Budget 2025 : quatre questions sur la revalorisation des pensions de retraite prévue pour janvier

Le gouvernement est revenu sur sa décision de geler l'augmentation automatique du montant des retraites pendant six mois.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Une retraitée dans l'Ehpad de la Folatière à Bourgoin-Jallieu (Isère), le 11 septembre 2024. (JEAN-BAPTISTE BORNIER / LE DAUPHINE / MAXPPP)

C'est un revirement qui va sans doute rassurer des milliers de retraités modestes. Les pensions seront finalement revalorisées de la moitié de l'inflation dès le 1er janvier, avec un second rattrapage pour les plus petites six mois plus tard, a annoncé Laurent Wauquiez, président du groupe Droite républicaine (ex-LR) à l'Assemblée, lundi 11 novembre sur TF1. Face au dérapage du déficit public, le gouvernement souhaitait initialement reporter de six mois la hausse des pensions de retraite de base.

En plein débat sur les textes budgétaires 2025, l'exécutif s'est heurté à une levée de boucliers des syndicats et des oppositions, mais aussi d'une partie des soutiens du Premier ministre, Michel Barnier. Qui est concerné ? Combien coûtera la mesure ? Pourquoi le gouvernement a-t-il changé d'avis ? Franceinfo répond à quatre questions sur cette décision.

1 De combien seront revalorisées les retraites en 2025 ?

Le montant des pensions des 14 millions de retraités affiliés à des régimes de base obligatoires, selon les chiffres communiqués en janvier dernier par le site service-public, doit être, selon la loi, revalorisé au 1er janvier en fonction du montant de l'inflation. Le gouvernement dérogera à cette règle en 2025. "L'ensemble des retraites sera revalorisé à hauteur de 0,9% probablement, c'est-à-dire la moitié de l'inflation – on verra exactement quelle sera l'estimation sur l'inflation", a déclaré le ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, sur France 2, mardi. Si ces chiffres se confirment, une pension de 1 500 euros serait donc augmentée de 13,50 euros.

Une deuxième revalorisation interviendra ensuite le 1er juillet 2025. Elle ne concernera cependant que "les retraites qui sont en dessous du niveau du smic [soit 1 426,30 euros] pour qu'il n'y ait pas de perte de pouvoir d'achat", selon le ministre. "Cela concerne près de la moitié des retraités, 44% pour être exact", a précisé Michel Barnier devant l'Assemblée nationale, mardi. Ils bénéficieront "d'une seconde revalorisation pérenne", qui correspondra à la moitié de l'inflation, ainsi que "d'une compensation du manque à gagner du premier semestre de l'année prochaine", a détaillé le Premier ministre.

2 Combien coûtera cette hausse ?

Le gouvernement prévoyait d'économiser 4 milliards d'euros sur son budget 2025 en repoussant la hausse des pensions de six mois. Finalement, l'économie sera moindre. "En fonction de la réalité de l'inflation, cela peut varier et nous serons effectivement entre 500 et 800 millions d'euros de rendus aux petites retraites", réduisant les économies espérées à 3 milliards d'euros, a précisé Laurent Saint-Martin. Pour financer cette revalorisation, Laurent Wauquiez propose d'aller chercher "un milliard" dans la rationalisation de la "bureaucratie administrative", en fusionnant notamment certains organismes comme France Stratégie, le Haut-Commissariat au Plan, France 2030 et le Centre d'études prospectives.

3 Pourquoi le gouvernement a-t-il changé d'avis ?

Les membres du gouvernement défendaient initialement leur décision en invoquant un partage de l'effort budgétaire entre retraités et travailleurs. "Nous devons tous faire un effort et nous retrousser les manches" pour rétablir les comptes publics, avait ainsi estimé début octobre le Premier ministre dans une interview à La Tribune Dimanche. Michel Barnier jugeait que le report de la revalorisation des retraites représentait un "effort raisonnable, qui tradui[sait] cet effort collectif, partagé". Des arguments qui n'avaient pas convaincu les oppositions. Le député LFI et président de la commission des finances à l'Assemblée, Eric Coquerel, avait dénoncé sur franceinfo une "mesure injuste" qui demandait "aux retraités de payer pour tous les cadeaux fiscaux qui ont été faits aux plus riches". La patronne des députés Rassemblement national, Marine Le Pen, avait même accusé le gouvernement de "voler à nos aînés des milliards d’euros de pouvoir d’achat", sur X.

La proposition avait été critiquée jusque dans les rangs des députés du "socle commun" qui soutient le gouvernement Barnier. Laurent Wauquiez avait ainsi fait part de son scepticisme au chef du gouvernement, pourtant lui aussi issu des Républicains. Un sentiment partagé par les députés de l'ex-majorité présidentielle. "On est contre le gel", résumait un influent député macroniste à France Télévisions fin octobre. De quoi forcer les différentes composantes de la coalition gouvernementale à négocier entre elles sur ce sujet.

4 Pourquoi ce revirement crispe-t-il la coalition au pouvoir ?

L'annonce de l'abandon de la mesure par le patron des députés LR, et non par le ministre de l'Economie ou du Budget, a fait tiquer de nombreux élus macronistes. "Ce n'était pas à Laurent Wauquiez de l'annoncer", a ainsi déploré sur franceinfo Mathieu Lefèvre, député Ensemble pour la République (EPR) du Val-de-Marne. "Je pensais que le gouvernement gouvernait et le Parlement parlementait", a-t-il fustigé. En réponse, Laurent Saint-Martin a assuré sur France 2 qu'il savait que cette annonce serait faite par l'ancien président de la région Auvergne-Rhône-Alpes. "Nous avons aussi besoin de démontrer davantage que l'évolution de ce texte vient des compromis entre le gouvernement et les parlementaires du socle majoritaire", a-t-il ajouté.

L'épisode est surtout un révélateur des tensions entre les différentes composantes de la coalition, minoritaire à l'Assemblée nationale, qui soutient Michel Barnier. "Ça râle évidemment… et l’on trouve cela assez pitoyable, mais il n'y a pas de volonté de sombrer dans une surenchère", rapporte un député MoDem à franceinfo, tandis qu'une élue EPR fait part d'une ambiance "morose et inquiète" auprès de France Télévisions. De quoi fracturer un peu plus l'alliance au pouvoir. "On est assez lucides sur la réalité du socle commun autour duquel on met chaque semaine un peu plus de guillemets", a assuré Gabriel Attal lors d'une réunion du groupe EPR mardi, a confirmé un participant à franceinfo.

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