Dégradation des finances publiques : Gabriel Attal assure devant les sénateurs avoir pris des "décisions fortes" face à l'aggravation du déficit
"On n'a pas tout fait bien" mais "on a fait de notre mieux". L'ancien chef du gouvernement Gabriel Attal, auditionné vendredi 8 novembre par le Sénat dans le cadre d'une mission d'information sur le dérapage des finances publiques, a assuré avoir pris des "décisions fortes" pour limiter l'aggravation du déficit. Initialement fixée à 4,4% dans la loi de finances adoptée à l'automne dernier, la prévision de déficit pour 2024 avait été rehaussée par l'ancien gouvernement au printemps, à 5,1%. Le gouvernement actuel table désormais sur 6,1%.
L'ex-Premier ministre, devenu depuis chef de file des députés Ensemble pour la République, a égrainé les décisions prises par son équipe en réponse aux notes d'"alerte" sur l'état des comptes publics. Gabriel Attal a notamment cité la hausse de la taxe sur l'électricité en janvier, l'annulation de 10 milliards d'euros de crédits en février, ou encore le doublement des franchises médicales. "Je ne crois pas que, par le passé, dans un temps aussi court, un gouvernement ait proposé, identifié et réalisé autant d'économies", s'est-il targué.
"Ça part complètement en sucette"
Le ton est parfois monté entre l'ancien locataire de Matignon et le rapporteur général du budget au Sénat. "Ça part complètement en sucette ! Quand il y a un écart de 50 milliards en neuf mois, (...) c'est un manque de rigueur dans la tenue de nos comptes", a tancé le sénateur Les Républicains Jean-François Husson. Ce dernier a reproché à Gabriel Attal d'avoir engagé des "dépenses nombreuses". "Faites-moi la liste des dépenses" qui ont "dégradé le solde 2024", lui a rétorqué l'ex-Premier ministre.
Comme Bruno Le Maire, auditionné la veille au Sénat, Gabriel Attal estime que "c'est bien la chute brutale des recettes" qui "explique une partie importante" de la situation budgétaire. Il a par ailleurs trouvé "scandaleux" le "procès politique, médiatique" fait à son ancien ministre de l'Economie, accusé par une partie de la classe politique "d'insincérité" et "d'opacité" vis-à-vis du Parlement sur la situation budgétaire. "Je n'ai toujours vu qu'un ministre de l'Economie et des Finances très soucieux de tenir les comptes publics de la France", a-t-il plaidé.
"Rien n'a été ignoré de la situation et des informations qui nous parvenaient."
Gabriel Attal, ancien Premier ministredevant les sénateurs
Gabriel Attal s'est en outre expliqué sur son choix de ne pas présenter un projet de loi de finances rectificative (PLFR) dès le printemps, comme le préconisait Bruno Le Maire. L'ancien Premier ministre misait sur d'"autres textes" plus tard dans l'année : le projet de loi de finances pour 2025, dans lequel il entendait défendre des "mesures fiscales rétroactives" sur la taxation des superprofits des énergéticiens et des rachats d'actions, et un projet de loi de finances de fin de gestion. Un plan rendu caduc par la dissolution en juin et la démission du gouvernement.
Gabriel Attal réfute tout lien entre ses choix et le calendrier électoral
Selon lui, la décision de ne pas étudier un PLFR au printemps visait aussi à "garder du temps parlementaire" pour avancer sur d'autres dossiers, comme le projet de loi agricole et les débats sur la fin de vie. Gabriel Attal a réfuté tout lien entre ce choix et les élections européennes en juin. "Vous dites que les européennes n'étaient pas le sujet, mais le Premier ministre est par nature le patron de la majorité. Vous devez aussi tenir compte du climat politique dans lequel vous prenez des décisions", lui a répondu le président de la commission des finances et sénateur socialiste, Claude Raynal.
Enfin, Gabriel Attal, comme son ancien ministre de l'Economie, a jugé qu'il était possible de ramener le déficit à un niveau inférieur que ce que prévoit le gouvernement de Michel Barnier. L'ancien Premier ministre affirme avoir laissé à son successeur "un paquet de mesures" d'économies prêtes à être mises en œuvre, évoquant des annulations de crédits supplémentaires ou encore des pistes sur la Sécurité sociale. "Cela relève du choix du nouveau gouvernement de ne pas prendre ces mesures", a-t-il jugé.
Une stratégie de défense que Jean-François Husson a jugé "inélégante" et "pas fair-play". "Je ne dis pas 'voilà ce que le gouvernement aurait dû faire', je dis 'voilà ce que mon gouvernement aurait fait s'il n'y avait pas eu la dissolution et si on n'avait pas eu à démissionner'", a fait valoir Gabriel Attal, qui déclare "assumer un certain nombre de responsabilités qui étaient les nôtres". Le Sénat doit poursuivre ses travaux avec l'audition de sa prédécesseure, Elisabeth Borne, le 15 novembre.
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