Pour davantage de légumes français, "il faut arrêter de mettre des charges supplémentaires pour les exploitations", estiment les Producteurs de légumes de France
Alors que s'ouvre cette semaine une conférence sur la souveraineté alimentaire, le président des Producteurs de légumes de France plaide pour mettre plus en avant "l'origine France" sur ses produits.
"Il faut que la France arrête de mettre des charges supplémentaires pour les exploitations", a déclaré mardi 18 mai sur franceinfo Jacques Rouchaussé, président des Producteurs de légumes de France. Il participe ce mercredi à la conférence sur la souveraineté alimentaire, un des évènements organisé pour remplacer le Salon de l'agriculture, annulé à cause du Covid-19. Alors que moins de la moitié des légumes consommés en France sont aujourd'hui produits dans notre pays, Jacques Rouchaussé se fixe l'objectif de passer à "70% dans les cinq ans". Pour cela, il faut arrêter les "charges franco-françaises" et développer le label "origine France", d'après lui.
franceinfo : Qu'allez-vous demander au président de la République lors de cette conférence sur la souveraineté alimentaire ?
Jacques Rouchaussé : Aujourd'hui, il y a 40% des légumes qui sont produits chez nous, on a plus de 60% qui sont importés, on a une démarche de progrès qui est très importante. Mais pour pouvoir satisfaire cette démarche de progrès, pour pouvoir progresser justement par rapport à la production légumière et fruitière, il nous faut aujourd'hui prendre en compte certains phénomènes, notamment le côté main d'œuvre, le côté sanitaire. Il faut être libre d'exploiter, il faut être libre de pouvoir produire des bons produits sains, respectueux de l'environnement. Mais il faut que la France arrête de mettre des charges supplémentaires pour les exploitations. Toutes les charges franco-françaises qui pèsent sur nos exploitations font qu'aujourd'hui, vous avez du mal à pouvoir recruter des jeunes dans les exploitations, alors que c'est un métier formidable : nourrir le peuple, c'est quand même extraordinaire. Je me suis donné comme objectif d'ici deux ans, de passer de 50 à 60% d'origine France et dans les cinq ans à 70%. C'est un projet très ambitieux, mais je pense qu'on peut le réaliser parce qu'aujourd'hui nous avons tous pris conscience que la souveraineté alimentaire, c'est tout de même important, on l'a vu lors de la crise du coronavirus.
Pensez-vous que le ministre de l'Agriculture veut agir pour cette souveraineté ?
J'étais hier avec le ministre de l'Agriculture, nous avons eu un grand débat, oui il veut agir pour cette souveraineté. Je l'ai entendu également parler de la saisonnalité, c'est une chose très importante. Il faut aujourd'hui rééduquer le consommateur de manière à ce que le consommateur ne mange pas des fraises à noël, à un moment donné il faut qu'on arrête ces aberrations. Il faut que le consommateur puisse se repérer par rapport à ça. Il y a 110 espèces de fruits et légumes, vous vous rendez compte ? On a de quoi se faire plaisir quand même. Je pense qu'il faut donner des repères. Aujourd'hui le consommateur n'a plus de repères. Quand il arrive au niveau de la distribution, quelle qu'elle soit, il peut acheter tout et n'importe quand. Nous, ce que nous faisons c'est que nous ouvrons nos exploitations au consommateur pour lui expliquer comment pousse un légume, comment pousse un fruit. Ces échanges-là, cette communication, c'est très important. Nous devons également la mettre en place grâce à notre interprofession des fruits et légumes Interfel, nous avons un programme de communication renforcé pour donner tous ces repères-là.
"Trop de labels tue le label", a dit le ministre Julien Denormandie sur franceinfo. Partagez-vous ce constat ?
Tout à fait. Chacun veut apporter son label, mais vous avez une multitude de labels. Interrogez le consommateur, il ne sait même pas à quoi ça correspond. Aujourd'hui. Il y a une chose qu'il retient : l'origine France. Travaillons vraiment sur l'origine France, travaillons sur la qualité de nos produits et donnons toute satisfaction au niveau du consommateur.
Vous souhaitez que les Français consomment davantage français mais comment faire face à des produits qui viennent de pays où la main d'œuvre est moins chère ?
Je pense que par rapport à ça, il faut expliquer comment poussent nos produits. Et quand vous expliquez nos produits, la manière dont nous les cultivons, nous avons un avantage et une avance sur les autres pays. Qu'on soit clair, les autres pays utilisent des produits que nous ne pouvons pas utiliser sur notre territoire, c'est pour ça que ça coûte également un peu plus cher. Mais aujourd'hui, cette traçabilité, nous nous pouvons l'assumer.
Est-ce que vous avez l'impression que les Français consomment plus local, directement du producteur au consommateur ?
Oui, on l'a remarqué depuis un an, depuis cette crise. Aujourd'hui, le consommateur est très attentif à l'origine France, au local. Le local, c'est l'identification, c'est la proximité du producteur par rapport aux consommateurs. Mais attention, le local ne pourra pas tout résoudre, c'est une partie de la consommation, chaque consommateur ne peut pas avoir un producteur à proximité. C'est pour ça que dans notre association des producteurs de légumes de France, nous avons des petits producteurs, des moyens producteurs et des gros producteurs pour satisfaire l'ensemble de la consommation.
La réouverture à venir des terrasses, c'est d'abord des restaurants, des bars. Est-ce que ça aussi, ça va aider vos filières?
Ca fait une diversification dans la commercialisation, il y a plusieurs chaînes de commercialisation. Vous avez la grande distribution, les grossistes, les expéditeurs, les détaillants, les restaurateurs. Et tout ça, ça fait partie de notre interprofession. Et c'est avec tous ces maillons de la chaîne que nous allons arriver justement à mettre de plus en plus d'origine France et d'identification pour le consommateur.
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