Cinq questions sur la fièvre catarrhale ovine qui décime des élevages de moutons et inquiète les éleveurs

Cette maladie, dite "de la langue bleue", se transmet par l'intermédiaire d'insectes piqueurs et peut tuer des ovins contaminés. Elle ne touche toutefois pas les humains ni les denrées alimentaires.
Article rédigé par franceinfo
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Un élevage des Pyrénées-Orientales, touché par la fièvre catarrhale ovine, le 19 juillet 2024. (ALEXANDRE BRE / HANS LUCAS / AFP)

L'été s'annonce définitivement mauvais pour les agriculteurs. En plus d'une moisson de blé tendre "catastrophique", les éleveurs font face à une épidémie meurtrière de fièvre catarrhale ovine (FCO), particulièrement dans le Sud-Ouest et en Corse, et subissent l'apparition d'un nouveau sérotype. Un premier élevage de moutons a ainsi été contaminé dans le Nord par le sérotype 3 de la fièvre catarrhale. Ce foyer, "confirmé le 5 août" par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation (Anses), pourrait être le point de départ d'une épidémie qui entraînerait "d'importantes pertes économiques pour les éleveurs". Franceinfo fait le point.

1 Pourquoi l'apparition d'un nouveau sérotype en France inquiète-t-elle ?

La fièvre catarrhale ovine est déjà présente en France, avec les sérotypes 4 (en Corse) et 8 (en France continentale), mais les cheptels de moutons français n'ont développé aucune résistance au nouveau sérotype 3, et y sont donc particulièrement vulnérables. "Le sérotype 3 est une menace pour le cheptel ovin français, puisque c'est un virus qui induit des manifestations cliniques qui peuvent être assez conséquentes. (...) Très clairement, il y a des ovins qui meurent", explique le directeur du laboratoire de santé animale de l'Anses, Stéphan Zientara, à l'AFP.

"Si on ne protège pas le cheptel aujourd'hui, c'est l'avenir de notre filière viande qui est en jeu", s'inquiète également Bruno Leclercq, animateur de l'association ovine des Hauts-de-France et de Normandie, à l'AFP. Il se souvient d'une épidémie du sérotype 8 qui, "en 2006-2007, avait décimé des élevages complets". Une nouvelle épidémie semblable aurait donc des conséquences économiques et morales dévastatrices pour les éleveurs d'ovins.

2 Où se trouvent les élevages les plus touchés ?

Outre l'élevage contaminé dans le Nord par le sérotype 3, la fièvre catarrhale ovine est présente dans l'ensemble de l'Hexagone. Cet été, c'est dans le Sud-Ouest que la maladie frappe le plus. Dans les départements de l'Ariège, l'Aude et les Pyrénées-Orientales, le stéréotype 8 de la FCO "est en train de faire des ravages", alerte la Confédération paysanne dans un communiqué datant du 31 juillet. "Ça a commencé aux alentours du 10 juillet, les premiers cas sur des béliers. Ils sont tous morts, je n'ai pas pu les sauver", se désole Patrick Ferrié, éleveur d'ovins dans l'Ariège, auprès de France 3 Occitanie.

La Corse est aussi lourdement touchée. Selon la chambre d'agriculture de Haute-Corse, près d'un millier de brebis sont mortes sur l'île et plus de 40 élevages sont touchés. "L'an dernier, on estime que 3 000 brebis sont mortes, et [la maladie] n'avait repris qu'en octobre. Cette année, nous en sommes déjà à 1 000, alors qu'une épidémie de catarrhale peut durer jusqu'à la mi-décembre selon le climat", redoute Fabien Lindori, élu au sein du bureau de la chambre d'agriculture de Haute-Corse, auprès de France 3 Corse ViaStella.

3 Quels sont les symptômes de la fièvre catarrhale ?

Également appelée "maladie de la langue bleue", la fièvre catarrhale se manifeste par de la "fièvre", des "troubles respiratoires", des "salivations", un "œdème de la face", et une "cyanose de la langue", détaille l'Anses, qui précise qu'un animal contaminé peut aussi être asymptomatique. Certaines souches virales provoquent en plus "des retards de croissance chez les animaux malades, la mort de certains animaux et des avortements chez les femelles infectées", ce qui entraîne "d'importantes pertes économiques pour les éleveurs", avertit l'Anses.

4 Comment cette maladie se transmet-elle ?

La fièvre catarrhale se transmet entre ruminants par l'intermédiaire d'insectes piqueurs, des moucherons culicoïdes, dont le développement est favorisé par des températures élevées. Contrairement à la grippe aviaire, sa détection n'entraîne pas automatique l'euthanasie, ce qui favorise les épidémies et les transmissions transfrontalières.

Le sérotype 3 de cette maladie, qui a contaminé un élevage du Nord à la frontière avec la Belgique, était "jusqu'alors présente uniquement aux Pays-Bas, en Allemagne et en Belgique", note un communiqué de la préfecture du département. Cette maladie, qui touche principalement les moutons, peut aussi toucher les bovins, les chèvres et les autres ruminants, mais n'est pas transmissible aux humains ou aux denrées alimentaires, précise l'Anses.

5 Comment peut-on éviter les contaminations ?

Pour éviter que le sérotype 3 ne provoque une épidémie sur tout le territoire, le ministère de l'Agriculture a annoncé fin juillet la création d'une zone "régulée", du Pas-de-Calais à la Moselle, où les déplacements de bovins, chèvres et moutons sont soumis à des restrictions. Le ministère a aussi annoncé, lundi 5 août, le lancement d'une campagne de vaccination volontaire et gratuite à destination des cheptels des éleveurs de la région, rapporte France 3 Hauts-de-France.

Ils devront passer commande auprès d'un vétérinaire sanitaire, qui recevra le vaccin "à partir du 14 août", et pourront l'administrer eux-mêmes à leurs bêtes. Une "deuxième livraison sera effectuée le 31 août", selon un communiqué du ministère, qui affirme disposer de 600 000 doses du vaccin Bultavo 3 (laboratoire Boehringer Ingelheim) et 4 millions de doses du vaccin Bluevac 3 (laboratoire CZV), grâce à une commande passée "par anticipation" le 5 juillet. Ces deux vaccins ont depuis "obtenu une autorisation temporaire d'utilisation (ATU) auprès de l'Agence nationale du médicament vétérinaire de l'Anses le 25 juillet", souligne encore le ministère de l'Agriculture.

Pour les autres régions de France également touchées, "la seule arme à notre disposition, c'est le vaccin", assure Emilie Gusse, vétérinaire à Saint-Girons (Ariège), auprès de France 3 Occitanie.

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