Face à Barack Obama, Mitt Romney va devoir affûter ses armes
L'abandon de Santorum consacre Romney comme le candidat républicain, sinon officiel, du moins officieux pour affronter le président sortant. Le combat s'annonce rude pour l'ex-gouverneur du Massachusetts.
La voie est libre pour Mitt Romney. Après trois mois de bataille acharnée dans son propre camp, son rival principal dans la course à l'investiture républicaine pour la Maison Blanche, Rick Santorum, a jeté l'éponge mardi 10 avril. Sauf énorme surprise, c'est donc l'ex-gouverneur du Massachusetts qui affrontera Barack Obama lors de l'élection présidentielle, le 6 novembre.
Désormais, l'équipe Romney concentre tous ses feux sur le président sortant. Le républicain sait qu'il aura fort à faire face à un dirigeant à la stature historique. D'autant que s'il a quelques atouts dans sa manche, il part avec pas mal de handicaps.
Romney, compétent sur l'économie...
Mitt Romney n'a pas attendu la fin officieuse de la primaire pour attaquer. Depuis des mois, il prépare le terrain entre deux scrutins. Il connaît le meilleur angle d'attaque, et s'y tient. "Il devient de plus en plus clair que l'économie selon Obama ne fonctionne pas et qu'après trois ans au pouvoir, le président est à court d'excuses", a-t-il ainsi martelé vendredi à l'occasion de la publication des dernières statistiques sur l'emploi, jugées décevantes par les analystes.
Avec un taux de chômage à 8,2% en mars, certes en légère baisse, la situation économique du pays reste la première préoccupation des Américains. Barack Obama est accusé par ses adversaires d'avoir privilégié la réforme emblématique de l'assurance santé au détriment des politiques pour l'emploi. Le président doit défendre un bilan en la matière fortement teinté par la crise et sans cesse demander à ces concitoyens un peu de patience envers une machine qui tarde à repartir.
L'exercice se complique encore pour Barack Obama lorsque des crises ponctuelles cristallisent le mécontentement de ses concitoyens, comme en ce moment avec la hausse du prix de l'essence. Mitt Romney, lui, met en avant son expérience de businessman aguerri dans le milieu de la finance - il a fondé la société d'investissement Bain Capital - pour se présenter comme l'homme de la situation.
...mais loin des préoccupations de la classe moyenne
L'argument porte : selon un sondage Washington Post / ABC News (PDF en anglais) publié mardi, 47% des personnes font confiance à Mitt Romney pour gérer l'économie du pays, contre 43% pour Barack Obama. Mais le républicain marche sur un fil : sa réussite personnelle est à la fois un atout et une faiblesse.
Le multimillionnaire peine en effet à convaincre les Américains en difficulté qu'il peut se représenter leurs problèmes. Des doutes compréhensibles lorsqu'on sait que sa fortune personnelle est estimée à plus de 190 millions de dollars (plus de 144 millions d'euros). En face, Barack Obama, tout en affirmant sa foi dans le libéralisme, explique dans son discours sur l'état de l'Union ne pas vouloir d'un système où "un nombre de plus en plus restreint de personnes s'enrichit, pendant qu'un nombre croissant d'Américains s'en sortent à peine".
Pour faire oublier ses points faibles, Mitt Romney affine son message. Mardi, il a rencontré une douzaine de femmes d'affaires avant d'attaquer le bilan de son rival sur l'emploi... des femmes. Le candidat explique que 92,3% des pertes d'emploi ont concerné des femmes depuis l'arrivée au pouvoir de Barack Obama. Un chiffre statistiquement correct, mais qui ne peut être attribué à la politique du président en place, selon le spécialiste de la vérification de faits Politifact (en anglais).
Objectif : reconquérir les femmes, majoritairement pour Obama
Le candidat républicain ne s'empare pas du sujet par hasard : il accuse un retard considérable dans les sondages auprès des femmes. Le résultat de certaines polémiques enflammées dans lesquelles son camp s'est embourbé pendant la primaire, comme le débat sur le financement de la contraception. Ce dernier a mis sur le devant de la scène les tenants de la ligne la plus outrancière du camp conservateur, à l'instar du commentateur Rush Limbaugh. Mitt Romney, dans l'impossibilité de les désavouer sous peine de passer pour trop modéré, en fait aujourd'hui les frais.
Selon un sondage USA Today / Gallup publié le 2 avril, si les deux candidats sont quasiment à égalité chez les hommes dans l'électorat crucial des "Swing States", ces Etats susceptibles de basculer lors de l'élection générale, Barack Obama a 18 points d'avance dans l'électorat féminin, qui place la couverture santé en tête de ses préoccupations.
L'équipe Romney a bien fait ses devoirs : elle sait qu'il lui faut reconquérir ce vote pour espérer gagner. Et ne compte pas seulement sur le candidat pour cela. Sa femme, Ann Romney, apparaît de plus en plus sur le devant de la scène.
Ann Romney, l'épouse providentielle ?
Naturelle et chaleureuse, à l'aise dans la foule comme sur le podium, cette mère au foyer de 62 ans qui se bat contre la sclérose en plaques bénéficie d'une popularité croissante. Elle la met au profit de son mari dans tout le pays, auprès des femmes en particulier. "Nous avons besoins de vous", leur explique-t-elle, relate CBS. Avant d'aller poster sa recette de pain de viande sur le réseau Pinterest, où sa page personnelle fait fureur.
Elle apporte à Mitt Romney ce qui lui fait cruellement défaut : le charisme. Le candidat peine à déclencher les passions, dans la base du parti comme dans l'électorat centriste. Tout l'opposé de son adversaire. Même ceux qui n'approuvent pas son action sont touchés par l'aura personnelle du président sortant. 64% des personnes interrogées dans le sondage Washington Post / ABC jugent qu'entre les deux rivaux, Barack Obama semble"la personne la plus aimable et la plus amicale", contre seulement 26% pour Mitt Romney.
En berne à la fin de l'année 2011, la cote de popularité d'Obama est remontée ces derniers mois. A l'issue de la primaire républicaine, le président semble surtout avoir une bonne longueur d'avance sur son rival : il est crédité de 51 % d'intentions de vote, contre 44% pour Mitt Romney. L'ex-gouverneur du Massachusetts a sept mois pour tenter de renverser la vapeur.
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