Résultats des élections législatives 2024 : les "brebis galeuses" et candidats problématiques du Rassemblement national ont-ils été élus ?

Le parti d'extrême droite et ses alliés ont obtenu 143 députés à l'issue du second tour. Parmi eux, des candidats épinglés durant la campagne pour des propos racistes ou complotistes.
Article rédigé par franceinfo avec AFP
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Les candidats RN aux élections législatives de 2024 (de gauche à droite) Thierry Mosca, Paule Veyre de Soras, Annie Bell, Anis Bouvard et Maïtey Pouget. (PAULINE LE NOURS / AFP / MAXPP/ FRANCEINFO)

Un parti à l'épreuve de ses "brebis galeuses", selon les mots utilisés par Jordan Bardella. Troisième force à l'Assemblée nationale avec ses alliés après le second tour des élections législatives, dimanche 7 juillet, le Rassemblement national va désormais devoir se pencher sur le cas de plusieurs de ses nouveaux députés épinglés pour des sorties racistes ou complotistes.

Pour sa défense, le parti d'extrême droite avait renvoyé à la difficulté d'investir des candidats dans le temps très contraint provoqué par la dissolution de l'Assemblée nationale par Emmanuel Macron. Le président du RN, Jordan Bardella, avait assuré que "tous ceux qui tiennent des propos qui ne sont pas conformes à [ses] convictions ser[aie]nt mis à la porte", évoquant "cinq brebis galeuses". Franceinfo fait le point sur les résultats électoraux des principaux candidats aux profils problématiques, qui ont attiré l'attention durant la campagne.

Dans les Bouches-du-Rhône, Monique Griseti, la candidate ayant intimé au chanteur Gims de "retourner de là où il vient" : élue

Dans la 1re circonscription de Marseille, la candidate RN a été élue avec 55,86% des voix, face à la candidate NFP Pascaline Lécorché (44,14%). En janvier 2022, à propos du chanteur congolais Gims, elle écrivait sur Facebook : "Qu'il retourne de là où il vient, qu'il amène toute sa tribu avec lui. Qu'il aille traire la chèvre, ça nous fera des vacances", a repéré Libération. Selon La Provence, Monique Griseti a également partagé sur Facebook plusieurs publications complotistes et xénophobes sur fond de pandémie de Covid-19. Elle a notamment dénoncé les "fanatiques du vaccin", "la dictature sanitaire" ou qualifié le virus de "rhume 19". 

Auprès de Libération, qui soulignait son "absence" durant la campagne, elle a expliqué : "Je ne parle pas aux journalistes… C'est pas contre vous, mais j'en ai marre qu'on déforme tout ce que je dis ou qu'on me traite de fantôme !"

En Corrèze, Maïtey Pouget, la candidate ayant déclaré qu'"on est envahis" par l'immigration : battue

Opposée à François Hollande dans la 1re circonscription de la Corrèze, Maïtey Pouget est arrivée en deuxième position (31,69%) derrière l'ancien président de la République (43,1%), qui était investi sous l'étiquette du Nouveau Front populaire. Filmée par LCI au marché de Brive-la-Gaillarde un matin de juin, elle avait déclaré que la France "[commençait] à être envahie" par l'immigration, mais pas "à cette heure-là" car "ils [les immigrés] dorment".

Dans les Côtes-d'Armor, Françoise Billaud, la candidate ayant rendu hommage à Philippe Pétain : battue

La candidate est arrivée troisième (26,77%) d'une triangulaire dans la 1re circonscription des Côtes-d'Armor, remportée par le candidat Ensemble Mickaël Cosson. Durant la campagne, Françoise Billaud était devenue candidate "fantôme", refusant de répondre aux sollicitations des médias et supprimant son compte Facebook après que des messages racistes, homophobes y avaient été épinglés, rappelle Le Télégramme. Sur ces posts, elle rendait notamment hommage à Philippe Pétain et saluait la mémoire du prêtre collaborationniste Jean-Marie Perrot. Ces messages sont en cours d'analyse par la justice après un signalement de la Ligue des droits de l'homme, précise Ouest-France.

Dans les Hautes-Pyrénées, Marie-Christine Sorin, pour qui "toutes les civilisations ne se valent pas" : battue

Retraitée de l'Education nationale, Marie-Christine Sorin a perdu (46,89%) au second tour face à la candidate NFP Sylvie Ferrer (53,11%) dans la 1re circonscription des Hautes-Pyrénées. Elle a été épinglée durant la campagne pour ses nombreux tweets racistes et discriminatoires. Dans l'un d'entre eux, supprimé depuis, elle assurait que "toutes les civilisations ne se valent pas", pointe Libération.

Interrogée par France Bleu Béarn Bigorre jeudi 20 juin, Marie-Christine Sorin s'est dite victime d'une "manipulation par image manquante", assurant que le tweet en question avait été écrit pour dénoncer les lapidations des femmes en Iran et qu'il ne s'agissaitt en aucun cas de racisme.

