: Reportage "J'ai raison d'y retourner ?" : le retour de Jérôme Cahuzac comme candidat aux législatives fait débat dans le Lot-et-Garonne
Quatre ans de prison dont deux ferme pour fraude fiscale et cinq ans d'inéligibilité. C'est la peine qu'a purgée Jérôme Cahuzac, ministre du Budget de François Hollande condamné en 2018 pour fraude fiscale. Aujourd'hui, l'ancien ministre revient en politique, candidat sans étiquette, pour tenter de retrouver le mandat de député dont il avait dû démissionner en 2013 après les révélations de Mediapart. Un retour diversement apprécié dans la 3e circonscription du Lot-et-Garonne, autour de Villeneuve-sur-Lot.
Veste et baskets bleues, Jérôme Cahuzac arpente le marché sur la grand-rue de la bastide de Castillonnès et s’adresse d’abord à Nathalie. "J'ai raison d'y retourner ?", lui lance-t-il interrogatif. "Oui", répond-elle. Le souvenir d’un député et d’un ministre qui a facilité des réalisations ici, c’est ce que retient le maire d’une petite commune voisine : "On l'aime bien parce qu'on se souvient de ce qu'il a été. On était contents, il a fait plein de choses à Castillonnès, à Villeneuve."
"J'ai payé ma dette"
Le come-back pourtant n'a rien d’un chemin de roses. Eliane, une électrice de gauche, décide à aborder le candidat. "Je ne comprends pas qu'avec les casseroles que vous avez… ", entame-t-elle. "Une casserole qui est suffisamment importante…", lui dit-elle avant d'être interrompue par Jérôme Cahuzac : "Mais j'ai payé ma dette. Vous êtes de gauche ? Il se trouve que ce sont les gens de gauche qui ont aboli la peine de mort physique et ce sont des gens de gauche qui veulent établir la peine de mort sociale. Je ne trouve pas ça très cohérent", tance l'ancien ministre.
"Je ne comprends pas qu'il puisse se représenter. Je trouve ça immoral. À l'heure actuelle, stop, ça va ! On a envie de personnes qui soient sans tache, qui soient humaines, ça c'est pas possible. Cette tentation de tricher, enfin ! La confiance est rompue."
Eliane, électrice de gaucheà franceinfo
Ce qui n’empêche pas le candidat de croire en son étoile, persuadé que l’absence de candidat macroniste et le choix d'un insoumis pour représenter la gauche lui ouvrent une perspective : "Je souhaite prouver que l'on peut appartenir à cette gauche raisonnable, républicaine, laïque, et que l'on peut à la fois battre un candidat de La France insoumise au premier tour, et un candidat du Rassemblement national au deuxième tour".
Candidature critiquée mais observée
Le soutien visible que lui apportent plusieurs élus locaux du Parti socialiste a tendance à agacer le candidat du Nouveau Front populaire, l'insoumis Xavier Czapla.
"Je ne sais pas de quelle gauche il s'agit parce qu'il se trouve que là, la gauche s'est réunie autour du programme du Nouveau Front populaire."
Xavier Czapla, candidat Nouveau Front populaireà franceinfo
Parmi les concurrents dans cette circonscription, il y a aussi le successeur de Jérôme Cahuzac à la mairie de Villeneuve-sur-Lot, le LR Guillaume Lepers : "On avait comme alternative la députée sortante qui n'est clairement pas à la hauteur, le candidat de Mélenchon, et le retour du passé. Si on veut offrir quelque chose d'avenir pour ce territoire, j'ai pris mes responsabilités et je me suis engagé."
En 2022, cette circonscription avait élu au second tour Annick Cousin du Rassemblement national. Elle compte aujourd'hui sur le programme du RN, la baisse de la TVA et les peines planchers pour être réélue et veut désamorcer un éventuel "effet Cahuzac". "Il a payé sa dette au niveau des sous qu'il a mis de côté, mais il n'a pas payé moralement sa dette. Il n'aura pas d'étiquette politique, donc il sera un électron libre, certes, mais n'aura pas beaucoup de poids dans l'hémicycle."
Les autres candidats dans la 3e circonscription du Lot-et-Garonne :
Annick Cousin (Rassemblement national)
Xavier Czapla (Nouveau Front populaire)
Guillaume Lepers (Les Républicains)
Bernadette Gasc (Lutte ouvrière)
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.