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Des stocks de chlordécone enfouis aux Antilles : trois associations réclament l'ouverture d'une nouvelle enquête

Ce pesticide puissant a été utilisé dans les bananeraies des Antilles jusqu'en 1993, alors que l'OMS avait souligné sa dangerosité dès les années 1970.

Article rédigé par franceinfo
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Le chlordécone a été utilisé entre 1972 et 1993 pour combattre un insecte dévastant les bananeraies antillaises (photo d'illustration). (CHRISTIAN WATIER / MAXPPP)

Trois associations (VIVRE, le CRAN, et Lyannaj pou depolye Matinik) demandent l'ouverture d'une information judiciaire sur le scandale du chlordécone, en adressant au Premier ministre et à la ministre de la Justice une "sommation interpellative", que franceinfo a pu consulter. Le chlordécone est un puissant pesticide qui a été utilisé dans les bananeraies des Antilles jusqu'en 1993, alors que l'OMS avait alerté sur sa dangerosité dès les années 1970.

>> Cinq questions sur le chlordécone, le pesticide qui a empoisonné les Antilles pour plusieurs siècles

Dans ce document, leur avocat Christophe Lèguevaques demande que le parquet de Pointe-à-Pitre qui a déclenché une enquête préliminaire en novembre dernier, nomme un juge indépendant et ouvre une information judiciaire après des informations sur l'existence de stocks de chlordécone et de lieux d’enfouissement, sources de pollution permanente. Ces informations ont été révélées d'une part par la commission d'enquête parlementaire en septembre, d'autre part dans l'émission de télévision Complément d'enquête, diffusée fin février sur France 2.

Enfouissement des stocks

Devant la commission d’enquête parlementaire, Joël Beaugendre, maire de Capesterre-Belle-Eau en Guadeloupe et ancien député, a rapporté un témoignage affirmant que des stocks de chlordécone ont été enterrés au Jardin d'Essai aux Abymes (Guadeloupe).

Par ailleurs, dans l’émission Complément d'enquête, un responsable du service de la protection des végétaux du ministère de l’Agriculture révèle avoir eu recours à l’enfouissement clandestin du chlordécone. Il déclare notamment : "Au lieu d’envoyer ça dans la nature, l'État a fait un trou et l’a mis là-dedans (…) on l’a fait avec mon chef de service dans un endroit propice, on l’a enterré".

L'avocat rappelle que depuis son interdiction à la vente en 1993, le pesticide "ne peut plus être ni répandu ni stocké". Sa destruction impose des conditions de traitement aussi draconiennes que coûteuses. Christophe Lèguevaques plaide en conséquence pour l'ouverture d'une deuxième information judiciaire pour "mise en danger d’autrui ou de pollution".

Une enquête en cours

Une enquête pour "mise en danger de la vie d'autrui par violation manifeste et délibérée d'une obligation de sécurité ou de prudence" est ouverte depuis 2007. Dirigée par le pôle santé publique du tribunal de Paris, elle n’a toujours donné lieu à aucune mise en examen.

Selon une étude de Santé publique France publiée en 2018, plus de neuf Antillais sur dix présentent des traces de chlordécone dans le sang et c'est en Martinique que l'on constate le taux le plus élevé au monde de cancers de la prostate.

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