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"On demandera bientôt la carte Bleue avant la carte Vitale…" : les personnels de santé broient du noir

Des personnels de l’hôpital de Toulouse confient leurs doutes, leurs inquiétudes, alors qu’un récent sondage révèle que la moitié d’entre eux se déclarent insatisfaits au travail. Ils sont pourtant nombreux à témoigner de leur attachement à l'hôpital public.

Article rédigé par Clemence Fulleda
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Rassemblements et banderoles devant l'hôpital Purpan, à Toulouse, le 11 octobre 2019. (FREDERIC CHARMEUX / MAXPPP)

Soigner est une vocation. Et plus que des gestes techniques, cela rime avec des moments de partage humain. C'est pour ces raisons que Diami a choisi le métier d'aide-soignante, qu'elle pratique depuis 28 ans et qui lui rapporte 1 780 euros brut par mois. "Quand vous arrivez dans une chambre et que la personne n’est pas bien, n’a pas dormi de la nuit et est en train de pleurer, vous ne commencez pas par la toilette, mais par vous asseoir et discuter, réconforter, confie Diami. Ce n’est qu’ensuite qu’on passe à la toilette."

Je crois que c’est quelque chose qui est en moi, qui correspond à mes valeurs. Si j’outrepasse cela, je ne pourrais pas me regarder dans la glace… 

Diami

à franceinfo

Mais pour continuer à se regarder dans la glace alors que les effectifs fondent et que des lits ferment, les heures de travail s'allongent et le corps ne suit plus... Pierre, blouse blanche sur le dos où l'on peut lire "manipulateur radio en colère", confie sa détresse.

"Le corps a dit : 'Bon, stop !'"

"Cet été, je me suis retrouvé aux urgences, indique-t-il. Le corps a dit : 'Bon, stop !' On charge la mule et à un moment donné, quand il n’y a pas de reconnaissance, pas de moyens, que du mépris, cela donne envie de démissionner." Ils sont nombreux à voir la vie en noir. Selon le "Baromètre carnet de santé" réalisé par Odoxa pour la Mutuelle nationale des hospitaliers par Internet entre le 16 et le 20 décembre 2019 auprès de 936 professionnels de santé hospitalier, si plus des trois-quarts des Français se disent satisfaits au travail, plus d’un personnel de santé sur deux est insatisfait au travail.

>> "L'hôpital public s'écroule", alertent 70 directeurs médicaux de l'AP-HP dans une tribune

Et si Pierre est encore là, malgré la pression et le point d'indice gelé, c'est certainement parce que, comme tant d'autres il se bat pour que l'hôpital public ne soit pas repris par le privé. "Je pense qu’on demandera bientôt d’abord la carte Bleue avant de demander la carte Vitale, déplore Benoit Dupuy, aide-soignant aux urgences et encarté chez Sud. Et cela, pour moi, c’est inacceptable."

Je tiens parce que le militantisme me tient, parce que je n’ai pas envie que ma mère soit prise en charge comme parfois je prends en charge mes patients.

Benoît

à franceinfo

"Je tiens, poursuit Benoît, parce que je n’ai pas envie que ma grand-mère ne soit changée qu’une fois par jour et lavée une fois par semaine dans sa maison de retraite." "Je me bats parce que j’y crois. Je crois au service public et je pense que toute société du XXIe siècle devrait aller dans ce sens-là…" De nombreux services du CHU de Toulouse sont toujours en grève. Certains depuis 2018.

"On demandera bientôt la carte bleue avant la carte vitale…" : les personnels de santé broient du noir - Clémence Fulleda

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