Sur le réseau social X, en février, elle avait aussi écrit à propos de la porte-parole du gouvernement, Prisca Thevenot, dont les parents sont mauriciens : "Si on lui dit de retourner sur son île, on va être taxés de racisme."

En Haute-Savoie, Anis Bouvard, candidat à la peine lors d'un débat à la télévision : battu

Les images de son débat sur TV8 Mont-Blanc avec le député sortant macroniste Antoine Armand, ont fait le tour des réseaux sociaux pendant l'entre-deux-tours. Investi dans la 2e circonscription de la Haute-Savoie, Anis Bouvard n'a remporté que 31,17% des voix, contre 68,83% des voix pour le candidat d'Ensemble Antoine Armand. Lors de ce débat télévisé, Anis Bouvard s'est montré très mal à l'aise et incapable de répondre aux questions des journalistes sur les mesures concrètes qu'il comptait défendre s'il était élu.

Dans le Jura, Thierry Mosca, le candidat sous curatelle : battu

Le candidat RN a été largement battu (34,98%) dans la 2e circonscription du Jura face à la candidate LR Marie-Christine Dalloz (65,02%). Thierry Mosca avait fait parler de lui durant la campagne, car étant sous curatelle, il ne pouvait être éligible. Mais le RN avait toutefois maintenu sa candidature. Interrogé par France 3 Bourgogne Franche-Comté, Thierry Mosca s'était défendu : "La curatelle, c'est uniquement pour des raisons financières. Comme beaucoup d'artisans, j'ai des problèmes financiers."

Dans le Loir-et-Cher, Roger Chudeau, le candidat ayant fustigé la binationalité de Najat Vallaud-Belkacem : réélu

Marine Le Pen l'avait désavoué après ses propos sur l'ancienne ministre socialiste de l'Education, Najat Vallaud-Belkacem, mais Roger Chudeau a tout de même été réélu dans la 2e circonscription du Loir-et-Cher avec 52,25% des voix face au DVD Nils Aucante (47,75%). Il avait déclaré que la nomination de l'ancienne ministre, Franco-Marocaine, avait été une "erreur", et évoqué un risque de "double loyauté" des binationaux.

En Mayenne, Annie Bell, la candidate ayant commis une prise d'otage en 1995 : battue

Opposée dans la 2e circonscription de Mayenne au candidat Horizons Yannick Favennec, Annie Bell s'est inclinée avec 31,1% des voix, contre 68,9% pour son opposant. En 1995, elle avait été condamnée à de la prison ferme pour une prise d'otage à main armée avec son mari, à la mairie d'Ernée, dans le même département. Il s'agissait selon le couple d'un acte désespéré, en raison de leur endettement, relate Le Courrier de la Mayenne

En Mayenne, Paule Veyre de Soras, dont l'"ophtalmo" est "juif" et le "dentiste musulman" : battue

La candidate RN de la 1re circonscription de la Mayenne a été largement battue (32,44%) face au candidat du NFP Guillaume Garot (67,56%). Interrogée par le média local de Laval, leglob-journal, sur le racisme au sein du RN, elle avait répondu : "C'est faux et archifaux. Dans le RN, nous avons des juifs, des musulmans, des Espagnols. Moi-même, je suis catalane, mon grand-père est né à Barcelone." Puis, elle avait justifié que son "ophtalmo" était "juif" et son "dentiste, musulman".

Dans les Côtes-d'Armor, Jean-Yves Le Boulanger, béni "par un curé de couleur" : battu

Il s'est fait connaître durant la campagne pour avoir déclaré : "C'est un curé de couleur qui m'a béni. Voyez, je ne l'ai pas écrasé avec ma moto." Le candidat RN des Côtes-d'Armor Jean-Yves Le Boulanger a été battu (29,1%) lors d'une triangulaire remportée par le candidat Ensemble Eric Bothorel (41,21%).

Dans l'Yonne, Daniel Grenon, pour qui un "Maghrébin binational" n'a pas "sa place dans les hauts lieux" : réélu

Mardi, dans son compte-rendu d'un débat d'entre-deux-tours avec sa rivale du NFP, Florence Loury, L'Yonne républicaine rapportait ces propos de Daniel Grenon, justifiant la promesse d'interdire certains postes aux Français binationaux : "Des Maghrébins sont arrivés au pouvoir en 2016, ces gens-là n’ont pas leur place dans les hauts lieux." Alors que le député sortant, élu en 2022, conteste cette citation, le quotidien publie un enregistrement sonore où on l'entend bien affirmer qu'un "Maghrébin binational" n'a pas "sa place dans les hauts lieux".

Invité par BFMTV, mercredi, Jordan Bardella est questionné sur cette déclaration : "Ces propos, je les trouve abjects, assure-t-il. Je vais avoir une explication avec lui, et la commission des conflits du Rassemblement national sera saisie." Il promet également que, s'il est réélu, Daniel Grenon ne siègera pas au sein du groupe RN à l'Assemblée. Dimanche soir, malgré la polémique, ce dernier a bien conservé son siège, l'emportant avec 51,38%.

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