Etats généraux de la justice : "Pas de travail sérieux possible en période préélectorale", selon Union syndicale des magistrats
Les Etats généraux de la justice s'ouvrent lundi 18 octobre à Poitiers. Ils ont pour objectif de "remettre à plat" le système mais sont vivement critiqués.
"Il n'y a pas, selon nous, de travail sérieux possible en période préélectorale", a estimé lundi 18 octobre sur franceinfo Cécile Mamelin, vice-présidente de l’USM, Union syndicale des magistrats, et juge aux affaires familiales à Béthune, alors que les États généraux de la justice sont lancés au palais des congrès de Poitiers (Vienne). Ces États généraux doivent permettre d'élaborer des propositions pour "remettre à plat" le système en 2022 et au-delà.
franceinfo : Qu'attendez-vous de ces Etats généraux ?
Cécile Mamelin : Pour nous le calendrier de ces Etats généraux, pour une réflexion en profondeur, nous apparaît très limité au niveau des attentes possibles. Il n'y a pas, selon nous, de travail sérieux possible en période préélectorale. On est en fin de quinquennat, on est en plein débat sur la représentation nationale, sur la loi pour restaurer la confiance des citoyens. Le timing n'est absolument pas cohérent. Ce quinquennat a commencé avec les chantiers de la justice, la justice du XXIe siècle, des tas de réformes de lois ont été adoptés, c'est très chronophage, ça demande beaucoup de moyens. Les constats sont sur la table depuis très longtemps, nous avons enfin la reconnaissance que la justice manque de façon criante de moyens satisfaisants.
Pourquoi faut-il aller plus loin qu'une augmentation de 33% du budget de la justice et une augmentation du nombre de magistrats ?
Il faut aller plus loin parce qu'à ce niveau de recrutement, depuis deux ans, on a réduit les créations de postes. A ce rythme, il nous faudra plusieurs décennies pour atteindre le niveau moyen du nombre de juges qui sont présents dans tous les pays européens démocratiques. On se satisfait de l'augmentation du budget mais allons voir de plus près les chiffres. L'augmentation en réalité pour les services judiciaires en 2022 va être de 3% pour les juridictions. L'essentiel part encore et toujours à l'administration pénitentiaire. Ne laissons pas communiquer, comme semble le faire notre garde des Sceaux, qu'on n'est pas loin du bon chiffre. On en est encore trop loin.
Des syndicats de policiers trouvent parfois la réponse pénale inefficace. Que répondez-vous ?
C'est un discours très minoritaire, nous avons d'excellentes relations et d'excellentes collaborations avec les services de police. La justice laxiste est véritablement un fantasme véhiculé par ces personnes. Les chiffres montrent que la France est l'un des pays où malheureusement le taux de surpopulation carcérale a battu des records, où les peines sont de plus en plus sévères, où la peine d'emprisonnement ferme est de plus en plus prononcée. Donc, la justice laxiste est un mensonge.
Peut-on dire que la justice est lente ?
Tout à fait. Je partage ce constat, je pense que la justice est trop lente. Mais quand vous pensez que nous avons plus d'un million d'affaires nouvelles qui arrivent par an, alors qu'à la fin du XIXe siècle il y en avait à peine 140 000, vous imaginez bien qu'il n'y a pas eu 1 000% d'augmentation du personnel. A un moment donné, il faut se poser les bonnes questions. A ce besoin de justice, il faut donner les moyens adéquats. Oui la justice est trop lente mais peut-elle faire autrement avec si peu ?
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