande et Nicolas Sarkozy tenaient au même moment des meetings géants à Paris devant 100 000 personnes chacun.
Situation économique difficile, scandales politico-judiciaires...
Ses chances d'être élue semblent en tout cas plus grandes pour les législatives que pour la présidentielle. Car, depuis la défaite aux législatives de 2007 (avec près de 42% des voix), la situation semble toujours plus favorable au Front national. A 13,5% début 2008, le taux de chômage sur le bassin d'emploi a frôlé les 17% en 2009, et demeure aujourd'hui supérieur à 15%, ce qui fait de Lens-Hénin la troisième zone d'emploi la plus touchée en métropole.
Sur le plan politique, la région est secouée par une succession d'affaires judiciaires. L'ancien maire socialiste d'Hénin, Gérard Dalongeville, est poursuivi depuis 2009 pour détournement de fonds publics, faux en écriture, favoritisme. Et non loin de là, à Liévin, le député-maire PS, Jean-Pierre Kucheida, se trouve depuis quelques semaines au cœur d'une enquête préliminaire. Il est soupçonné d'avoir dilapidé l'argent public, favorisé des proches et contribué à un financement occulte de la fédération socialiste du Pas-de-Calais... De quoi, là encore, faire le lit du FN, en guerre depuis plusieurs mois contre ce qu'il appelle "la mafia socialiste".
Des arguments qui reviennent systématiquement dans la bouche des électeurs frontistes de la région. Ecoutez par exemple les témoignages de Robert, Alain et Joël, recueillis par FTVi lors du meeting de Marine Le Pen à Hénin-Beaumont, dimanche :
"Plus la ville coule, plus les scores du FN montent", constatent les essayistes Caroline Fourest et Fiammetta Venner dans leur biographie de Marine Le Pen (aux éditions Grasset, 2011). Car la présidente du Front national "a mis le paquet pour faire d'Hénin-Beaumont son Vitrolles". Et les autres partis ne semblent pas faire le maximum pour l'en empêcher.
Dimanche, un premier tour à valeur de test pour Marine Le Pen
A droite, l'UMP a tout bonnement déserté le secteur. Aux dernières cantonales, la liste du parti présidentiel n'a recueilli que 2,72% des voix sur Hénin-Beaumont-Montigny-en-Gohelle. Et à gauche, le "front républicain" qui a jusqu'à présent permis d'éviter une victoire frontiste semble de plus en plus fragilisé par les affaires. Le PS, qui détient la circonscription depuis des années, apparaît lui-même en difficulté. Chef de l'agence héninoise du quotidien local La Voix du Nord, Pascal Wallart parle même de "descente aux enfers locale du PS : combat des chefs et haine attisée entre les trois hommes forts du territoire, absence totale de notoriété du candidat choisi [Philippe Kemel] et odeur de soufre dans le sillage du Rose mafia [le livre règlement de comptes sur le PS] de Dalongeville..."
Du coup, le premier tour de l'élection présidentielle, dimanche, aura plus que jamais valeur de test pour Marine Le Pen dans la 11e circonscription du Pas-de-Calais. Plus son score y sera élevé, plus ses chances d'être élue députée à la mi-juin le seront aussi. Et plus ses concurrents locaux seront prévenus de l'ampleur de la tâche qui les attend dans les prochaines semaines...
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